Brothers in Arms

Chapitre 29

Ellie

Le lendemain de notre petite sauterie, le réveil est quelque peu difficile. Le marteau piqueur dans mon crâne me fait bourdonner les oreilles et j'ai mis ma vie à sortir du lit. J'ai réussi à m'asseoir au bord du matelas, les pieds au sol, mais impossible de me mettre debout. Ma tête s'affaisse et je sens les larmes me monter aux yeux. Faire la fête hier m'a permis de m'évader l'espace d'une soirée, mais mes démons sont déjà en train de reprendre le dessus et mon esprit s'égare encore dans les méandres de mon passé.

Je n'ai pas entendu Connor s'approcher de moi, j'étais perdue dans mes pensées et quand sa main est venue se poser doucement sur mon épaule droite en déposant un baiser avec douceur, j'ai eu un mouvement de recul et un sanglot déchirant m'a échappé. Je regrette aussitôt ce geste qui me fait souffrir encore plus, surtout en voyant l'expression sur le visage de Connor qui paraît, triste, désemparé de me voir dans cet état. Je sais qu'il se sent impuissant, je l'ai entendu en parler avec sa mère.

— Laisse-moi t'aider Eleanor, me demande-t-il, presque implorant.

Lui seul m'appelle comme ça et lui seul arrive à me faire lâcher prise et reprendre mon souffle. Mon cœur s'emballe et je sens mes mains devenir moites, ma respiration devient plus courte. La crise d'angoisse est en train de monter en moi et Connor l'a compris. Il s'installe dans mon dos, en me parlant doucement pour me rassurer. Ses doigts effleurent mes mains qui enserrent ma taille dans une position que je voulais réconfortante et je ferme les yeux.

— Respire doucement, avec moi Amour, me dit-il en prenant de profondes inspirations sur lesquelles je me calle, les yeux fermés.

Finalement je laisse ma tête percuter son épaule gauche et il me serre contre lui, m'enveloppe pour me protéger, je le sens. Je ne sais pas comment l'expliquer, mais je le ressens au plus profond de moi. Sa main droite attrape mon genoux gauche et il me fait pivoter pour me prendre dans ses bras et me serrer contre lui. Je soupire et je pense que c'est de soulagement, de savoir que je peux me reposer sur lui, complètement, alors que je n'arrive plus à avancer seule. Il n'attend que ça de moi, que je me repose sur lui. Je suis sûre qu'il culpabilise encore malgré la conversation qu'on a eue il y a quelques jours.

— Je suis désolé Eleanor chérie, je suis sincèrement désolé. Et je te jure que je trouverai celui qui t'a fait ça et je le lui ferai payer.

Il a dit sa dernière phrase les dents serrées et j'ai senti son corps se tendre de colère. Il m'installe sous la couette et je l'entends hoqueter et grogner en voyant mon corps meurtri. Ce n'est pas la première fois mais sa réaction est toujours la même. Je suis bleue et violette par endroits et les hématomes les plus impressionnants se trouvent au niveau de mon abdomen. Je le sens passer ses doigts le long de mes cicatrices dans le haut de mon dos, celles d'une autre torture que j'ai subie quelques années plus tôt. Il ne pose pas de questions, et se dirige vers la salle de bains.

J'entends de l'eau couler dans la baignoire ; Connor est en train de me préparer un bain pour m'aider à me détendre. Il revient me chercher quelques minutes plus tard, en me prenant dans ses bras pour me déposer dans une eau chaude et mousseuse. Je le sens entrer dans l'eau derrière moi et passer ses jambes de chaque côté des miennes avant de se serrer contre mon dos et de m'envelopper de son corps.

Je ne bouge pas d'un millimètre, je suis bien. Il paraît que le peau-à-peau est un excellent moyen de rassurer un nouveau-né et que ça renforce les liens qui unissent une mère à son enfant. Je ne sais pas si c'est vrai. Je ne le saurai jamais de toute façon. Mais en tout cas, pour les adultes en état de choc post-traumatique comme moi, ça marche très bien. J'ai chaud et je me sens bien pour la première fois depuis des jours. Si j'étais vraiment honnête avec moi-même, j'avouerais que ça fait même des années que je ne m'étais pas sentie aussi bien qu'à cet instant.