𝐒𝐇𝐎𝐍𝐆𝐈 - T1

𝟹𝟶. 𝙹𝙴𝚄𝚇 𝙳𝙴 𝙲𝙰𝚁𝚃𝙴𝚂

Meladya

Passé...

La chambre est plongée dans une pénombre épaisse, à peine troublée par la lumière vacillante d'une lampe à huile. Le léger crépitement du feu dans la cheminée semble murmurer des secrets interdits, mais une atmosphère oppressante règne. 

Sur une petite table usée, un plateau de shogi est disposé, ses pièces qui sont en bois sombre, sont patinées par le temps et l'utilisation. Je me tiens au centre de la pièce, m'efforçant de comprendre l'intensité du jeu que j'affronte. 

Devant moi, se tient mon père. La mâchoire carrée et des yeux tel un prédateur. Il est déjà connu pour sa cruauté. Mais ce soir, après un entraînement intensif où Caleb a été battu par les coups, il a décidé de partager un moment avec sa fille. Je ne sais pas si c'est le bon choix parce que j'ai peur de lui. Mais c'est une façon de m'entraîner, de me préparer à ce que va devenir mon univers. Je déglutis, la peur au ventre. Mais je sais que si je refuse de jouer, l'atmosphère sera bien pire.

— Regarde bien, Meladya, lance-t-il d'une voix rauque.

Chaque mot est lourd, enroulé dans une menace silencieuse.

— Le shogi, c'est comme la vie. Tu dois apprendre à sacrifier des pièces pour gagner la partie. Chaque mouvement doit être stratégique. C'est comme dans notre famille.

J'acquiesce, le regard fixé sur les pièces. Je sais que chaque erreur peut déclencher une tempête. Mon père est impitoyable, surtout avec Caleb et moi. Si je perds, je le sais, je subirais sa colère. 

Ma main tremble légèrement alors que je me saisis d'un pion. Je dois jouer. D'une manière ou d'une autre, c'est ma seule échappatoire.

— Tu dois être plus violente, s'exclame-t-il, son ton se faisant plus menaçant. Plus violente ! Ne montre jamais de faiblesse. Regarde de ce que j'ai fait avec mes rivaux. Tu crois que je les ai épargnés ?

Je n'ose pas répondre. Les images de ses rivaux, brisés et humiliés, hantent mes pensées. Si le shogi est un reflet de ma vie, alors chaque mouvement de mon père est un souvenir troublant. Une cicatrice sur mon âme. 

Je me concentre, essayant de trouver un moyen de développer un plan, mais mes pensées sont tourmentées par la peur.

— Je te rappelle que ce sont des hommes, pas des enfants ! Rugit-il, me regardant de ses yeux perçants. Tu dois les anéantir. Rappelle-toi de cela, Meladya ! Si tu ne les détruis pas, ils ne te laisseront pas de répit.

La pièce se fait plus silencieuse, le murmure du feu se mêlant aux battements de mon cœur. Je joue un coup, mais mon père secoue la tête ; un rictus déformant son visage.

— Faux ! Tu es faible ! Hurle celui-ci, faisant tomber une pièce sur le plateau.

L'écho du bois résonne comme un coup de tonnerre dans ma poitrine.

— Reprends-toi !

Mes yeux s'humidifient, mais je me mords la lèvre pour ne pas pleurer. La rage et la douleur s'entrechoquent dans mon esprit, comme une tempête. Mais je ne dois pas perdre, je me dois de gagner.

— Que dois-je faire ? Je lui demande d'une voix tremblante.

Mon père se penche, les yeux brûlants de colère.