Prince et Dragon - Tome 1 : Ixen [TERMINE]

Compagnons d'ombre et de lumière - partie 3 (VERSION2)

Les rayons du soleil faiblissaient derrière la chaîne montagneuse quand Syla survola les plaines aux pieds de Rodürz. De quelques piaillements aigus, il vanta la beauté de la ville. Je lui indiquai sans attendre les pontons du Darakan qu'il gagna tel un rapace fondait sur sa proie. Heureusement que les Askaziens ne craignaient pas les griffons, car bon nombre occupaient le pont supérieur quand Syla posa les serres sur les planches.

— C'est plus loin le pont d'atterrissage ! grommela l'un d'eux qui s'était éloigné d'un bond souple avant que le griffon ne le bousculât.

Je sautai pied à terre et m'apprêtai à m'excuser, quand j'aperçus Ahédan à quelques pas derrière le guerrier.

— Je t'ai attendu là toute l'après-midi, lâcha-t-il devant mon regard perplexe. J'ai cru que tu nous abandonnais avec ton jeune Dorsükien sur les bras. Sans ta présence, nous ne pouvons pas nous permettre de garder Erich de Velt sans livrer la demoiselle qu'Aimeric a demandé en échange !

— Du calme, l'intimai-je par réflexe.

Mais ma familiarité m'attira la foudre de ses hommes. Ils comprenaient que j'étais le dragon rouge qui avait survolé leur ville, mais mon attachement à un étranger, alors qu'aucun des miens ne les protégeait contre les envahisseurs, leur restait en travers de la gorge.

S'ils apprenaient en prime que le jeune homme possédait le fragment qui me privait de mon immortalité, ils le dépèceraient vif. Je devrai prendre garde de ne pas éventer ce secret en cherchant un moyen de réparer mon âme sans tuer le jeune homme. Du moins si le destin voulait bien m'en donner le temps !

— J'effectuais un vol de reconnaissance, lâchai-je, un mensonge sans l'être. Au cas où l'ennemi essaierait de s'installer proche de la ville.

— Peut-on réellement compter sur ton soutien ? s'enquit Ahédan, sceptique. Sans que tu disparaisses ensuite durant des années.

— Mon silence n'était pas... volontaire. Vous savez tous très bien que nous n'avons pas le droit d'user de notre puissance contre les peuples terrestres. Mon père m'a imposé de rester au calme... jusqu'à ma première mort.

Ahédan me fixa un moment, sans dire mot. Son regard était sévère, bien qu'il n'osait s'opposer à moi.

— Nous éclaircirons le sujet plus tard, trancha-t-il finalement.

Il m'abandonna du regard et observa Syla.

— D'où vient ce griffon ?

— C'est celui d'Erich. Nous l'avions perdu durant le naufrage.

— Pourquoi ne vas-tu pas le chercher, piailla l'intéressé qui perdait patience.

— Puis-je ? m'enquis-je.

— Comme si je pouvais t'en empêcher, grommela Ahédan.

Il tourna les talons et s'assit sur une caisse, cachée dans l'ombre des murs.

— Reprenez vos activités ! cracha-t-il à l'attention de ses hommes.

Ils ne se le firent pas dire deux fois, tandis que leur chef les observait de son trône de fortune.

— Je dois discuter avec ton protégé, m'informa-t-il alors que je le fixai toujours. J'attendrai qu'il fête ses retrouvailles, puis nous parlerons affaires.

J'acquiesçai et m'en allai chercher le jeune homme. La soirée promettait d'être longue, mais je ne trouvai pas le courage de le lui annoncer en le retrouvant dans la chambre de sa sœur. Malgré ma mine fermée, il me suivit au travers des couloirs sans poser de questions. Je le sentis néanmoins s'agiter alors que nous montions vers le pont supérieur.