Prince et Dragon - Tome 1 : Ixen [TERMINE]

Échange - partie 2 (VERSION 2)

Sur le parvis du château, Ahédan donnait ses directives. Ses guerriers l'écoutaient, tantôt admiratifs, tantôt inquiets, quand mon arrivée attira leur attention. Ils coulèrent des regards furtifs à ma sœur à l'arrière, mais je restais le centre de leur curiosité.

— Es-tu prêt ? m'enquis-je.

Ahédan acquiesça. Je n'attendis pas davantage et matérialisai un portail magique.

— Est-ce judicieux d'aller à Dahlia ainsi ? s'inquiéta le seigneur des cieux. Tu seras vidé de...

— La distance est bien plus courte que la dernière fois, le coupai-je. Et je ne serais pas le seul dragon présent.

Ahédan n'insista pas et observa le disque qui reflétait les plaines bordant l'entrée de la capitale Nord. En cette saison, les champs de blé les coloraient sous le haut soleil et contrastaient avec le gris des remparts, à l'arrière. Ahédan me glissa un dernier regard et s'élança. Son corps traversa le portail, qui se dessina aussitôt dans les plaines nord. Je le rejoignis, Lazrie à ma suite.

Sans grande surprise, une brise fraîche souffla sur nos tenues légères dès notre arrivée. La différence de température entre le Nord et le Sud de cette île restait toujours aussi déroutante. Je n'attendis pas d'attraper la mort et m'éloignai d'Ahédan pour prendre ma forme draconique. Mais je regrettai mon empressement alors que le pauvre homme sursauta de se retrouver subitement à deux mètres de ma patte griffue.

— Trop de stress pour évaluer correctement les distances ? me taquina Lazrie.

Je l'ignorai et me couchai au sol. D'une aile tendue, j'invitai Ahédan à grimper sur mon dos. Il s'y employa sous le regard usé de ma sœur.

— Comptes-tu m'ignorer à chaque fois que je te pose une question ?

— Quand elles n'auront pas pour seul but d'user mes nerfs, tranchai-je. Mais cesse tes enfantillages. Les soldats s'activent sur les remparts.

— J'espère que vous savez ce que vous faites et que nous n'allons pas essuyer une pluie de flèches.

— Le royaume de la famille Velt n'est pas resté inconquis pendant trois cents ans pour rien, intervint Ahédan qui s'assit confortablement entre mes ailes. Tout comme ses ancêtres, Rian n'est pas un idiot qui fait feu dès qu'une personnalité de taille se présente à sa porte.

Lazrie restait dubitative. Les nombreux archers qui se positionnaient le long des remparts, arc en main, n'aidaient pas à la convaincre. Mais ce qui l'inquiétait davantage restait les quatre balistes lourdes des tours de garde que les soldats braquaient dans notre direction. Mes écailles ne les craignaient pas, contrairement aux siennes qui seraient transpercées sans protection magique. Elle n'attendit d'ailleurs pas de voir la tournure que prendraient les évènements pour couvrir son corps d'une enveloppe magique, invisible aux yeux des néophytes.

— Je me nomme Ahédan Edka ! tonna le guerrier. Je ne suis pas ici en ennemi, mais pour proposer une offre à votre seigneur Rian de Velt !

La situation me fit frissonner. Elle me rappelait ma tentative auprès d'Aimeric au nord d'Askaz... ce sale noble ne devait compter guère d'années à son compteur dorénavant. J'étais tenté de le retrouver pour le tuer. Il ne serait plus promis à Nessa et ne poserait pas de problèmes aux Askaziens dans le futur.

Si nous évinçons Domenic, il n'y a aura personne pour tenter de conquérir Askaz. Donc personne pour envoyer Aimeric sur les terres askaziennes, pensai-je alors que le capitaine des archers hélait ses hommes aux pieds des remparts.

Il leur ordonnait de transmettre le message d'Ahédan à son altesse. Malgré ma stature, les hauts murs d'enceinte m'empêchaient de voir la ville. Je ne pouvais que prendre mon mal en patience alors que nous attendions le retour du messager.