Vous n'avez jamais eu cette impression de décrocher totalement de la réalité?
De vous retrouver dans un instant figé hors du temps, comme si toutes les connexions de votre cerveau avaient sauté, plus d'images, plus d'odeurs, plus de pensées, de souvenirs, rien.
C'est exactement ce que j'avais ressenti quand je m'étais retrouvée essoufflée, échevelée, les pieds en sang, devant ce commissariat, prisonnière d'un regard que je connaissais sans jamais l'avoir vu de ma vie.
Le néant total où seul lui m'apparaissait.
Cela dura une seconde, une minute ou peut-être un siècle, je savais juste que j'étais là et ailleurs en même temps.
Je ne voyais que lui, son sourire carré, un peu étrange, mais tellement doux, ses yeux de chat, d'un brun chaud qui donnaient envie de s'y noyer, sa mèche de cheveux qui balayait son front, sa peau dorée, ses lèvres roses et charnues.
Son aura pétillait comme un cierge magique. D'un rose pâle, elle respirait la générosité et l'altruisme, la loyauté et quelque chose de plus profond.
J'étais subjuguée.
J'avais une impression de déjà vu, tenace, tel deux images que l'on tentait de mettre l'une sur l'autre sans jamais y arriver dans une veine tentative de faire une mise au point sur un appareil photo défectueux.
Puis cela s'arrêta comme c'était venu.
Je sentis le vent s'engouffrer dans mon manteau en me faisant frissonner, la douleur de mes pieds qui n'avaient pas supporté de courir avec des talons hauts, l'odeur de l'après rasage de Jimin qui se tenait devant moi et qui me parlait.
Je me concentrais pour comprendre ce qu'il disait, faisant un effort pour sortir de l'espèce de transe qui avait été mienne, l'esprit un peu cotonneux.
- Ça va, Hayun? Tu es blanche comme un linge.
Je clignais des yeux pour chasser l'image qui semblait s'être gravée sur ma rétine.
Je portais la main à ma tête qui me faisait horriblement souffrir.
Je sentais leurs regards sur moi.
Je pouvais percevoir la panique de Jimin dans la façon dont il m'appelait. L'autre voix lui parlait, mais je ne comprenais pas le sens des mots qui se télescopaient dans mon esprit.
J'avançais à l'aveugle vers cette couleur rose, vers cette voix, attirée comme un papillon par une flamme. Ma vision était floue, je ne distinguais plus que les halos lumineux que constituaient leurs auras.
Je levais le bras et posais ma main sur un cœur, il battait doucement, semblant suivre le balancement régulier d'un métronome. Je ressentais chaque pulsation sous la pulpe de mes doigts .
Une paix infinie m'envahit suivie d'une douleur intense, comme si mon propre corps avait été transpercé d'une lance acérée.
Puis ce fut le trou noir.
...
Je sentis une main qui frôlait ma peau, dégageant une mèche de cheveux de mon visage.
La sensation était à la fois familière et nouvelle, pas désagréable, je dirais même plutôt très agréable.
Mes lèvres s'étirèrent en un sourire, je me sentais bien, détendue.
Un parfum masculin m'entourait, légèrement boisé avec des touches d'agrumes.
J'inspirais profondément. C'était comme se promener dans un champ de cédrats sous un soleil de plomb.
Mon esprit était calme, il ne faisait l'objet d'aucune image, d'aucune sensation, si ce n'est la chaleur de cette caresse sur mon front.
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𝕃𝕒 ℂ𝕒𝕤𝕥𝕖
Fiksi PenggemarHayun possède le don de lire les auras. Au sein de La Caste, elle fait partie du clan des Médiums. Un jour, ses rêves l'emmènent dans sa propre histoire, celle de sa vie antérieure. À partir de ce jour-là, plus rien ne sera comme avant. Elle devra...