Addiction | réécriture [TERMINÉE]

quinze

CHAPITRE QUINZE

« Pourvu que je ne passe pas pour une débile ce soir. »

* * *

   Une nouvelle soirée ciné s'annonce. Dans la journée, je file discrètement au Rite Aid et je déambule dans les allées en cherchant quelque chose qui puisse me rendre un minimum présentable. Ce n'est pas facile. Je suis livide, bouffie. J'ai pris quatre "kilos de sevrage". J'ai d'énormes valises sous les yeux.

J'essaye plusieurs teintes de gloss pour les lèvres, fais des essais avec le sombres à paupières. Pour finir, je pique une noisette Préparation H et je l'applique sur mes cernes.

   De retour au pavillon, je fouille dans mes affaires. J'ai un joli jean skinny noir au fond de ma valise. Je me glisse dedans. Je retrouve mes bottines noires préférées que je mets aussi. J'enfile mon seul t-shirt propre et je me brosse les cheveux. Margarita observe mes préparatifs depuis son lit.

— C'est le grand soir, sí ?

— Non, je vais au ciné.

— Et tu te fais belle ? Juste pour aller au ciné ?

— Oui.

J'étudie mes cheveux dans le miroir.

— Tu veux venir ? Je lui demande.

— No, no. Pas de ciné pour moi.

— Ça pourrait te servir d'entraînement. Tu sais, pour t'habituer à ne plus buter les gens.

— No. Vas-y, toi. Amuse-toi bien.

   J'attends sous le porche. Quand je vois le van arriver, je m'approche en courant. Il y a déjà du monde à l'intérieur : deux femmes et un petit maigrichon qui porte des lunettes réparées au scotch.

   À l'arrêt suivant, deux autres personnes montent. Ça va être bondé, ce soir. Au dernier arrêt, j'aperçois Stewart. Et merde. Je fourre les poings dans les poches de ma veste. Il est accompagné d'un type plus vieux. Ils sont en train de discuter.

   Je suis assise dans le fond à côté d'une des femmes. Absorbé par leur conversation, Stewart et son ami se serrent sur une banquette à l'avant. Je me penche légèrement pour essayer d'écouter ce qu'il disent. Ils parlent de drogues.

   Soudain, j'ai envie d'hurler : « Moi aussi, je me suis droguée. Des tas de fois. J'ai pris des analgésiques, fumé du hasch, snifé de la coke. Je me suis fait arrêter. J'ai volé une voiture. J'ai couché avec un dealer et j'ai même réussi à me faire virer de chez moi. J'ai... J'ai... »

   Je me cale de nouveau sur mon siège en fermant les yeux, la tête basse. Pourvu que je ne passe pas pour une débile ce soir.