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CHAPITRE QUATRE

« C'est sûr : il faut absolument que je me trouve une bonne université. »

* * *

À la mi-juillet, les deux punkettes de mon cours d'anglais, Allison et Veronica, m'abordent à l'intérieurs de self.

— On peut s'asseoir avec toi ? Propose Allison.

— On commence à en avoir marre d'être que toutes les deux, ajoute Veronica.

— Bien sûr, je leur réponds.

Elles se laissent tomber sur des chaises en face de moi. Allison sale sa salade tandis que Veronica noie son énorme assiette de frites sous du ketchup en soupirant :

— J'en peux plus des cours d'été.

— Comment tu supportes de rester assise devant ? Me demande Allison.

Je hausse les épaules.

— En tout cas, tu es super intelligente, affirme Veronica, qui porte un pull noir à capuche avec des millions de minuscules crânes imprimés dessus.

— Ouais, tu connais toutes les réponses, acquiesce Allison.

J'explique ma situation :

— J'ai loupé une partie de l'année scolaire, alors j'essaie de me rattraper.

— Moi, c'est les révisions, c'est pas mon truc, déclare Allison en mâchant sa salade. Je déteste les devoirs. D'ailleurs, je n'ai jamais pigé pourquoi on ne pouvait pas les faire en classe.

— Je hais les livres, renchérît Veronica, en plus, j'ai un problème avec la lecture. Ils ont fini par s'en rendre compte. J'ai un trouble de l'apprentissage.

— Tu arrives quand même à lire un peu, dit sa copine.

— Oui, les pancartes, par exemple.

— Et les magazines Us Weekly et Vogue.

Entre deux phrases, elles mastiquent bruyamment leur repas.

— Parle-nous un peu de toi, continue Allison.

— Ouais, on se demandait... fait l'autre.

— Tu as un copain ?

— C'est quoi ta situation — côté mecs ?

Elles me dévisagent, impatientent d'obtenir une réponse à cette question qu'elles jugent essentielle.

— Eh bien... je ne sais pas si je peux le qualifier de "petit-ami", mais oui, j'ai quelqu'un. On a plutôt une relation longue distance, en ce moment.

— Oh, dommage, dit Allison. Ce genre de relation ne marche jamais.

— Ils finissent toujours par te tromper, assure Veronica. Moi, c'est ce qui m'est arrivé.

— Il est où ?

— À Redland, je réponds.

— C'est où, ça ?

—Plus au sud. Près de la Californie.

— Pas cool, marmonne Allison. Les californiennes vont te le piquer.

— Elles ont toutes de faux seins, enchaîne Veronica.

— Les garçons aiment ça. Ils prétendent que non, mais si. Plus ils sont gros, plus ça leur plaît.

— Je connais une fille qui s'en est fait poser des énormes. Ses parents lui ont offert l'opération pour son anniversaire.

— C'est trop flippant. T'imagines ? Te faire acheter des seins par ton père ?

Elles se taisent une minute pour pouvoir manger. Puis Allison reprend l'interrogatoire :

— Tu vas l'épouser ?

— Je ne pense pas. Je n'ai que dix-sept ans.

— D'accord. Mais il ne faut pas attendre d'être trop vieille. Après, les meilleurs mecs ne sont plus dispos. Autant en choper un bien tant que tu peux.

— Tu pourrais tomber enceinte, suggère Veronica.

Je les fixe, chacune leur tour.

— Ouais, peut-être...

— J'ai entendu un truc, l'autre jour, chez Oprah, poursuit Allison. Les garçons, c'est comme les bus. Pourquoi te jeter sur le premier quand un deuxième arrive juste derrière ? Tu me suis ? Ou... attends, non... c'est le contraire.

On hoche la tête pour saluer la sagesse d'Oprah Winfrey.

Elles avalent leurs frites pendant que je termine mon yaourt, puis elles s'excusent : elles doivent sortir fumer avant que les cours ne reprennent. Je leur dis au revoir et je les regarde partir.

C'est sûr : il faut absolument que je me trouve une bonne université.

Addiction | réécriture [TERMINÉE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant