27. Sonate Au Clair de Lune

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-- Mais ne te leurre pas, je continuerai de travailler la mélodie au piano, j'y tiens. Avec un peu de chances, tu en trouveras une meilleure encore.

-Oh merci, merci Jérémy ! Oh non, il n'y a pas mieux ! Je te promets, j'en ferai quelque chose de génial !


***

Chapitre 27

Sonate Au Clair de Lune

***

Jeudi 17 juin, lendemain du cours de ju-jitsu, dans la maison de Jérémy, 6h du matin

Jérémy ouvrit les yeux et bougea la tête. Il avait mal au cou et aux cervicales. Il se redressa.

"BROUUUUMMM"

Un gigantesque bruit dissonant et brusque retentit dans le salon, ce qui fit sursauter Jérémy. Il venait de faire tomber ses coudes sur les touches et réalisa de façon brutale qu'il s'était assoupi sur le piano noir, la tête posée contre le bord de l'instrument. Merde ! Cela a dû sûrement réveiller Arnaud, qui dormait dans la chambre d'ami au deuxième étage ! Mais que faisait-il ici, à six heures du matin ? Il n'en revenait pas.

"Qu'est-ce qu'il s'est passé hier soir dans ma vie pour que je me retrouve comme un connard, en train de passer une nuit blanche à jouer et écrire une chanson pathétique pour un enfoiré? Et sans une seule goutte d'alcool en plus ?"

OH, il savait que trop bien ce qu'il s'était passé... Il revoyait son propre regard dans le reflet du miroir, perdu, sonné, au moment où Arnaud avait prononcé ces mots :

" - Tu es ignoble avec moi ce soir, et le pire, c'est que tu ne t'en rends même pas compte. Je ne veux plus te voir. Tu vois, je suis tout sauf égoïste."

Jérémy les mains crispées sur le rebord du lavabo, s'était regardé dans la glace. Derrière lui, en arrière-plan, la douche rouge brique. Tu parles d'un refuge du troisième petit cochon de l'histoire. Le loup avait réussi à entrer. Le loup... L'homme est un loup pour l'homme. Jérémy s'était pris la tête dans les mains ...Mais qu'est-ce qu'il m'a pris, bordel, qu'est-ce qu'il m'a pris... Pourquoi est-ce que je me suis jeté sur lui, comme la misère sur le monde... Et Andy qui n'est pas là... Que ce serait-il passé...

Jérémy chassa de son esprit ce qui lui passait par la tête, ne surtout pas penser à ça, et quitta vite la salle d'eau, puis la salle de sport.

Arnaud, heureusement, était allé se coucher dans la chambre d'ami au second étage. Jérémy, lui, errait dans le salon : pour sa part, le sommeil avait démissionné.

C'est ainsi qu'il se retrouva, il ne sut comment, assis sur le tabouret en velours du piano, à jouer de tête, un peu maladroitement, le thème principal de la " Sonate au Clair de Lune".

Jérémy avait éteint les lumières et, de fait, la pleine lune particulièrement brillante éclairait presque la pièce à travers les grandes baies vitrées, apportant un peu plus de mélancolie et de mystère à cette musique lente et délicate, presque inquiétante. Les chiens, eux, ronflaient paisiblement dans leur panier, indifférents au danger qui semblait planer dans ces lieux. Les doigts de Jérémy rompaient le silence par la musique de Beethoven.

Soudain, sans crier gare, des images vinrent se superposer aux touches blanches et noires.

La serviette blanche de Jérémy et le boxer noir d'Arnaud, trempés, par terre, dans un coin de la douche rouge brique......

... Piétinés sans vergogne...

Bordel, mais qu'est-ce qu'il lui arrive ? C'est donc cela qu'il se serait passé, si Arnaud était resté dans la douche ?

Et puis c'est quoi cette histoire de saxophone si ce n'était pas une putain de déclaration d'amour ? Il ne pourrait jamais dormir si Arnaud ne lui apportait pas la réponse à la question.

Il appuya doucement les doigts des deux mains pour former l'accord final de la Sonate, pianissimo. Il avait les joues en feu. Il attrapa son téléphone, et tapa un message :

Puis il regarda l'heure d'envoi sur son téléphone

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Puis il regarda l'heure d'envoi sur son téléphone... Sans surprise, Arnaud ne répondrait pas à heure du matin, sûrement même, il a dû couper son téléphone.

Jérémy tenta encore de le chasser de son esprit. 

Une mauvaise passe. Andy allait rentrer en fin de matinée, tout allait très vite rentrer dans l'ordre. Arnaud ne voulait pas lui parler ? Eh bien, soit, cela l'arrangeait bien. De toute façon, Arnaud n'était qu'un pauvre con désespéré qui ne trouvait rien de mieux à faire que de lui déclarer sa flamme alors que lui prenait sa douche peinard. Est-ce qu'on vient emmerder des gens dans des lieux pareils, à moitié à poil, franchement ? Qu'est-ce qu'il lui a pris de le chauffer en lui parlant de ses lèvres douces et de la voix ? Il est fou ? Jérémy haussa les épaules. Normal qu'après, les instincts surgissent, Jérémy n'était qu'un homme. "Bien sûr que oui, il est égoïste, Arnaud. Il a cherché à me provoquer avec son discours sirupeux, son torse nu et ses yeux émeraude. J'avais rien demandé à personne, moi. Mon corps a parlé, mais il n'y a aucun désir là dedans". Cool, Jérémy.

Les yeux de Jérémy s'arrêtèrent sur le reflet de la lune sur le carrelage du salon, près de là où dormaient Marly et Joker, ses chiens.

Les joints du carrelage...

... comme ceux de la douche ... 

il imagina ses doigts rejoindre ceux d'Arnaud contre les carreaux rouges.. et aucun de ces dix doigts ne songeait plus à suivre le chemin des joints du carrelage...

Les yeux de Jérémy s'ouvrirent en grand, comme frappés par la foudre.

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Rendez vous vendredi 17h !!

Le Vol de la CoccinelleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant