35. Les montagnes russes ( 1)

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-- Bin Jérémy ?! Bonsoir, mais qu'est-ce que tu fous là par terre, à pleurer ?

Jérémy leva la tête et regarda autour de lui.

Le train en provenance de Paris était arrivé entre temps, et les passagers avaient déjà tous quitté la gare. Tous, sauf un, celui qu'il était venu chercher.

Le visage en pleurs, Jérémy leva la tête vers celui qui l'avait salué. 

***

Chapitre 35

Les montagnes russes (1)

***

-Oh, Jérémy, tu en fais une tête !... lança Baptiste Lecaplain.

Cela faisait déjà une demi-heure que Baptiste déambulait dans la gare à la recherche de Jérémy. Il le comprenait pas, il lui avait pourtant dit qu'il l'attendait sur le quai....Tee-shirt vert, jean, baskets, allure sportive, valise à roulettes et écouteurs, cet humoriste blond, les cheveux frisés, transpirait à grosses gouttes et avait commencé à perdre patience quand il failli trébucher sur Jérémy, assis par terre la tête baissée. Tout l'agacement qu'il ressentait s'évanouit quand cet ami leva la tête. Baptiste sursauta face à la mine de son ami, les yeux rougis, manifestement en proie à une grande peine. Jérémy, alors... !

Jérémy afficha un sourire poli pour toute réponse. Pudique par nature, Baptiste comprit qu'il ne fallait pas poser de questions.

A présent, Jérémy se releva, le salua avec une accolade et lui proposa son aide pour porter ses affaires. Puis ils circulèrent dans la gare en s'échangeant des banalités et en faisant quelques vannes.

Comme si de rien n'était. Comme si tout était normal.

Baptiste était encore troublé par la mine ravagée par les larmes de Jérémy, mais celui-ci semblait agir comme s'il tenait absolument à ce que Baptiste ne s'aperçoive de rien. 

Baptiste tenta un nouveau sujet de conversation  :

– Et Arnaud, il est arrivé ? ça fait bizarre de se voir à deux sans lui...

La question tombait sous le sens : dans l'univers de Jérémy et d'Arnaud, Baptiste, c'était le troisième larron, celui qui les rejoignait de temps en temps sur scène pour des sketchs qui avaient beaucoup de succès. Humoriste du même âge que Jérémy, Baptiste faisait des numéros visuels hilarants, comme celui du crabe au rayon poissonnerie qui s'enfuit en douce. Indépendant, travailleur, Baptiste se produisait et écrivait seul... Exception faite de leur trio réussi. Ils étaient déjà partis tous les trois en tournée, il y a dix ans, un peu par hasard ( leur producteur était le même à l'époque, et il leur a proposé de faire des bouts de spectacle ensemble sur scène). Cela avait créé une complicité et régulièrement, lors des Duos Impossibles, ils intervenaient à trois, tels les inconnus. Leurs trois différents personnages fonctionnaient à merveille ; souvent Jérémy était celui qui s'énervait, Arnaud celui qui avait les idées farfelues, et Baptiste temporisait. Ou alors, tels Arthur, Lancelot et Karadok dans la série Kaamelott d'Alexandre Astier, Jérémy s'énervait contre les deux compères aux initiatives absurdes.

Quels bons moments passés tous les trois, quels fous rire mémorables...

Pour le moment, Baptiste transpirait à grosses gouttes.

–Ouf, je suis liquéfié ! Et Arnaud, il est déjà sur place ? répéta Baptiste.

– Non, mais il y a déjà Laura Laune, Artus, Paul Mirabel, Capucine, Mickaël. Et Eric Antoine ne devrait pas tarder... 

Le Vol de la CoccinelleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant