Chapitre sept

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[Il a tout compris d'un seul regard, c'est d'ailleurs assez agaçant, ces gens qui farfouillent dans votre cervelle sans demander la permission.
Sève Laurent-Fajal]

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C'est très sérieux comme question, il se la pose réellement.

Quand il était assis juste à côté d'Aly, sur la table en bois, il a touché son bras.
Et il est même allé au delà du simple touché, il se revoit encore faire glisser ses doigts dans les sillons cicatrisés de sa peau, comme une caresse.

Et même s'il avait l'impression d'avoir perdu le contrôle de ses gestes et de ne plus rien comprendre de ses propres agissements, il ne peut pas franchement dire que c'était involontaire.
C'était pas un accident ou une connerie du genre, il a sciemment caressé son bras, sur le prétexte de sa blessure.

Et c'était agréable, c'est sûrement ça le pire.
Il garde en mémoire la texture de sa peau et la chaleur qui s'en dégageait.
C'était doux, et il aurait pu continuer s'ils n'avaient pas été interrompu, sans savoir jusqu'où il aurait continué de se perdre.

Maintenant, il se demande comment Alaric a pu interpréter son geste, est-ce qu'il l'a ressenti comme tel, comme une tentative maladroite de séduction ?
Alors qu'il sort avec sa meilleure amie ?
Mais Aly n'a rien dit, il ne l'a ni remballé ni regardé de travers, il se souvient même l'avoir entendu soupirer.

Et ce n'était pas un soupir réprobateur.
Ça ressemblait plus à une manière inconsciente d'exprimer une sensation de confort, comme s'il était en train d'apprécier son contact.
Alors quoi ?

C'est vraiment trop bizarre tout ça, et ça le rend nerveux.
Il ne devrait pas être en train de se poser ce genre de questions, il était là pour Sacha à la base, pas pour finir sa nuit complètement paumé au fond des yeux de son putain de meilleur ami.
Pourtant, c'est absolument ce qui est en train de se produire depuis un moment déjà, il n'arrête pas de frissonner en croisant son regard, il est fasciné par tout ce qu'il lui dit, il est en train de boire ses paroles merde !

Qui plus est, il vient d'apprendre qu'il est célibataire, et ça lui ferait presque plaisir.
Alors qu'il ne devrait pas du tout, il n'a pas à se réjouir de savoir qu'Aly n'appartient à personne comme s'il faisait parti de son tableau de chasse.

Il sort avec Sacha !

Mais c'est plus fort que lui, sa curiosité démange le fond de sa bouche et sa langue bouge toute seule pour continuer de le questionner sur sa vie privée.

– Tu vis seul alors ?

Alaric, qui ne semble pas se rendre compte outre mesure des réactions internes de Gabriel , vient enfoncer son coude sur la table pour appuyer son menton dans sa main, pressant ses doigts sur ses tâches de rousseur, en fixant ses yeux dans les siens.

– Non, on est deux à l'appartement. Je vis en collocation.

Imperceptiblement, du moins il l'espère, les paupières de Gabriel tressautent alors qu'il s'interroge maintenant sur l'identité de son ou sa colocataire.
Il n'a pas envie de l'admettre mais, ce grésillement tout au fond de son ventre, qui fait doucement vibrer les parois de son estomac et alourdi son abdomen d'une sensation étrange, ressemble à s'y méprendre à de la foutue jalousie.

Quelqu'un vit avec Aly, tous les jours, et il voudrait bien savoir qui.
Alors que ça ne le regarde pas, et qu'il devrait s'en foutre normalement.

Mais, alors qu'il ne trouve rien à lui répondre, le silence s'installe entre eux, marquant une pause dans la conversation et Gabriel en profite pour essayer de se remettre les idées en place.
Il sort une nouvelle cigarette de son paquet, et l'allume en faisant glisser son dos contre la chaise, soufflant sa fumée vers le ciel.

Son meilleur amiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant