Chapitre vingt-six

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[Allons jusqu'au bout de nos erreurs, sinon nous ne saurons jamais pourquoi il ne fallait pas les commettre.
Bernard Werber.]

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Le souffle plus calme, l'esprit encore ramolli par l'endorphine et toujours nu sur le matelas, Gabriel étire ses jambes, avant de les ouvrir en grand, et étale ses bras de chaque côté de son corps.
Adoptant la position dite de l'étoile de mer, et prenant allègrement toute la place dans le lit, il sourit alors qu'Aly n'a pas d'autre choix que de se coucher sur lui pour ne pas finir sur le parquet.

S'installant confortablement sur son coussin improvisé, Alaric pose sa joue sur son torse et ses mains sur ses côtes, s'autorisant au passage à fermer les yeux un instant.
Pas qu'il soit sur le point de s'endormir, mais il se sent plutôt bien comme ça, à moitié échoué et la poitrine encore palpitante.
Le petit instant reste silencieux quelques minutes, à peine perturbé par le bruit de leurs respirations, et Gabriel laisse ses pensées vagabonder pendant qu'il lève les yeux vers le plafond.
La température de la pièce augmente doucement mais sûrement, alors que le soleil tape de plus en plus fort sur les carreaux de la fenêtre de la chambre.

Les rayons viennent cogner son visage et faire transpirer un peu plus sa peau déjà bien humide de sueur.
Pourtant, il a beau crever de chaud, la présence d'Alaric affalé sur lui ne le dérange pas. C'est même plutôt le contraire, s'il n'était pas venu de lui même s'installer sur lui, il serait sûrement aller le chercher.
Juste pour le plaisir de l'avoir encore contre lui.

Pourtant, dans ses souvenirs, il a toujours trouvé ça inconfortable quand Sacha venait se coller à lui alors qu'il faisait quarante degrés dans la piaule.
Ce n'est pas qu'il ne l'a pas aimé, même si ses sentiments ont changés, s'il a oublié l'effet que lui faisait son sourire par le passé, il est sûr de l'avoir aimé, à un moment.
Mais avec Aly, c'est quand même différent.

Au début, il n'arrivait pas à déterminer d'où venait cette différence.
Il sentait que ses sentiments pour Alaric étaient à des années lumières de ceux qu'il a pu ressentir pour elle, mais il ne pouvait pas se l'expliquer.
Mais il vient de comprendre.

Parce qu'il n'a jamais manqué de Sacha comme il manque de lui, parce qu'il n'a jamais accordé autant d'importante aux variations d'effluves de son parfum, parce qu'il n'a jamais cherché à détailler chaque nuances de ses iris, et parce qu'il ne lui a jamais fait l'amour de cette façon.
C'est là que se trouve la différence, dans la passion.

Il a aimé Sacha d'un amour calme et mesuré.
Il aime Alaric d'un amour passionnel.
Et ça change beaucoup de choses, l'air de rien.

Son cœur bat plus vite avec lui, il devient stupide et déraisonné dès qu'Aly se tient dans les parages, il perd ses moyens quand il l'embrasse, et il en oublie même parfois de respirer.
Et pour toutes ces raisons, il voudrait pouvoir rester là, comme ça, sans avoir à se dire qu'il faudra rentrer chez lui dans quelques heures et retrouver ses mensonges là où il les a laissés ce matin.
Il adorerait passer ses nuits ici, s'endormir dans les bras de celui qu'il aurait le droit d'appeler "son mec", et se réveiller paisiblement à côté de lui.

Il est bien conscient d'à quel point la situation est complexe et délicate pour Alaric, et il veut bien faire preuve de patience et de compréhension.
Néanmoins, il n'empêche que ça ne pourra pas s'éterniser dans ces conditions, autant pour eux que par simple respect pour Sacha. Aborder le sujet s'avère épineux, mais puisqu'ils ne disposent que de peu d'occasions pour en parler en face, il va falloir en parler aujourd'hui.
Maintenant, même.

Cela dit, il n'a sincèrement pas envie de foutre en l'air cette journée ensemble avec une dispute malvenue et un débat stérile, alors il fait l'effort d'y aller un minimum en douceur. D'abord, sentant Aly quelque peu léthargique et bercé par le balancement régulier de sa poitrine, il referme doucement ses bras autour de lui, promenant légèrement ses doigts le long de son dos.
Traçant les reliefs de ses vertèbres, il chatouille sa peau en soufflant dans ses cheveux pour le ramener sur terre.

Son meilleur amiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant