Chapitre vingt-sept

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[Si je fermais les yeux, si je refusais de te regarder, que ferais-tu de toute cette beauté ?
Jean-Paul Sartre.]

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En sortant de la salle de bain, les cheveux toujours humides et l'odeur encore toute fraîche du déodorant sur sa peau, Alaric apprécie pleinement le confort de se sentir propre et apaisé.
Après cette douche amplement méritée, dont il a accessoirement profité pour mater allègrement l'incroyable cul de son amant, il est bien déterminé à s'occuper désormais de ce méchant coup de soleil.
Sur le trajet qui les mène à la chambre, il fait machinalement tourner dans sa main le tube de Biafine en râlant intérieurement.
Même s'il ne le dit pas clairement, il est un peu contrarié que Gabriel n'ait pas fait attention à sa peau depuis sa dernière mise en garde.

C'est pas pour jouer les rabat-joie, mais il a vu tellement de choses dégueu depuis qu'il est en médecine, que ses cheveux se dressent sur sa tête à chaque fois qu'il voit quelqu'un de son entourage ne pas faire attention à sa santé.
Songeant à des ulcères cutanés et autres joyeusetés purulentes, son dos frissonne quand il pousse la porte de sa chambre, Gabriel sur ses talons.
Tous deux simplement vêtus d'un boxer, à cause de la chaleur ambiante de l'appartement -et puis pour le plaisir de reluquer l'autre également- , ils entrent à nouveau dans la pièce désordonnée en refermant derrière eux.

L'atmosphère est calme, radoucie après leur précédente conversation quelque peu désagréable, qu'il préfère d'ailleurs ranger dans un coin de sa tête pour le moment afin de ne plus y penser.
Il a déjà suffisamment conscience de ses torts de toute manière, et gâcher cette journée avec Gabriel ne fait décidément pas parti de ses plans.

Alors, pour tourner la page sur cet événement et passer définitivement à autre chose, il intime à son amant de prendre place sur le lit et de s'y allonger à plat ventre.
L'écoutant sans poser de questions, Gabriel prend le temps de s'installer confortablement, croisant ses bras sous sa tête et détendant ses épaules au maximum.

Quelque peu envoûté par sa silhouette, Alaric reste planté près du lit pendant plusieurs secondes, lorgnant sans discrétion sur les courbes intimes de son anatomie. Gabriel a un cul à damner un saint et, à l'occasion, Alaric y ferait volontiers un petit tour du propriétaire.

Se ressaisissant après un bref moment, il secoue la tête pour recentrer ses pensées avant de monter, debout, sur le lit. Il enjambe le corps de son amant, se plaçant au-dessus de lui, avant de s'asseoir confortablement sur son fessier.
Perché sur son siège improvisé, il ouvre son tube de crème en prenant soin de placer le bouchon près de son genou, pour ne pas le perdre, avant d'appliquer l'émulsion directement sur la peau rougie.

En posant ensuite ses mains sur son dos, il sent ses muscles se contracter et ses épaules tressauter sous la pression de ses paumes, alors qu'il masse légèrement la brûlure pour y faire pénétrer la Biafine.

– Putain, tu me fais mal !

– Bien sûr que ça fait mal, t'es cramoisi.

Secouant la tête de droite à gauche en roulant des yeux, il étale attentivement la crème sur toute la surface abîmée, s'appliquant tout de même à ne pas trop le faire souffrir.
Même si c'est bien fait pour lui !

Massant lentement pour tenter d'apaiser au maximum l'épiderme agressé, il suit du regard ses propres mains, scrutant les reliefs de ses muscles dorsaux, la courbe de ses épaules et les lignes de sa nuque. Et malgré quelques tressautements d'inconfort quand ses doigts passent sur les zones les plus atteintes par le soleil, Gabriel demeure désormais muet.
A travers le silence, respirant calmement, Alaric se mord l'intérieur des joues en songeant que, bientôt, il faudra le laisser rentrer chez lui sans savoir quand il le reverra.
Quand il y pense, ses émotions sont confuses.
Parce que, dans le fond, il s'en veut d'agir de cette manière dans le dos de sa meilleure amie, de lui voler son mec et de s'échouer sur ce corps qui ne lui appartient pas.
Trahir Sacha le blesse, et il n'est pas fou, il sait parfaitement qu'un jour ou l'autre, ses décisions lui retomberont dessus avec la violence d'un coup de masse en plein visage.
Il se sent coupable, et c'est ce qu'il est en réalité, coupable de trahir son entourage et de forcer Gabi à l'infidélité.

Son meilleur amiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant