partie 39

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Le lendemain, en milieu de matinée, Louve rejoint la boutique. Elle est de bonne humeur, elle a passé une nuit très reposante et confortable grâce à sa nouvelle acquisition. Elle toque à la porte de la petite boutique mais elle ne voit pas le vieil homme. Elle colle presque sa tête à la vitre, ses mains près de ses yeux pour essayer de discerner quelque chose. L'espace semble vide, pourtant ses affaires sont toujours là. Elle décide de faire le tour de la boutique, d'une allure rapide elle marche jusqu'à s'arrêter net. L'homme est là, allongé entre deux grosses poubelles.

- Vous vous sentez bien ? demande-t-elle.

En entendant l'homme grogner quelque chose d'incompréhensible, elle se rapproche, avant de voir une tâche de sang sur sa chemise.

- Edgar ? Ça va ?

L'homme accepte la main tendue de la femme avant de se relever péniblement, il ouvre sa chemise foncé en grimaçant de douleur, une morsure bien visible de rôdeur est marquée dans sa peau. Louve pose une main horrifiée sur sa bouche.

- Qu'est ce qui s'est passé ? demande-t-elle incrédule, avant de regarder autour d'elle, ne voyant pourtant aucun rôdeur.

L'homme ne répond pas, il retourne à la boutique en marchant difficilement, suivi de près par Louve. Il déverrouille la porte avant de s'étaler sur une chaise. La jeune femme ne sait pas quoi faire, la morsure est sur la poitrine de l'homme, elle ne peut pas retenir le venin ou les particules ou la chose qui transforme les hommes en morts vivants...

- Ça suffit gamine, arrête de penser, t'vas me donner la gerbe.

- Vous vous êtes fait mordre...

- J'sais, j'l'ai bien senti t'en fais pas.

- Mais...

- C'est la vie, coupe-t-il d'un ton plus dur. Une p'tite débrouillarde comme toi d'vrait pas paniquer pour quelque chose qui est devenu si commun.

- Qu'est ce que je peux faire pour vous ? demande Louve peinée.

- Si c'est pas trop d'mander, j'veux bien que tu m'prépares mon dernier repas. Et qu'tu restes jusqu'à, fin t'sais...

- Oui. D'accord, accepte Louve.

L'homme lui indique ce qu'il souhaite manger, la brune met tout dans une assiette, elle se concentre pour ne rien renverser à côté, ses mains sont tremblantes. Elle ramène ensuite l'assiette, composée de thon et de sardines. Elle lui tend aussi un verre remplit de rhum.

- Ah, ça c'est bon ! sourit-il en savourant sa boisson. J'en veux bien un autre.

Louve le resserre et pose le verre à côté de lui. Il mange les poissons en se léchant les doigts.

- Sois pas triste pour moi fillette. Si tu savais d'puis combien de temps j'lattends ce moment. Et puis, mon foi aurait pas tenu encore très longtemps.

- Pourquoi vous ne m'avez pas dit que vous étiez alcoolique ? demande Louve.

- Si j'lavais fais, tu m'aurais pris le rhum ?

- Je ne pense pas.

- Voilà pourquoi. Allez sers toi un verre, qu'on m'porte un toast bon sang !

La jeune femme obéit, elle se sert un verre, trinque avec celui de l'homme, avant de le finir d'une traite. L'alcool est fort, mais la chaleur qu'il provoque est réconfortante. Après son repas, elle laisse l'homme un peu seul, elle fait un peu de rangement et elle fait la vaisselle, sûrement pour éloigner le plus longtemps le moment qui va arriver.

- Gamine, viens. J'vais te donner un truc.

Louve le rejoint. Il lui tend le trousseau de clés du magasin et de la boutique.

- Fais s'que tu veux de cet endroit, et j'pense que les ressources du magasin te seront utiles...

- Merci, merci beaucoup.

- T'sais chanter ?

- Non...

- Dommage, j'aime bien la musique, souffle l'homme en pleine souffrance.

- Je peux lire si vous voulez.

- Qu'est ce t'a à me proposer ? Si c'est c'te daube de harry potter jm'en passe volontiers.

- Non, sourit Louve face à l'effroi de l'homme pour le best-seller. C'est un poème russe qui a été traduit en français.

- J'vais rien capter mais ça changera pas d'un poème normal.

Louve s'empare du livret, avant de sélectionner le premier poème qui est compté généralement aux enfants. Elle prend une voix claire, et s'exprime dans sa langue maternelle :

Un Homme s'en alla

Un jour un homme s'en alla

Avec son baluchon _

Et il marcha

Et il marcha

Toujours vers l'horizon.

Et il avançait, ce bonhomme,

Sans jamais s'arrêter

Sans faire un somme

Sans faire un somme

Sans boire ni manger.

Dans une forêt à l'aurore

Un jour il est entré _

Et depuis lors

Et depuis lors

Nul ne l'a rencontré.

S'il vous arrivait par la suite

de le voir quelque part

Venez vite

Venez vite

Nous le faire savoir !

Louve s'effondre sur le trottoir en pleurs. Elle pleure pendant un moment. Elle est couverte de terre et d'ampoules sur les doigts. Maintenant, Edgar peut reposer en paix. Elle rassemble ses affaires, emporte une partie de celles du vieil homme avec elle, avant de laisser ouverte la petite boutique. Quelqu'un finira par passer par ici et au moins il pourra y trouver refuge.

Elle finit par reprendre la route dans le silence, elle arrive deux heures plus tard au gymnase. Dès qu'elle se gare, Alison se précipite vers elle.

- J'étais inquiète Louve, ça va ? demande-t-elle.

- Oui, désolée, j'ai fait une rencontre sur la route... Mais j'ai trouvé tout ce qu'on cherchait, annonce la brune d'un sourire forcé.

Elle ouvre les portes arrière du véhicule, révélant l'arrière du van rempli de nourritures, bidons de carburant, médicaments, vêtements, produits d'hygiène...

- Où est ce que tu as trouvé tout ça ? s'émerveille la blonde.

- J'ai été chanceuse, conclut Louve.

Lip rejoint les deux filles, il enlace Louve avant d'applaudir face aux trouvailles de son amie.

- T'es prête à partir pour la Virginie ? Parce que nous on l'est.

- Vous n'êtes pas...

- On t'accompagne, coupe Alison, c'est avec plaisir. Et n'oublie pas que tu dois me présenter Jo !

- Promis, sourit Louve

Une partie des affaires du van sont rangées dans la voiture de Lip. Pour les premières heures de route, Louve conduit seule dans le van. Ils font des arrêts toutes les deux heures de route pour se reposer et intervertir les rôles si besoin. En début de soirée, Louve fixe le panneau qui se rapproche petit à petit des mètres que le véhicule parcourt, on peut y lire "Welcome to Virginia".

- Il n'y a plus de retour en arrière. Je rentre à la maison.

you are alive (TWD) TOME 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant