7. Une vie de chien

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Dimanche 10 janvier 2019 - 08h52 PM, Camp Principal.

Trois jours. Lucia était coincée dans cette cage depuis trois jours. Adossée aux barreaux de sa minuscule prison, elle somnolait. Le soleil l'épuisait, tapant sur sa tête sans aucune pitié. Toute la journée, elle y était exposée. Sauf... quelques heures, peut-être. Au moment où l'astre solaire venait frapper un bâtiment se dressant à droite de la case. À ce moment précis et pour environ deux heures, elle avait de l'ombre. C'était tout.

Trois jours. Septante-deux heures. 4320 minutes. 259 200 secondes. Sa gorge était terriblement sèche. Ses cheveux collaient sur son front moite. Son ventre hurlait famine. Mais sa cuisse ne s'était pas infectée. Pas grâce à une quelconque intervention divine, non. Juste parce qu'un pirate venait religieusement lui déposer chaque soir le nécessaire pour désinfecter sa blessure et refaire le bandage.

Tous les matins, elle avait droit à un seau d'eau glacé en guise de réveil. Ça lui permettait de maintenir un semblant d'hygiène. Un semblant de semblant. Mais au moins, elle était venue à bout des dernières traces de sang sur sa peau. C'était déjà ça de gagné.

Toute la journée, elle fixait le ciel en espérant un miracle. Toute la journée, elle était affamée. Assoiffée. Effrayée. Mais le pire, et de loin, c'étaient les autres otages. Il s'avérait qu'ils étaient une petite dizaine. Quatre étaient arrivés avec Lucia. Parmi eux, la mère des deux enfants qui avaient été emmenés au sud. Elle passait tout son temps à pleurer et à gémir, ce qui commençait sérieusement à agacer ses camarades d'infortune.

Mais ces derniers n'étaient pas à retirer du lot. À longueur de temps, ça geignait, ça suppliait, ça pleurait et surtout, ça se plaignait. Pour cette dernière discipline, ils étaient champion et ce peu importe leur langue. Ça allait de l'anglais au français en passant par l'allemand et le russe. Une véritable cacophonie multiculturelle qui offrait à quiconque l'écoutait plus de quelques minutes un mal de crâne intersidéral.

Lucia en avait marre de les entendre l'ouvrir à tout va. Elle les maudissait dans son crâne, se retenant pour ne pas leur hurler de la fermer. Les pirates n'en avaient rien à faire, de leur tronche ! Ne l'avaient-ils pas encore compris ? Autant garder un peu de dignité...

Mais la jeune fille ne parvenait pas à leur en vouloir bien longtemps : elle-même était morte de peur. Juste plus douée que les autres pour le cacher. Elle avait simplement besoin d'un exutoire. De personnes à blâmer. Mais au fond, ils étaient tous dans le même bateau. Ils étaient tous destinés à finir leur vie comme de simples esclaves d'hommes riches et dépravés.

Lucia poussa un profond soupir et changea de position, essayant vainement de trouver un angle confortable qui permettrait à son dos de se reposer. Mais il n'y en avait aucun. Elle avait essayé absolument tous les endroits possibles et imaginables de sa minuscule prison pour savoir que la moindre trace de confort avait déserté les lieux depuis bien longtemps.

Dante n'était plus venu la voir depuis leur discussion dans sa salle d'interrogatoire/enregistrement. Il lui arrivait de passer devant sa cage, mais ce n'était qu'en coup de vent. Lorsque ça arrivait, la jeune fille le dévisageait avec un mélange de haine et de défi. Elle refusait de lui laisser croire qu'elle avait baissé les bras. Elle refusait de se laisser intimider par ce malade.

Ce dernier lui rendait à chaque fois son regard, s'arrêtait une poignée de secondes pour échanger avec elle un duel silencieux, puis esquissait un sourire amusé. Ensuite, il reprenait sa route comme si de rien n'était. Dante ne l'aurait pas à ce petit jeu. Elle ne perdrait pas face à lui. Il voulait la voir ramper, peut-être. La voir supplier pour sa vie et sa liberté. Seulement, il pouvait toujours courir. S'il fallait qu'elle crève dans cette cage, elle le ferait. Mais jamais elle n'irait quémander quoi ce soit à cet homme.

Aller Simple en Enfer [T.1]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant