29. La tempête - part. 2

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Dimanche 14 février 2019 - 23h19 PM, abords du Camp Principal.

‒ Allez, dépêche-toi ! On a pas beaucoup de temps !

‒ Je fais de mon mieux !

Lucia jeta un regard inquiet aux alentours pendant qu'Agnès se démenait comme une folle pour franchir le petit tunnel aménager par les pirates. Sans doute qu'il était habituellement plus praticable. Mais avec cette pluie et la terre s'étant changée en boue, c'était une autre histoire.

La jeune fille s'était rendue en un temps record devant la cage de la Belge. Battue par la pluie et en pleurs à cause du tour dramatique qu'avait pris sa vie, elle avait été étonnamment soulagée de voir la rousse. Là où cette dernière s'attendait à se prendre une avalanche de reproches, il n'en avait rien été. Agnès savait qui était le véritable responsable de la mort de sa sœur.

Mettant à profit le grondement déchirant du tonnerre, Lucia avait fait sauter à l'aide de son 12mm le cadenas maintenant la porte de la cage en place. Elle n'avait pas le temps de chercher une clef. Après une étreinte chargée d'émotions, les deux filles avaient longé la palissade main dans la main en priant pour tomber rapidement sur le passage. Il ne leur avait fallu qu'une dizaine de minutes. La chance s'était définitivement décidée à leur sourire et elles ne comptaient pas cracher dessus.

Agnès réussit enfin à s'extirper de l'autre côté. Lucia, sans attendre, suivit son exemple. C'est alors qu'elle avait à moitié émergée du tunnel que l'alarme retentit.

‒ Merde, ils ont remarqué ta disparition, jura-t-elle en redoublant ses efforts. Ou la mienne. 'Faut se bouger !

La cadette, comme pour prouver son assentiment, prit la main de sa sauveuse et l'aida à traverser le passage. Ensuite, elles se relevèrent et, toujours main dans la main, se mirent à courir dans une direction hasardeuse. La pluie les aveuglait, elles n'y voyaient pas à cinq mètres. Le sol glissait et s'enfonçait sous leurs pieds. Les vêtements, la peau et leurs cheveux étaient couverts de boue. Mais du côté de ce dernier point, ce n'était rien : les trombes d'eau leur tombant sur la tête auraient tôt fait de les laver.

‒ Où est-ce qu'on va ?! demanda Agnès entre deux halètements.

‒ Vers la plage ! Il faut qu'on trouve un bateau ! Sans ça, on pourra pas quitter l'île !

Elles devaient presque hurler pour se faire entendre au-dessus des éléments déchaînés.

‒ Tu veux naviguer avec ce temps ?! Mais t'es complètement dingue !

‒ Agnès, est-ce que t'as l'impression qu'on a le choix ?! Je préfère crever en pleine tempête que de retourner sur ce camp de tarés !

La blonde ne répondit pas, mais au vu de la façon qu'elle avait de serrer sa main autour de celle de sa camarade, elle approuvait ses mots : plutôt mourir que de retourner là-dedans. Avec un sourire rassurant, Lucia la poussa à accélérer le pas. Elles étaient dehors. Le plus dur était fait. Ne restait plus qu'à dénicher un bateau et le tour était joué.

Un éclair zébra le ciel, éclairant d'une lumière bleutée la végétation luxuriante les entourant. Le grondement ne tarda pas à résonner, les faisant brutalement sursauter. La pluie redoubla au même instant, couvrant à moitié le cri strident de l'alarme venue du camp. Il allait leur falloir gravir une petite pente avant d'atteindre la jungle, et ça n'allait pas être une partie de plaisir au vu des conditions. Seulement, elles n'avaient pas le temps de faire le tour. Plus tôt elles pourraient se dissimuler entre les arbres et plus leurs chances de réussite augmenteraient.

« Te retourne pas et cours », songea Lucia en raffermissant sa prise sur les doigts d'Agnès. « Il n'est plus temps de faire machine arrière ». C'est donc avec détermination qu'elle entama la montée, luttant contre le vent soufflant dans leur direction.

Aller Simple en Enfer [T.1]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant