L'Expérience

CHAPITRE CINQUANTE-HUIT

       Deux semaines plus tard...

       Je relis ma copie, corrige une faute, vérifie l'heure, respire profondément. Il me restait vingt minutes. Je prends le temps de rédiger une conclusion convenable, et me lève pour rendre ma copie. J'ai des fourmis dans les jambes après être restée quatre heures assise sur ma chaise. Je salue les examinateurs après avoir signé la feuille d'émargement et quitte la pièce.

       Je m'autorise alors à respirer, et un sourire éclaire mon visage quand je vois Robin m'attendre au bout du couloir. Je marche rapidement vers lui et m'écrase contre son torse, posant ma tête sur son épaule.

       -Alors ? chuchote-t-il.

       -Alors je crois que si on me parle une nouvelle fois de la nature humaine, je pète un câble.

       -Je savais que tu allais prendre la dissertation, s'amuse mon copain. J'ai pris le commentaire, et je t'assure que je ne veux plus lire un seul texte de Pascal.

       Je souris, et descends les marches en prenant la main de Robin dans la mienne. L'écrit de philosophie était terminé. Ne restait plus que l'oral. La pire pour moi, vu mon aisance pour parler en public. On rejoint Ethan et Isia dehors pour attendre Margot et Samuel. Isia assure qu'elle a écrit n'importe quoi, bien que je demeure intimement persuadée qu'elle a géré, et Ethan affirme que si l'examinateur ne valide pas son plan, il ne dépasse pas cinq sur vingt. On part quand les deux autres nous rejoignent ; Margot est contente d'avoir réussi à insérer des citations, et son copain se plaint de ne pas avoir eu le temps de finir sa conclusion.

       Nous avions fini les cours depuis quatre jours. Les deux semaines suivantes seraient consacrées aux oraux, et heureusement pour nous, nous passions tous les six la première semaine. Je ne tiendrais pas deux semaines avec ce stress permanant. Bien que tout le monde répète qu'il faut prendre du temps pour soi, nos révisions nous empêchaient de nous voir autant qu'avant. Nous avions bien essayé de réviser tous les six, mais j'avais encore plus de mal à me motiver à travailler avec mes amis que seule. Quant à réviser seule avec Robin... Les fiches de révisions disparaissaient aussi mystérieusement que nos vêtements quand nous nous retrouvions dans nos chambres, et aucun de nous deux ne s'en souciait ; nous étions dans ces moments-là trop occupés pour penser aux épreuves qui approchaient.

       Je passais mon oral le jeudi matin, le même jour qu'Isia, et nous étions les dernières de la bande. Dès que je sors du bâtiment, j'envoie des messages sur le groupe pour leur dire que tout s'est bien passé. Mon téléphone sonne aussitôt. Je décroche en souriant.

       -Allô ?

       -Je t'avais dit que tu allais gérer bébé.

       Mon sourire s'accentue.

       -Je ne sais pas si j'ai géré, en tout cas j'ai fait de mon mieux.

       -Je suis sûr que tu as tout défoncé ! me corrige Robin. Tu viens à la maison demain ?

       -Tu ne dois pas aller au restaurant avec ta mère, Mathieu, Clarisse, Audrey, Julien et les jumeaux ?

       -C'est le midi, donc tu peux venir le soir.

       Je soupire et m'assois sur un banc pour attendre ma mère, qui avait pris sa matinée pour m'emmener à l'épreuve, et me ramener ensuite.

       -Je suis désolée chat, je suis invitée à un repas de famille et je ne peux vraiment pas annuler.

       -T'es sérieuse ?

       -Robin, je n'ai pas trop le choix, expliquai-je. C'est un repas qu'on fait tous les ans, il y a plein de membres de la famille qui viennent, et même si je préférerais être avec toi, je ne peux pas ne pas y aller.