Incompatibles

Chapitre 35 - Mystérieuse amnésie

Le vieil homme ignora la question d'Alya. Sous le coup de l'étonnement, la jeune fille avait lâché le col du vêtement du mage. Il en profita pour s'éloigner en clopinant, ne faisant que peu de cas de la présence d'Alya. Abasourdie, elle l'observa marcher, les yeux écarquillés. Au bout de quelques secondes, alors que la frêle silhouette d'Hector commençait à disparaître entre les arbres, elle se réveilla brusquement et courut vers lui le plus vite possible.

— Hector ! Attendez !

Elle le rattrapa à la vitesse de l'éclair mais, une nouvelle fois, le mage ignora sa présence. Il continuait à avancer mécaniquement. Alya eut soudainement l'impression qu'il ne l'entendait même pas. Elle l'attrapa par le bras pour le stopper mais il se dégagea violemment de sa prise. Sans prononcer un mot, il reprit sa marche.

— Hector ? Est-ce que vous vous souvenez de moi ? J'étais chez vous il y a quelques jours.

Aucune réponse. Le vieillard demeurait muet, son visage était parfaitement détendu et rien ne semblait pouvoir perturber son calme. Petit à petit, Alya sentit la panique l'envahir. Hector n'était pas dans un état normal. Elle sentit ses mains trembler et picoter légèrement. Elle se maudit de ne pas avoir encore réussi a parfaitement maîtriser les pouvoirs d'Auxence. A chaque fois qu'elle perdait le contrôle de ses émotions, l'énergie magique courait dans ses veines et se concentrait au creux de ses paumes. Elle frotta ses mains l'une contre l'autre, tentant de disperser les minuscules étincelles qui apparaissaient sur sa peau.

Elle lécha nerveusement sa lèvre inférieure et finit par remarquer qu'Hector avait arrêté de marcher. Malgré le fait qu'il soit aveugle, Alya eut le sentiment très net qu'il fixait ses mains. Un grondement sourd s'échappa de sa gorge et il tendit sa main ouverte vers Alya. Son médaillon eut à peine le temps de s'illuminer qu'une boule argentée apparut et fondit droit sur la jeune femme. Le médaillon créa un bouclier de protection autour d'elle et absorba dans un vacarme assourdissant la boule argentée envoyée par le mage.

Alya déposa sa main sur le médaillon qui venait de la sauver de cette situation. Elle respira profondément et regarda le mage qui se tenait en face d'elle. Il avait l'air furieux. Il tendit une nouvelle fois la main vers elle, prêt à l'attaquer, mais il n'en eut pas le temps. Une forme sombre se jeta sur lui et le plaqua au sol, le mettant rapidement hors d'état de nuire. Alya reconnut avec surprise son sauveur.

— Thomas ! Nous t'avons cherché partout ! Où étais-tu ? Où est Colin ?

Le soldat, occupé à ligoter les mains d'Hector derrière son dos, ne lui répondit pas. Il demeura concentré sur son action et ignora royalement la jeune femme. Cette dernière sentit la moutarde lui monter au nez. Elle s'apprêtait à l'invectiver vertement mais une voix masculine l'interrompit dans son élan.

— Thomas, il me semble qu'Ali t'a posé une question. Au vu de la frayeur que tu lui as causé, tu ferais bien de lui répondre.

Malgré l'obscurité, Alya devina la silhouette de Flavio qui se découpait entre les arbres et les buissons. Elle ne pouvait pas voir son visage, mais elle imaginait parfaitement ses traits crispés par l'agacement et ses lèvres pincées. Elle déglutit et chassa cette image de son esprit. Elle reporta son attention sur Thomas. Elle espérait de tout cœur que le petit Colin avait pu lui revenir au campement sain et sauf.

Le soldat releva lentement la tête des liens qu'il nouait et la jeune femme eut un léger mouvement de recul en découvrant son visage tuméfié. Du sang séché avait coulé de son arcade sourcilière jusqu'à sa mâchoire et l'ensemble de sa peau était couverte de traces violacées.

Flavio ne se laissa pas impressionner par les marques présentes sur le visage de son soldat. Il s'approcha de lui d'un pas déterminé et se pencha vers lui, menaçant.