Chapitre 8

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(Notes de début: attention aux petits détails...)

Je me force à nettoyer les ustensiles que j'ai abandonnés il y a deux jours sur le plan de travail. Jusqu'alors, ça a été au-dessus de mes forces de le faire.

J'allume la télé, pour avoir un bruit de fond. Je n'ai pas envie de le faire dans le silence, je risquerais de me noyer dans mes pensées.

Je me concentre sur la voix du présentateur, les dernières informations n'ont rien de palpitant. La terre continue de tourner de la même façon qu'elle le faisait il y a un an, alors que mon monde à moi est bien différent.

Je me penche en entendant son prénom.

Non.

Je dois halluciner.

Je laisse tomber le fouet dans le bol et m'approche de l'écran.

Son visage apparaît, elle est dans son appartement.

Elizabeth expose ce soir à Oslo...

Elle a réussi.

Elle a réussi à exposer à l'étranger, elle qui en a toujours rêvé. Alors que moi, quoi ? J'élève des chiens dans mon village natal. Tu parles d'un métier... Je m'installe dans le canapé, absorbé par ses cheveux auburn.

Les mêmes que j'ai tant aimé...

Elle sourit et je ressens sa fierté à travers l'écran. Quelque part, je me réjouis pour elle, et je me dis combien elle aurait aimé que je sois là, comme moi j'aurais aimé qu'elle vienne me voir s'il avait été question de la coupe du monde de hockey.

Je ferme les yeux.

Comment puis-je penser ça ?

J'éteins l'écran et me dépêche de chercher une occupation.

Je jette un œil par la fenêtre, en direction du groupe de chalets où se trouve le sapin de plusieurs mètres de haut. Nous nous embêtons à le décorer de boules et de guirlandes multicolores alors qu'une simple couche de neige est bien plus belle. Les étudiants s'activent et se mettent tous ensemble à l'œuvre.

Si je ne m'étais pas levé du pied gauche, j'y serais certainement allé pour rencontrer une nana, l'inviter chez moi et puis l'oublier le lendemain. C'était aussi simple que ça, avant. Avant elle. Avant tout ça.

Elle serait rentrée dans son pays la semaine qui suit et je ne l'aurais plus jamais revue. Après tout, rien ne me retient, Elizabeth n'a sûrement pas perdu de temps et a dû reprendre ses conquêtes rapidement...

Je suis tenté de lui envoyer un message rien que pour lui rappeler mon existence, mais je finirais par en souffrir moi aussi. Alors, je ne fais rien de cela.

Je grignote une tartine à la volée et sors à la recherche d'un passe-temps pour me vider la tête. Je ne veux pas rester enfermé dans ma colère et ma tristesse. Je préfère les refouler, tant pis si ce n'est pas la bonne façon d'avancer. C'est le mieux à faire pour le moment.

Tu la détestes. Regarde ce qu'elle t'a fait.

Je m'approche du sapin où un groupe d'espagnols – si mes oreilles ne se trompent pas – chantent et dansent en décorant l'arbre de Noël.

C'était la fête préférée d'Elizabeth, comme de tous les enfants... Cette pensée fait bouillir mon sang dans mes veines.

Je m'approche du groupe qui me salue chaleureusement. Une jeune femme blonde retient mon attention. Je pourrais tenter, je pourrais flirter avec elle. Mais je ne suis plus certain de savoir comment faire.

Comment user de mon charme ? Comment reconnaître une fille qui ne veut que du sexe ? Je savais pourtant si bien le faire avant de m'attacher à elle...

Bien plus que je ne veux me l'avouer, une partie de moi la regrette. Bien enfoui sous ma haine, mon amour pour elle n'est pas mort.

La femme roule des yeux de la même façon qu'Elizabeth le faisait. J'ai un mouvement de recul. Je ne peux pas. Impossible.

Un type pose une main sur mon épaule et me demande dans un anglais hésitant si tout va bien.

— Évidemment, mon pote ! (Je me détends et mens avec assurance). Vous avez besoin d'aide ?

— Ouais, carrément, me répond le brun.

Je souris et plaisante avec lui. Ça m'aide à relâcher la pression et, étrangement, fréquenter des gens de mon âge me permet de me sentir bien l'espace d'un instant.

Je m'avance vers l'arbre en continuant de bavarder avec le type sans faire aucune remarque sur leur choix de décorations plus que douteux...

Je leur propose d'aller récupérer une échelle pour monter en haut du sapin. Ils me remercient lorsque je réapparais avec.

La blonde grimpe la première dessus et je ne peux m'empêcher de laisser mon regard glisser sur elle. La jeune femme dépose l'étoile tout en haut de l'arbre et les autres applaudissent.

Je me prends au jeu et leur passe une musique de Noël de la région. Ils hochent la tête en rythme et chantent même le refrain avec un accent parfaitement faux, que je me retiens une fois de plus de souligner.

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Eh COUCOU ! 

bon...bon...bon

Alors Jason ?

On se dit à très bientôt ? 

All my love is for you my tulips !

Nos âmes enneigéesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant