Chapitre 10

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Lors de ma vingt-deuxième année de vie, j'ai obtenu le job de mes rêves. La banque internationale m'a engagé ! Ils m'ont fait signer un contrat en béton armé qui allait changer ma vie à tout jamais. Grâce à leur confiance sur ce bout de papier qui me liait à eux pour cinq ans, j'ai pu faire une demande d'immigration en bonne et due forme.

Je me suis senti pousser des ailes.

Ce n'est surement pas ce que la majorité des gens aimerait faire, mais moi, je ne pourrais plus m'en passer ! Je suis intransigeant. J'aime jouer dans les chiffres. J'aime ne jamais avoir à tergiverser avec la vérité. Seuls les comptes réglés sont réels. Les raisons de chacun, je ne m'en occupe pas. Je fais mon boulot et je le fais bien ! Pour preuve, je suis félicité quand je traite un dossier rapidement, c'est vachement bon pour mon égo de connard !

À vrai dire, mon métier m'oblige presque à me comporter en ordure. Les affaires sont les affaires, pas de place pour rien d'autre ! Les excuses, les pleurnicheries, le marchandage, rien ne m'importe ! Les comptes en souffrances sont ma spécialité. Je passe toujours à l'offensive dans mes dossiers. Soit le client travaille avec moi, soit je sabre ses rêves et je vends son compte à un huissier. Point barre.

Je suis l'agent de la dernière chance. Les clients sont déjà chanceux que j'existe. Parce que ce n'est pas toutes les banques qui ont quelqu'un comme moi. Mais quoi qu'il en soit, si les ententes ne sont pas respectées, c'est fini. Je ne m'embête pas avec un versement en retard, j'appelle un huissier. Je ramasse une cote sur l'argent perçu. Je remplis ma réclamation à l'intention de l'imbécile qui les a assurés, et ils couvrent la totalité de ce que le débiteur ne pouvait payer. La loi de la finance, mes amis. Tout ça n'a aucun rapport avec moi. Ce n'est pas à moi à me battre pour me faire rembourser. Je veux simplement clôturer les dossiers des mauvais emprunteurs. Ils ne génèrent rien. Ils nuisent à ma compagnie. C'est la dure réalité. Je ne fais que mon travail. Je le fais sans remords, leur situation ne me touche pas vraiment. Ce ne sont que des dossiers à boucler. Sans plus.

J'ai rapidement fait mes preuves. Je n'aime pas le travail à moitié fait, quand j'ouvre un dossier, je m'assure toujours de le refermer dans le même mois. Donc avec cette optique de départ, durant le premier trimestre de mon embauche j'en étais déjà à une vingtaine de dossiers régler. J'ai travaillé comme un dément jusqu'à apporter du boulot à la maison ! Ça va s'en dire que j'ai été dûment récompensé ! Le cachet a été magistral, je ne pensais jamais voir autant d'argent en une seule fois ! Si j'avais eu un peu moins la tête sur les épaules, j'aurais posé une demande pour l'achat d'un appartement au centre de New York. Reste que je suis ce que je suis et que je suis parfaitement conscient qu'une commission comme celle-là n'a que très peu de chance de se reproduire.

Mais en bon banquier, j'ai placé mon fric, c'est plus sûr. Quand je vais avoir l'argent, sans passer par des prêts, je me lancerais. Chaque chose en son temps ! Mes actions prennent de la valeur. Un jour, je poserais mon cul dans un appart' tout en haut d'un gratte-ciel.

Bon bref, ce n'est pas tous les jours la joie, mais c'est un boulot que j'adore. Même après près de dix années à leurs services, je ne m'en lasse pas !

C'est avec cette façon d'agir que mon surnom est né, Chacal. Dans les faits, c'est un animal pas plus gros qu'un chien qui semble incapable de faire du mal à quiconque, mais au moindre signe de faiblesse de sa proie, il la broie sans remords... Ouais, c'est mérité. Puisque je ne m'en prends qu'à ceux qui n'y mettent pas du leur !

Au début de la semaine. L'adjointe administrative de mon boss m'a déposé un dossier particulier. Un de ceux que personne n'ose toucher. C'est un dossier pour le charognard que je suis. Elle a rigolé comme une truie qu'on égorge en entrant dans mon bureau.

Le prix du péchéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant