->Chapitre 7.4<-

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Bennie

Les voitures en contre-bas continuent de défiler sous mes yeux. On aurait pu croire qu'à cette heure si tardive, les rues seraient moins bondées mais ce n'est pas réellement le cas. D'un autre côté, c'est presque amusant de voir le nombre de taxis jaunes qui passent sans arrêt, déposant tout juste une personne pour en accueillir une autre et repartir dans la nuit.

Pourtant, malgré ce manège qui continue d'avoir lieu devant mes yeux, ma dispute avec Enio persiste dans mon esprit. Une partie de moi s'en veut terriblement d'avoir eu la bassesse de mêler Zoey à tout ça et d'avoir osé dire que je regrettais notre amitié. L'autre part de moi lui en veut terriblement de ne pas faire l'effort de comprendre ma décision, ou même simplement de l'accepter.

Ce n'est pas trop en demander, si ?

J'ai l'impression d'entendre Camille à travers moi.

Il est vrai que je me suis emportée quand il s'est permis de dire que j'étais « égoïste ». Il peut parler, lui, d'égoïsme ! J'aimerais faire remarquer que je ne m'étais pas permise de remettre en question son point de vue et encore moins de lui balancer au visage qu'il faisait tout de travers avec Zoey ! J'avais pris le temps et le soin de comprendre, de faire valoir son ressentit face à la situation et tout ce que je voulais, c'est qu'il soit capable d'en faire autant pour moi.

Il faut croire que la vie a décidé de m'en faire voir de toutes les couleurs cette année.

Une chose en entraînant une autre, ce dédale de pensées me tient éveillée depuis plusieurs heures et je n'arrête pas de regarder ma messagerie vide de notifications et ce « vue » qui a pris place sous mon dernier message : « Excuse-moi, je ne pensais pas ce que j'ai dit. Je suis allée beaucoup trop loin. »

Pourquoi n'a-t-il pas répondu ? Pourquoi m'a-t-il ignoré toute la soirée ? Et pourquoi prend-il autant le parti de Jack qui, lui-même, ne se plaint pas à ce point de ma décision ? A croire que c'est Enio que je fais attendre quelques années...

Et Jack, parlons-en. Lorsque les garçons nous ont invitées, Camille, Lydie et moi, à venir les voir durant leur passage à New-York pour la tournée, je m'étais dit que ça allait être compliqué pour lui comme pour moi de garder nos distances tout en étant si proche l'un de l'autre. Je pensais que je devrais fournir des efforts surhumains pour ne pas craquer, pour compenser son manque de volonté, à lui, de laisser les choses en standby entre nous. Alors imaginez mon étonnement en réalisant qu'il avait l'air de très bien accepter l'idée et de même mieux réussir à se contenir que moi.

Avais-je mal interpréter ses intentions ? M'aime-t-il encore ou m'a-t-il déjà oubliée ? Est-il toujours prêt à m'attendre ?

Mais quand mon cerveau a commencé à brûler sous toutes ces questions et que j'étais sur le point d'aller en discuter avec lui, Avi a fait sa tête de mulle et Jack a été obligé de partir à sa recherche pour tenter de le ramener à la raison. Il était minuit passé quand on les a revu et, après ma dispute avec Enio, je n'avais plus le cœur à essuyer une possible mauvaise nouvelle.

Alors me voilà, assise au bord d'une fenêtre de la chambre d'hôtel qui nous sert de séjour, à 4h du matin, vêtue d'un simple short de pyjama et d'un t-shirt beaucoup trop large pour moi. J'essaie de me distraire ou, au mieux, me donner sommeil, en regardant les voitures passer comme on regarde normalement les moutons sauter la barrière.

Une chose est sûre, je serais soulagée une fois assise dans l'avion en direction de la capitale française demain matin. Enfin, ce matin si on veut être juste.

-Bennie ?

Je me retourne en sursaut, manquant de tomber du petit rebord. La poignée extérieure de la porte encore dans la main, Jack se tient dans l'entrée de la pièce éclairée par la lumière de la Lune. Non pas que j'avais besoin de regarder pour savoir qui avait parlé : je pourrais reconnaitre sa voix partout, tout le temps, en toutes circonstances.

Destinés à patienterOù les histoires vivent. Découvrez maintenant