-> Chapitre 7.1 <-

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Tout ce qui en vaut la peine prend du temps.

Bennie

Je ne pensais pas faire ça un jour.

Je fais partie du groupe de personnes qui peuplent cette planète et qui ont en horreur rien que l'idée de faire du sport. S'épuiser en répétant un mouvement ? Transpirer volontairement ? Non, je ne comprendrai jamais les adeptes du sport. C'est un concept inconcevable pour moi.

C'est pourquoi, je ne réussis pas à me souvenir à quel moment j'en suis arrivée à la conclusion qu'aller courir avec Alex serait une bonne idée. Et pire encore : comment lui-même a pu penser qu'accepter serait la bonne chose à faire ?

Décidément, nous avons tous les deux trop bu la tasse à la soirée piscine d'hier.

A la traîne derrière mon athlète de frère, je souffle aussi fort qu'un buffle. Outre mes jambes qui manquent de me laisser tomber toutes les trente secondes, mes poumons me brûlent, demandant toujours plus d'air que je ne peux malheureusement pas leur offrir.

Alex, de son côté, semble aussi à l'aise qu'un poisson dans l'eau. Pour lui, cette allure n'est probablement qu'une promenade de santé et, bien qu'il n'en dise rien, je me doute qu'il me maudit intérieurement parce que je l'empêche d'accélérer.

Ce que je déteste également en cet instant, c'est de me sentir toute collante dans mes vêtements, d'avoir extrêmement chaud et de réaliser qu'à côté de moi, Alex doit avoir l'allure d'un dieu grecque. D'ailleurs, j'ai déjà comptabilisé 5 filles qui ne se sont pas cachées pour le relooker en bavant. On ne peut pas en dire de même pour les garçons et moi...

-Ah regarde ! s'écrit Alex. C'est le fameux banc : on a fait le quart !

-LE QUART ?!

L'horreur doit se lire sur mon visage car la panique se lie sur celui de mon frère. Je m'arrête de courir pour reprendre mon souffle et réussir à articuler le reste de ma complainte :

-Comment on peut être qu'au quart ? ça fait au moins une demi-heure qu'on court et d'habitude tu fais ce tour en 35 minutes !

-Alors premièrement, on ne court que depuis 15 minutes. Et deuxièmement, en temps normal je n'ai pas une limace pour me ralentir.

Je me garde bien de répliquer. Après tout, il a entièrement raison et je ne suis pas du genre à être de mauvaise foi.

Je me traîne difficilement jusqu'au banc et m'y laisse tomber comme une masse. Mes jambes souffrent et ma respiration ne se calme pas aussi facilement que je l'aurais souhaité. Le soleil du Sud de la France, déjà brûlant à tout juste 9h du matin, continue de me taper dessus avec ses rayons. Quand j'avais imaginé mes vacances familiales au camping, c'était plutôt à la piscine que je les voyais.

-Puisqu'on est là à attendre, dit Alex en prenant place avec moi sur le banc, explique moi tous ces messages avec Jack. Je croyais que vous vous étiez mis d'accord pour patienter.

Nous y voilà. En y repensant, c'est probablement pour discuter avec Alex de ce sujet que je me suis engagée dans cette folie qu'est « courir ». Lorsqu'il m'a surpris en train d'envoyer une photo à Jack il y a deux jours, j'ai dû lui faire comprendre en un regard que je ne voulais pas que ça se sache. Heureusement pour moi, Alex sait se faire discret quand il le veut.

Pourtant, après deux jours à tenter de me parler en privée sans grand succès, je voyais bien qu'il commençait à perdre patience. C'est de là que m'est venu l'idée d'aller faire un footing avec lui de bon matin. De cette façon, j'étais sûre que personne ne nous épieraient.

-Et c'est ce que l'on fait, affirmais-je. Seulement, il a commencé à m'envoyer des photos de choses qu'il voit durant sa tournée aux USA et qui lui font penser à moi alors j'ai suivi le mouvement.

-Et c'est devenu une habitude ?

-En quelques sortes. C'est notre truc à nous.

-Qu'est-ce qu'il se passera quand sa tournée sera fini ?

Je prends quelques secondes pour y penser. Est-ce qu'il continuera, une fois de retour à Portland ? Ce jeu n'est peut-être qu'une habitude de tournée qui disparaîtra avec les concerts à la chaîne. Et puis moi, qui reprendrait les cours avant la fin de sa tournée, continuerais-je malgré mon emploi du temps chargé ?

-Je ne sais pas, Alex.

Du coin de l'œil, je le vois regarder droit devant lui en hochant lentement la tête, signe qu'il réfléchit aux possibilités et aux conséquences qui iront avec. Soudain, un sourire apparaît sur ses lèvres et il se tourne vers moi.

-Quel genre de choses il t'envoie ? Qu'est-ce qu'y lui fait penser à toi ?

Je souris à mon tour, repensant à toutes ces images devant lesquelles j'ai ri, souri ou eu les larmes aux yeux.

-Une affiche publicitaire pour le prochain Disney, un piano, une calculatrice-

-Une calculatrice ?

Le sourcil levé de mon frère m'arrache un rire et j'acquiesce.

-C'est pas très sexy, commente-t-il.

-J'ai aussi eu droit à la réserve de snickers d'Enio et à un magnifique haut en dentelle que portait leur maquilleuse.

-Là c'est plus logique, rie-t-il à son tour.

Ma respiration a repris un rythme normal. Je prends une grande inspiration et m'imprègne des odeurs de l'été qui ont toujours rendue cette saison plus supportable pour moi. J'ai beau aimer être en vacances, les 30°C tous les jours m'insupportent au plus haut point.

-Alors, tu vas vraiment attendre la fin de tes études avant de t'engager dans une relation avec lui ?

Alex connait pertinemment la réponse à cette question. Il sait ce dont j'ai convenu avec Jack bien que je ne lui ai pas raconté les détails (je ne veux pas savoir comment ma famille – ou Camille – réagiraient s'ils savaient que Jack a un casier judiciaire). Au fond, je pense que la vraie question qu'il ne se permet pas de formuler est « Vas-tu réussir à attendre cinq années ? ».

-Je te l'ai dit : il a besoin de temps pour mettre les choses au clair dans sa vie et, de mon côté, je n'aurais que quelques minutes de mes journées à lui offrir tant que je ne serais pas diplômée. Je préfère qu'il ne s'attende à rien plutôt que...

Plutôt que de me voir tout gâcher entre nous. Je ne réussi pas à formuler ces mots à voix haute mais Alex semble s'en satisfaire.

-Je comprends, dit-il d'un sourire compatissant.

Aucun de nous ne parle pendant ce qui me paraît durer une éternité. Et puis d'un bond, Alex se lève et sautille sur place avec beaucoup trop d'énergie pour moi qui, en à peine un quart du parcours, suis déjà lessivée.

-Debout maintenant ! Il est temps d'y retourner !

-Non, pas déjà ! me plaignis-je.

Contre ma volonté, mon frère me tire du banc et m'entraine à sa suite. En quelques secondes, me revoilà à souffler comme un buffle, les jambes flageolantes.

C'est décidé : plus jamais de sport pour moi.

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