Chapitre 8

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Les rayons du soleil rendent le froid plus supportable. Une lumière douce filtre à travers les vitres teintées de la voiture. Le toit du véhicule, également vitré, transparent, baigne l'intérieur de l'habitacle d'une clarté tamisée. La température modérée émanant du chauffage caresse mes paupières. Les sièges, d'un beige écrémé créent une atmosphère enveloppante et chaleureuse dans cet espace de la voiture de ma professeure, une oasis de confort.
L'intérieur est si vaste qu’on peut déployer les jambes ou même s'allonger. Un écran bleu à l’affichage en haute définition occupe le centre.

Mon âme s’enivre pour la troisième fois, après la cabine et le bureau, de ce doux parfum. J’en suis hypnotisé.
Jamais je n’aurais imaginé être aussi près de cette femme. Cette proximité me submerge. Je côtoie la sociologue la plus en vue du moment. Celle qui a frôlé le sol des meilleures universités : George Washington, la Sorbonne, l’Université Rome III, l’Université de Montréal, les facultés d’Assiout et du Caire en Egypte.

Je peux enfin la contempler de près. Malgré cette moue boudeuse, elle détient tout le charme du monde. Un fin nez grec, un front plat auréolé par deux mèches lisses sur les côtés. Une cascade soyeuse de cheveux entre le blond et le marron encadre gracieusement son visage, s'arrêtant délicatement au niveau de ses épaules. Sous l'effet des rayons du soleil, je ne parviens pas à distinguer une nuance unique.

Elle quitte le véhicule pour répondre au téléphone.
L’air aux environs de la voiture soulève ses cheveux, dévoilant sa nuque. Une peau laiteuse et brillante. Cristalline au niveau de ses mains, elle laisse transparaître ses veines.
Elle a incontestablement toutes les formes qu'une femme souhaite avoir.
Une tenue à son image, chic et classe avec un col en V qui laisse deviner la naissance de sa poitrine. Le reste est discrètement camouflé.
Je tâche d’être discret, mais mes joues me dénoncent et s'enflamment à force de la regarder.
Je prends une bonne respiration. J'installe ma puce dans mon téléphone tout neuf et passe un message rapide à ma mère.
Les messages de Noah, le chauffeur de taxi, me réchauffent le cœur.

"Mon sociologue, je passe à 18h pour t’embarquer dans un bar ! Et surtout ne me dis pas non, je t'invite ! Rendez-vous au parking de ta faculté ! "
Je fouille dans ma poche, les 20 dollars sont toujours là !

Je réponds rapidement à Noah pendant que Miss Darla reprend sa place à côté de moi.

– Nous n’attendrons pas Olivia ! Elle va sûrement tarder pour préparer les copies.
Elle démarre. Les premières minutes défilent dans un grand silence, elle semble concentrée sur la route.

– J'ai toujours le goût du caramel dans ma bouche, lance-t-elle.

Mon cerveau me largue un peu avant de comprendre la signification de ses mots. Elle parle de l'ascenseur.

Surpris, je ne sais que répondre.

– J'en ai un autre dans ma poche, répliqué-je.

– Cool, je le prends.
Elle esquisse un beau sourire.

– Vous me donnez quoi en contrepartie ?
Oh mon Dieu, ma langue dérape parfois ! Iram tu es foutu !

Surprise par ma question, elle se détend et affiche à nouveau son merveilleux sourire.

– Euh, je ne sais pas ! Que veux-tu en échange d'un caramel ?

Son air surpris accentue son charme et sa beauté. Sa voix ronronne doucement dans mes oreilles.

– Proposez ! osé-je.
Mon Dieu, cette femme me met dans un état ! Un parrainage pour un bonbon.

– Hmm, tu auras deux ans d'encadrement avec moi. C'est le meilleur cadeau. Tu es chanceux docteur Andalouzi.

Le mot « docteur » suivi par mon nom sonne envoûtant. Mon cœur bat la chamade.

– Trop modeste Madame la professeure, riposté-je, en insistant sur le mot professeure.

Elle semble de plus en plus étonnée et amusée. La montée d’adrénaline redouble mon audace, jusque-là, inconnue ou quasi-inexistante.

– Euh, tous les étudiants me le disent à vrai dire. Vous allez assister à mes cours et me découvrir. Wait and see M.Andalouzi.

– D'accord, je vous fais confiance, et c'est Andaloussi pas Andalouzi.

– Ah oui, un double S donc ?

– Oui, ne vous inquiétez pas, je vous pardonne.

Cette fois ci, elle éclate de rire.

Nous terminons notre chemin dans le calme. Elle reste concentrée sur la route. Je me vautre dans un doux silence songeant à ce qui m’arrive.

Quelques minutes plus tard elle s'arrête à une station-service pour alimenter le réservoir.

L’odeur d’un bon café touche mes narines, alors que la queue des automobilistes se fait longue.

Mon estomac gargouille me rappelant le lait périmé de ce matin, le regard triste de ma mère, mon effort pour éviter ses yeux, son soulagement à la réception de quelques dizaines de dollars, sa fierté de voir son fils réussir son parcours universitaire, …

J’ai accumulé de l'argent à force de travailler, non seulement pour obtenir ma bourse d’études, mais aussi sur les champs agricoles avec les paysans. Je peux m’accorder le droit d’en dépenser à mon gré. On ne vit qu’une fois.
Je descends de la voiture, profitant de la queue pour me diriger vers la cafétéria.

L'odeur s'accentue. Derrière un petit présentoir les mets sont appétissants. Une asiatique souriante derrière la caisse s'occupe de mes caprices. Elle s’incline doucement pour me saluer tout en gardant son sourire accueillant, puis me sert le mini menu.

– Deux cafés crème et deux cornettos, s'il vous plaît.

Elle passe la commande et m'invite à prendre place. Quelques minutes plus tard, elle me tend deux gobelets, un petit paquet contenant les alléchants croissants au pistache et une carte de fidélité.

Je prends la peine de remplir mes coordonnées sur leur base de données afin d'activer la carte et je me dirige vers Darla qui m'attend, garée à côté.

Je m’installe et lui tends l'un des gobelets.

– Combien de sachets de sucre ?

– Ah tu me sauves la vie ! Dit-elle en sentant l'odeur de caféine qui se propage rapidement dans l’habitacle, deux s'il vous plait !

Je lui tends l'un des cornettos. Elle en prend une grosse bouchée tel un enfant gourmand.

– Merci vraiment ! Je n'ai rien mangé depuis hier, me répond-elle, le regard reconnaissant.

– Si, mon bonbon caramélisé.

Elle faillit s’étrangler en rigolant.

– Que vas-tu demander en contrepartie cette fois-ci ?
– Votre sourire me suffit.

Je suis surpris par ma réplique audacieuse. Une gaffe ? On ne peut rappeler une parole qui bondit comme une fusée hors de sa trajectoire. C’était trop tard, malheureusement… ou heureusement ?

Miss DarlaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant