Chapitre 18 :

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PDV d'Iram :

J'avale à peine ma salive. Tout le monde me dévisage avec stupéfaction, certains  osent même venir demander plus de détails .

Humilié, devant une dizaine de mes collègues, je décide finalement de m'éclipser. Son visage tendu, ses gestes, sa façon de claquer sa portière et de démarrer sa voiture me choquent profondément . Je n'arrive pas encore à digérer sa façon de me mettre à la porte ce matin.

Je décroche le téléphone et cherche un nom qui  me réconforte : Noé. J'appelle et raccroche au bout de quelques secondes. Que vais-je lui dire ? Je ne sais même pas par où commencer.

L'engin reprend sa cachette dans ma poche et je prends la direction de la sortie. Soudain je me fige sur place. L'apparition de Madame Matilde accentue ma peur. Je veux bien lui expliquer ma situation. Elle a été gentille avec moi dans de  nombreuses situations.

Darla l'a toujours été également. Aujourd'hui elle m'a donné la plus grande leçon de ma vie. A une époque, je me sentais proche d'elle, je croyais être digne de respect à ses yeux ...

Je reste silencieux face à Madame  Matilde, en guettant ses gestes. J'ai peur qu'elle me néglige elle aussi, comme un morceau de viande jeté dans la rue.

Elle me lance un bonjour. Je déchiffre son regard, aucune haine n'est apparente, mais elle marche à rythme rapide.

Suite à son bonjour je cours vers elle comme un enfant qui retrouve sa mère. Elle m'a salué en premier. Un simple geste qui m'apaise. Je ne serai pas victime de quelconque agressivité.

_Madame, pourriez-vous expliquer ma situation à professeur Darla ? Elle m'a..

_Pas maintenant Iram ! On vient de la classer en deuxième rang ! Alors qu'elle a beau travaillé pour arracher le premier passage sur le tapis rouge. Vous pouvez imaginer la situation.

Mes traits se crispent ! Je n'aurai pas dû utiliser toute la bourse avant de m’être informé. Je pensais que tout le monde voulait me soutenir dans mes études. Mais  personne ne m'a informé sur le voyage, même pas Darla.

Ma famille vit la misère, chaque personne à ma place aurait fait la même chose ! J'ai du me servir de la moitié et cacher l’autre moitié. Que dois-je je faire maintenant ?

Madame Matilde respecte mon silence, me laisse en proie à mes lourdes pensées. Je reprends le téléphone de ma poche, j'appelle Noah mais je raccroche avant qu'il ne sonne. Non, je ne peux pas l'appeler ! Je dois compter sur moi-même ! Qu'est ce que j'allais faire ? L'appeler comme d'habitude pour lui vomir toute ma toxicité, mes faux problèmes d'homme impuissant ?

Je ne lui demanderais pas autant d'argent ! Je n'ai qu'une solution : je dois récupérer le mien.

Six heure après :

_Voilà, c'est presque réglé. Personne ne doutera de quoi que ce soit !

Maman remet doucement le ticket qui avait été arraché du pantalon de Lonar. Cette dernière accepte la situation sans trop de résistance. Elle a posé toutes ses affaires neuves sur la petite table du salon.

_Non ma chérie, les shampoings on les garde pour nous, on ne peut pas les rendre à la boutique, dis- je

_J'ai versé un peu d'eau dedans, c'est comme neuf.

Un simple sourire s'affiche face à son air malsain :

_Qui vous appris ça ? Lui dis-je

_Shawn the Sheep, me répond sa petite voix.

_Tu regarde toujours ces moutons bizarres ?

_Ils sont justes métamorphosés

_ Ouuuh, métamorphosés. INTERESSANT !

Mon sourire triste cède sa place à un pincement au cœur. Ca me fait mal  de leur arracher tout ça.

Je récupère le pantalon des mains de ma mère et l'insère dans les sacs avec les autres articles et je sors. Sur le seuil de la porte je marque une  pause pour dévisager ma mère. Comme d'habitude aucune émotion s'affiche, un simple sourire encourageant.

_Je vais vous acheter de nouveaux vêtements bientôt, cette situation est provisoire.

_Mais voyons, les armoires sont pleins de vêtements ! Ne t'en fais pas. Concentre toi sur le plus important.

Je ferme la porte et prends la direction des boutiques. Après ce cauchemar de Cannes, je vais chercher un boulot à mi-temps.

Quelques heures plus tard :

Trois milles dollars en poche. Certains articles sont refusés à la caisse. Je fouille dans les tickets de caisse et tombe sur le dernier. Voilà : "Caractère". J'avance d’un pas lourd vers la dernière boutique, la plus luxueuse. Je prie au fond de moi de  ne pas croiser la vielle dame d'autrefois.

Je traine mes pieds dans la pièce, réalisant que le rêve est terminé ; ma famille n’aura pas le privilège de se vêtir luxueusement.

Le visage souriant de la vendeuse me sort de mon amertume .

_Non monsieur, c'est un article unique, vous ne pouvez pas l’échanger ni le rendre.

_S'il vous plait, c'est une urgence ! Faites un effort!

La vendeuse demande de l'aide de son collègue. Un jeune homme de mon âge. Un refus catégorique. Hélas!.

Après quelques négociations je reprends le manteau et je quitte les lieux.

_Attendez monsieur ! Cria la vendeuse

Deux heures plus tard :

Résidence 258, oui voilà. Je n'ai qu'à reconnaitre l'entrée ! Devant la grande porte fermée je sonne au huitième appartement. Je sèche ma sueur et me redresse. Je dois assumer mes responsabilités. Professeur Matilde m'a confirmé que Darla n'est pas dans  son bureau et mais chez elle. Je dois la rencontrer pour refaire tout le travail. Il ne reste que trois jours y compris cette nuit.

Je reste quelques minutes perplexe. Dois-je l'appeler encore une fois ? Je lui ai passé un coup de fil il y a une heure resté sans réponse...

Soudain la porte de la résidence s'ouvre. Nos yeux se croisent. Mon cœur bat la chamade.

_Oui bonsoir ?

_Madame je vous ai appelée ce soir

_Oui ?

_Je viens finalement avec vous. Je peux rembourser mon voyage. Voici tout le travail, j'ai refais les retouches nécessaires et imprimé les feuilles. Dis-je en ouvrant la petite chemise dans ma main pour lui montrer le résultat qui m'a coûté trois heures de travail sans relâche.

_ Ici ce n’est pas  un lieu de travail. Je n'admets aucun contact en dehors de l'établissement universitaire, et certainement pas chez moi. Vous ne ferez pas partie de ce voyage. Je respecte votre décision, tâchez de respecter la mienne. Bonne soirée.

Puis se dirige vers son véhicule. Elle démarre dans la nuit sans attendre ma réaction.

Miss DarlaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant