19h13 :
Quatre feuilles sont déjà bien remplies corrigées et classées à droite. La cinquième est en train d'avaler la quantité d'encre qui illustre mon inspiration. Ce stylo sophistiqué est actuellement en pause. J'ai eu le plaisir de me servir de tous les instruments de ce bureau. Parmi eux, un stylo personnalisé avec un certain bleu scintillant , qui donne envie de l'user en une heure !
Mes yeux se ferment petit à petit. La présence de Miss Darla ne m'intimide plus.
On dévore le déjeuner tout en parlant de choses et d'autres. Elle me dévoile sa gourmandise, je lui sors mon humour légendaire. On sirote une bouteille de vin, elle trouve quand même le temps de répondre à ses appels en mode haut parleur. Quoi de plus spontané ?
J'ai l'envie de m'étirer, décale la chaise du bureau vers l'arrière en position presque allongé. Mes yeux se ferment malgré moi. L'espace est chauffé, embrasant de plus belle mes émotions. Je m'endors bien au chaud, le ventre bien rempli.
Le son des clefs m'alerte.
-C'est bon pour aujourd'hui, on rentre !
Je me hâte de ranger mes affaires et de nettoyer ma place. Mon téléphone vibre soudain :
"Il n'est pas encore venu mon fils ! "
En lisant ce message, mon sang se gélifie. Je serre mes dents nerveusement. Alors que je suis entrain de passer du bon temps, ma famille est dans la souffrance. Il est prévu que j'appelle le technicien pour régler le chauffage. L'eau est glacée, on ne peut pas se doucher, les chambres sont très froides la nuit. Ma sœur Lonar est enrhumée. On n'a pas assez de draps à la maison.
Les traits de mon visage se crispent, il est dix sept heure trente. Le technicien quitte son travail à seize heure pile. Il a fallu deux jours pour décrocher ce rendez-vous. Notre homme est tellement sollicité.
En fouillant mon téléphone je tombe sur un message envoyé à dix sept heure trente :
Monsieur, est-ce que vous confirmez votre rendez vous ?
Mes devoirs familiaux ont été laissés pour compte. Je m'en veux. Être autant absorbé par mes engagements estudiantins n'est pas non plus une raison valable. Ni mes caprices d'ailleurs. J'ai honte, tellement honte.
Darla vit dans le confort avec ses enfants, pas de chauffage en panne ou de réfrigérateur déglingué. Un lourd sentiment de culpabilité m'envahit soudain.
Devant la porte de l'ascenseur, elle remarque mon air crispé :
- ça va ?
- Oui, oui..
Alors que rien ne va du tout ! Deux semaines et je n'ai toujours pas réglé cette affaire de chauffage !
Rempli de remords, je perds le goût des choses. La vue extraordinaire en perspective n'a aucun effet sur moi. La faculté est désertée, éclairée par une lumière jaunâtre. Sous un ciel étoilé, je sens l'odeur de jasmins et de plantes nocturnes.
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Miss Darla
Lãng mạnIram Al Andaloussi, issu d'une famille de paysans, remporte un prix pour sa thèse en sociologie, une réussite qui lui ouvre les portes de la faculté de Washington, un rêve enfin exaucé. Privilège accordé, on l'intègre à Miss Darla pour passer son st...