Chapitre 68

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Ma Dudu,
Je t'aime. J'aime tes yeux, tes cheveux, ton sourire, ta voix, ta peau.
Et j'aime tout autant ta mère.
Je vous aime tellement fort, si tu savais. Mais j'ai aussi tout le temps peur qu'il vous arrive quelque chose.
Tu te souviens de Bestiole ? Un petit chiot que je vous ai offert à un Noël, quand tu étais encore tout petite. Pour moi, ce Noël, c'était il y a deux mois. Vous étiez tellement heureuses d'avoir ce petit animal à la maison ! Eh bien, tu sais, en réalité, ce que je voulais c'est que Bestiole devienne un bon chien de garde pour vous.
Il faut avouer que c'est un échec total, car il ne semble assimiler aucun ordre. Et avec un peu de malchance, il restera borné ainsi jusqu'à la fin de ses jours.
Mais il vous rend heureuse. Alors c'est parfait.
Je veux que vous soyez heureuse. Je veux que jamais ta mère ne regrette d'avoir accepté de faire partie de ma vie. Je veux être le meilleur père pour toi, et que tu ne gardes que de bons souvenirs.
Parce que si vous êtes heureuses, je serai heureux. Ça marche comme ça, maintenant. Ça a toujours marché comme ça, en fait. Je ne pouvais pas être heureux sans Chrysis, et maintenant sans toi, Dudu.
C'est ce que font les Sonhador, après tout : ils se rendent heureux.

Vasco sourit doucement. Cette lettre-ci était douce, si douce que ses yeux le piquaient légèrement. Il aimait bien ces lettres douces.

Les autres, par contre...

Il les haïssait. Enfin, non, ce n'était pas les lettres qu'il haïssait mais le Vasco de cette époque qui les avait écrites.

Il en avait des dizaines, dans ce foutu classeurs. Des dizaines qui décrivaient sa haine, sa rancoeur, sa tristesse, sa rage. Des dizaines qu'il aurait préféré ne jamais écrire, ne jamais penser.

Il fallait qu'il les brûle. Il fallait absolument qu'il la brûle pour détruire toute trace de ce passage de son âme en enfer.

Au même instant, quelqu'un avait toqué à la porte de sa chambre. Il sursauta, et fourra le bout de papier à la va vite dans le classeur, qu'il referma brusquement, avant de lâcher un « entrez ».

Il s'attendait à voir surgir Sasha, mais c'est Chrysis qui apparut dans l'entrebâillement de la porte. Il sourit à sa vue, bien que surpris, et s'avança vers elle :

— Bonjour.

— Bonjour, As. Tu vas bien ?

La jeune femme lisait les marques de la tristesse sur le visage de son petit-ami, ce qui l'inquiétait légèrement.

— Ça va... J'ai fini, je vais prendre une douche.

— Je t'attends ici alors.

— Merci. Je me dépêche.

Et il s'était éclipsé de la pièce, une tenue de rechange sous le bras. La jolie blonde se laissa tomber sur la chaise, à côté du bureau. Elle sortait déjà son téléphone portable de sa poche pour s'occuper, quand son regard fut attiré par l'énorme classeur jaune posé devant ses yeux. Vasco prenait tous ses cours sur ordinateur, et ce n'était pourtant pas la première fois qu'elle le voyait ici. Saisie par la curiosité, la jeune princesse l'ouvrit presque machinalement.

C'était bien l'écriture de Vasco.

Elle fronça les sourcils et se pencha vers les pages griffonnées, chacune soigneusement rangée dans une feuille transparente.

Mon amour,

Elle sourit en lisant ces premiers mots, bien que déstabilisée : Vasco lui écrivait des lettres, et ne lui en parlait même pas.

Je te hais.

Son sourire disparut instantanément face aux mots suivant.

Face au reste de cette lettre.

Princesse Dulce a deux couronnes Où les histoires vivent. Découvrez maintenant