Le lendemain, il me fallut un certain temps pour comprendre que l'odeur qui pénétrait mes narines n'était pas celle de ma chambre, mais celle d'Ivanie. La peinture fraiche couleur crème émettait encore, même après deux mois, une odeur métallique et désagréable qui m'agrippait la gorge.
Je passai la tête par-dessus la couette et attrapai mon téléphone qui venait de signaler une notification. Il s'agissait de Victor, qui, comme à son habitude, proposait sur notre groupe WhatsApp de sortir. Sans offrir une réponse, je reposai le téléphone et tentai de me remémorer les détails de notre nuit. Il n'y avait rien eu de spécial. Nous avions parlé des heures durant, et puis, c'était tout.
Soudain, je pris conscience de l'assèchement de ma bouche. J'espérais trouver une bouteille à proximité à l'aide du flash de mon téléphone, mais en vain. Il me fallait me résoudre à descendre, bien que je n'aie aucune envie de croiser l'un de ses parents. Tôt ou tard, parce qu'il n'y avait jamais d'exception, son père allait me raconter de nouveau des anecdotes historiques sur sa bâtisse.
Et, puis, tout juste avant d'éteindre le flash, je le vis. Là. Accroché à un de ces arbres à bijoux posé sur la cheminée. Le pendentif qu'elle avait trouvé. Je le contemplai longuement.
Très longuement.
J'aurais bien aimé que cela tombe sur moi. Trouver un bijou coûteux. Mais, cela n'arrivait qu'à ceux qui n'en avaient pas besoin.
Sur cette pensée, je me levai, et, après avoir retrouvé la couette chaude et humidifié ma gorge avec ma salive, j'enfouis au fin fond de mon cerveau ce que je venais de faire et laissai libre cours à mes pensées. Parmi lesquelles, le fait que je m'étais retenu d'envoyer un message à Ezra durant la soirée.
Ce serait mentir d'affirmer que je ne ressentais pas en ce moment même de la déception et même de la colère de ne voir aucun message de lui. Il ne semblait penser à moi autant que je pensais à lui, mais quoi de plus normal, finalement. Je ne passais pas non plus mon temps à penser à Victor ou à Olympe, malgré toute l'affection sincère que je leur portais. À dire vrai, ce besoin d'attendre quelque chose de lui n'avait aucun sens, et pour l'heure, je ne comprenais rien de ce que je vivais.
Non. Rien.
Que ce soit l'affection aussi inexplicable qu'inattendue que je portais pour Ezra, ou encore, en ce qui concernait Mamie, le contre-sens de mes décisions.
Comment avais-je pu me tromper à ce point ? Pourquoi avais-je écouté Ezra ? Ou, devrais-je dire, moi-même. Parce que, voilà un fait indéniable : il s'était contenté d'aller dans mon sens, contrairement aux autres qui s'étaient alignés dans un consensus unanime. Si je les avais écoutés, j'aurais pu lui dire un dernier aurevoir. À la place de quoi, je m'étais réjouis de rester, et, pire encore, je n'en étais pas déçu, parce que j'avais vécu une soirée merveilleuse (ce qui me fit revenir à la même interrogation : pourquoi, le simple fait d'avoir invité un ami, la rendait si incroyable ?).
Pour cette raison, je n'avais pas le droit d'être triste.
— Ivanie, murmurai-je en la secouant légèrement. Ma mère veut que je rentre.
Lorsque je les rejoignis cet après-midi-là, il n'y était pas. Pourtant, Vick avait envoyé sur notre groupe commun. Était-il occupé ? N'avait-il pas envie de venir ? Je préférais la première option puisqu'elle aurait expliqué pourquoi il ne m'envoyait aucun message. Quoi qu'il en soit, personne ne sembla s'interroger de son absence, révélant une nouvelle fois que les autres ne l'appréciaient pas autant. Par ailleurs, au détour d'une discussion, Léandro le qualifia une nouvelle fois de « mec pas drôle », à la suite de quoi je me résignai à ne pas prendre sa défense. Parce qu'il n'y avait rien de très méchant à cela, et que c'était un peu vrai, au fond. Mais, ce n'était pas quelque chose qui me manquait. Des personnes drôles, qui vouaient leur temps libre à maintenir la bonne humeur du groupe, il y en avait plein. A contrario, des gens avec la tête sur les épaules, un peu moins.
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Ezra et Gabriel - TOME 1 (BxB)
Teen FictionGabriel a tout pour être heureux : il est populaire, a un fidèle groupe d'amis, sans oublier sa petite amie Ivanie. Pourtant, ce bonheur manifeste, ce garçon de seize ans peine à l'atteindre : il déteste la ville où il habite et se rendre au lycée e...