35. Ma propre sauveuse

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Sam avait raison l'autre soir. Je peux refaire mon triple axel pour le spectacle de Noël. Et je compte bien le faire. Je n'ai jamais renoncé dans ma carrière. Ou bien un peu trop vite, peut-être. Mais je veux me battre comme je l'ai toujours fait, me surpasser comme à chaque fois. Je vais le faire. Et pour ça, je dois éteindre mes pensées intrusives. Ce qui s'annonce plus compliqué que prévu.

Chaque fois que je chute, des souvenirs de mon enfance me reviennent et défilent devant mes yeux. Je revois mon père m'attraper par le bras pour me relever et m'obliger à me tenir droite avant de me gifler ou pire. Je l'entends m'insulter d'idiote, d'incapable. Quand je tombe, je me dépêche de me relever, de peur qu'il débarque de nulle part. Mais à mon plus grand soulagement, il n'y a que Sam qui m'observe.

Le spectacle est ce soir et je suis toujours bloquée. À ce stade, je pense que je devrais juste abandonner et me rabattre sur autre chose mais je veux me prouver que je peux y arriver, passer enfin à autre chose. J'ai toujours eu tendance à penser que le patinage artistique est un sport d'ego. La fierté et la frustration flirte toujours ensemble sur la glace.

Je suis frustrée de ne toujours pas avoir réussi à poser ce saut, mais la fierté de le réussir comme la première fois n'est pas très loin. Elle fait encore partie de moi.

Lorsque je chute pour la cinquantième fois ce matin, je m'attarde un peu plus longtemps sur glace. Je ferme les yeux et profite de la surface gelée pour soulager ma hanche droite endolorie. Je ne sais pas ce qui bloque. Sans doute la réception. J'arrive à prendre mon impulsion et effectuer mes rotations mais lorsque je dois me réceptionner, je panique. Les souvenirs de mon accident me reviennent et la peur me crispe.

— On va faire une pause, Liv'.

Je ne me fais pas prier. Peut-être qu'en reprenant des forces, j'y arriverais mieux. En tout cas, je l'espère. Je veux y arriver. Sam m'aide à me relever pour la énième fois et me sourit avant de déposer un baiser à la commissure de mes lèvres.

— Tu t'en sors bien ce matin, je suis fier de toi.

— Mais j'ai toujours pas fait le moindre saut et le spectacle est ce soir.

— Et ? Je suis quand même fier de toi Liv'. T'avais mille raisons d'abandonner, mais t'en as fait mille raison de continuer. Pour ça je suis fier de toi.

Il m'embrasse directement sur les lèvres cette fois. J'approfondis le baiser et sens son sourire contre ma bouche.

Nous sortons du complexe, mon bras autour de sa taille. Notre relation a pris un virage serré mais pour autant je ne sais pas ce qu'on est. Il n'est pas du genre relation sérieuse. Du moins je l'ai connu comme ça alors je préfère ne pas m'enflammer. Nous marchons à peine quelque mètres lorsqu'on m'interpelle.

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