Chapitre 21

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Candice

   Je me réveille avec la boule au ventre. Mes angoisses ont repris le dessus. Evan se fait opérer demain et il entre à l'hôpital dans la soirée. Il m'a demandé de l'accompagner sans pour autant écarter Charly et sa mère. Il accepte enfin le soutien de son entourage. C'est un énorme pas pour lui. Je suis heureuse qu'il soit dans cet état d'esprit. C'est plus facile de quitter les gens quand ils sont plus heureux. J'essaie de m'en convaincre. Malheureusement pour moi, le dossier médical d'Evan a été d'une grande utilité à mon cher mari. François a réussi à mettre la main sur mon numéro de téléphone et m'envoie des messages tantôt romantiques comme à nos débuts, tantôt remplis de haine quand je ne réponds pas assez vite. Je sais qu'il n'a pas changé mais je garde un espoir malgré tout. Il m'effraie toujours autant mais en le revoyant je me suis rendu compte que tout cet amour toxique que je ressentais pour lui avait disparu. C'est dingue, d'avoir autant aimé son bourreau. Je m'empêche de penser qu'Evan est l'une des raisons de ce changement. J'espère que la vie qui m'attend à Paris sera meilleure qu'avant même si je suis persuadé du contraire. Je me décide à sortir du lit, perdue entre espoir et détresse.

   J'arrive chez Evan. Il est déjà en train de préparer ses affaires. L'odeur boisée de son parfum me parvient et je ne peux m'empêcher de la savourer une dernière fois. Evan me salue brièvement. Il n'est pas bavard quand il est stressé et je le respecte. Je dois avouer que ça m'arrange, je n'ai pas le coeur à discuter. Un étau me comprime le thorax. Je sens un vent de nostalgie s'abattre sur moi. Je suis les gestes d'Evan et observe ses mains, les mêmes qui m'ont touchés avec tant de tendresse il y a peu de temps. Je n'oublierais jamais ce moment même si je le voulais. C'était si doux et si pur. J'ai redécouvert une  ancienne facette de moi que François avait fait voler en éclat. J'avais oublié que faire l'amour pouvait être doux et que mon plaisir pouvait compter. Evan m'indique qu'il a terminé sa valise. Je la fais rouler jusqu'à l'entrée où je la dépose. Je regarde le comptoir de la cuisine et me souviens des nombreux cafés que j'y ai pris. Je me souviens également des nombreuses provocations d'Evan sur mon physique. Je ne comprends que maintenant. Ses attaques n'étaient que le reflet de sa propre détresse et de l'image qu'il avait de lui-même. Je lève la tête et vois au loin le salon et le fameux canapé où on a passé tant de soirées à débattre sur les films qu'il me faisait découvrir. J'en ai adoré chaque minute.

   Plongée dans mes pensées les plus intimes, je n'avais pas remarqué qu'Evan m'observait. Mes yeux se plongent dans les siens. Le silence est maître des lieux. Je ressens sa peur comme il doit ressentir la mienne. Le temps est suspendu. Je finis par rompre l'instant, tant il me fait mal. Je ne reverrais plus jamais tout ça.  J'ai établi une stratégie simple et irrévocable. Evan doit se faire opérer quoiqu'il en coûte. J'ai déjà appelé sa mère pour lui dire que je ne pourrai pas assurer ses soins post op. Je l'ai informé que je devais me rendre à Paris pour un temps indéterminé car ma mère n'allait pas bien. Personne ne remet en question ce genre d'excuse. Elle a compris et m'a même encouragé à partir au plus tôt. Evan sera mis au courant à son réveil. Lina le saura au dernier moment. J'ai beaucoup trop peur qu'elle perce mon secret et qu'elle mette mon plan en péril.

J'accompagne Evan à l'hôpital, sa mère et Charly nous attendent sur place. Nous arrivons devant les portes automatiques, Charly fait une accolade réconfortante à Evan. Sa mère lui sourit et l'embrasse tendrement sur la joue. Nous entrons et patientons. Quelques minutes plus tard, François apparaît tout sourire. Il salue chaleureusement tout le monde. Il s'attarde un instant sur moi pour me fixer en me faisant comprendre qu'il reste le maître du jeu. Je baisse instantanément mon regard et me déteste. Il nous accompagne jusqu'au service  où Evan va séjourner. Il refait un topo de l'opération et se retire. Une infirmière nous emmène dans une chambre. Evan se tient au milieu de la petite chambre, proche du lit. Je reste au chambranle de la porte. J'attends un instant et observe la scène qui se déroule devant mes yeux. J'y vois tant d'amour. Comme à son habitude Charly plaisante pour dédramatiser la situation. La mère d'Evan le couvre avec tout son amour par sa seule présence. Je m'apprête à partir en m'approchant d'Evan pour le saluer. Il m'attrape par le poignet et me fait signe d'attendre. Charly et sa mère comprennent instantanément  et nous laissent.

La peur ne se fuit pas ... {terminée}Où les histoires vivent. Découvrez maintenant