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Enzo, installé à mon côté, on joue avec nos bagues de mariage, de belles alliances en or blanc, un petit diamant sur son milieu, à l'autre main notre bague de relation, il se blottit contre mon cou, m'embrasse, puis se lasse.

Il s'assoit et part dans la salle de bain où nous ne nous parlons pas, je préfère faire à manger pour l'instant, on ne se regarde pas et nos assiettes sont vite finie.

Je m'installe dans le fauteuil devant l'écran de mon ordinateur, je regarde les images défiler, ça me claque dans la poitrine, je ferme l'écran, je pars seulement me coucher, dos à Enzo, qui fait de même de son côté.

Réveillez dans la nuit par un des nombreux cauchemars que je fais régulièrement ces derniers temps, je vois Bleu se faire passer les menottes, Bleu emmener comme un chien, Bleu qui nous passe à côté sans un regard, Bleu qui n'était pas là quand on est rentré, ce qui réveille Enzo qui me tient la main, c'est un geste désespéré, quand il la serre fortement et le mien l'est aussi quand je le laisse dans ce lit dans lequel je me réfugie sous l'eau, pour cacher chaque larme, qui n'a plus le droit de couler.

S'il pense que je ne l'entends pas, chaque nuit, essayer de cacher sa douleur, ses cauchemars, même si je garde les yeux fermés, c'est juste pour ne pas me retrouver à être dans cet état, il faut que quelqu'un tiennent, et quand ce n'est pas lui, c'est moi.

On ne peut pas lâcher en même temps.

C'est le quinzième appel en absence, le quinzième que je regarde défiler sur mon téléphone, que je vois '' maman '', s'afficher sur l'écran, Rafael sort nu, je n'ai pas le temps de fermer les yeux pour faire semblant, il s'avance à pas de velours où il m'embrasse dans un désespoir sans nom qui nous tue l'un l'autre, nous réconforte, c'est un besoin, c'est vital, ce n'est pas humain de se sentir aussi mal alors qu'on est ensemble.

….

On a mis dans le coffre, le peu d'affaires qu'on a, Enzo a pris la voiture, on se tient la main chaque fois qu'il n'a pas besoin de passer les vitesses, nous sommes heureux, tristes, perdus, mais on sait où nous allons, nous n'avons qu'une seule destination.

L'autoroute est bien déserte, au bout de quatre heures, nous arrivons à notre destination, nous sommes stressés, on ne sait pas si nous faisons le bon choix, mais si on n'essaie pas, on n'aura jamais notre réponse.
Et je ne pourrai pas continuer comme ça les années suivantes, Enzo non plus, car nous ne pouvons pas vivre ensemble juste à deux.

Il y a ce manque, ce vide qui se crée de plus en plus chaque jour qui fait qu'on arrive parfois à s'engueuler jusqu'à ce que l'un de nous claque la porte pour revenir ensuite.
Et sur cet ascenseur, j'appuie sur le bouton trois, et la montée se fait d'une longueur horripilante.
La musique est vraiment forte, on l'entend de derrière la porte, le plus surprenant, c'est qu'on entend chanter.
On se regarde avec Enzo, les mains tremblantes. Même accroché l'un à l'autre, on n'arrive pas à se rassurer.

Qui est là ? Qui est cette personne, pourquoi est-il ici ? Vit-il encore là ?

Enzo, soufflant, les larmes aux yeux, retape contre la porte qui ne s'ouvre pas, j'appuie sur cette sonnette de malheur, celle qui m'a fait faire des tonnes de cauchemars, qui continue parfois de sonner, même éveiller, celle qui m'a réellement traumatisé.

- Quoi ?

Il y a ce moment de blanc, ce moment d'incompréhension, ce moment où ça tourne dans la tête, ou les larmes coulent avant de comprendre, douce, belle, merveilleuse larmes.

Nous sommes restés sur ce pas-de-porte, il ne nous a pas fait entrer, il a refermé la porte, les yeux écarquillés, ses lèvres se sont mises à trembler, son corps à changer, et tous ses détails qui nous ont manqués.

Sans parler, On se voit.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant