Chapitre 17

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Amélie fut admise à participer à la deuxième phase de sélection qui s'était déroulée le même vendredi dans la soirée, et finalement fut désignée comme représentant Assas au concours de plaidoirie cette année-là. J'étais très fière d'elle et passai mon week-end à la féliciter. Nous fêtâmes ça plusieurs fois, nous allâmes au restaurant et au cinéma et finalement, nous passâmes le dimanche après-midi dans mon studio à regarder des séries. Tout d'un coup, sans que je m'attende à une confession de cette ampleur, elle me dit :

_ Robin m'a violée. A la première soirée, tu te souviens ? Celle où j'ai dit que j'étais restée et qu'on avait couché ensemble. En fait, je m'étais endormie dans son lit à cause de la fatigue et de l'alcool. Quand tout le monde est parti, il est venu me rejoindre et m'a réveillée. Puis il m'a dit qu'il avait très envie de moi. J'ai eu beau lui dire que je ne voulais pas, je lui ai répété pleins de fois que je ne voulais pas, mais il m'a enlevé mon pantalon et il m'a baisée dans son lit. J'étais trop faible, je n'ai pas réussi à le repousser.

_ Ce n'est pas de ta faute, enfin !

Amélie haussa les épaules.

_ Peut-être que si, un peu, finalement. Je ne sais pas. J'étais dans son lit après tout. Je n'avais qu'à pas être là.

Je la serrai dans mes bras.

_ Pourquoi tu l'as revu depuis ?

_ Je ne sais pas. C'est fait maintenant, et il est gentil quand même.

J'étais abasourdie. Je décidai de lui raconter ce qu'il s'était passé après la soirée, quand j'étais revenue chez moi et que les deux étudiants alcooliques m'étaient tombés dessus, puis que Robin était intervenu. Je racontais tout en détail, en ne taisant que le nom de Léopold que j'imageais en un passant qui était par chance passé par là. Amélie m'écouta attentivement.

_ Quel connard.

_ Tu sais, il faudrait qu'on porte plainte.

_ Non, impossible. Mes parents seraient dévastés.

_ Ils n'ont pas besoin de savoir : tu es majeure et tu habites à des centaines de kilomètres d'eux.

_ Non, je ne veux pas. Ce sera insupportable à vivre à l'université, je vais être la salope de service.

_ Mais pas du tout ! Tu es la victime dans cette histoire !

Mais son opinion était faite et je ne parvins pas à la faire changer d'avis.

Un peu plus tard, elle me demanda ce qu'il en était de ma vie sentimentales. Encore une fois je décidai de me confier à elle, tout en taisant le nom de Léopold.

_ Un homme marié ? Dis donc tu t'embarques dans une grosse galère, ma fille. A ta place je laisserais tomber.

_ Je sais bien ... Mais il m'excite, je n'y peux rien. Il n'a qu'à me regarder pour que je sois séduite. Je ne peux pas lui résister.

_ Si ce n'est que sexuel après tout, ça va s'estomper une fois que vous aurez couché ensemble.

Je ne commentais pas cette conclusion mais me demandai si c'était vraiment ce que j'avais envie : de ne plus le désirer.

Le lundi suivant en fin de journée, Amélie alla chercher au secrétariat de la faculté des compléments d'information concernant le concours de plaidoirie. Cela concernait notamment l'agenda des duels successifs, des consignes générales de participation, une fiche d'information à remplir et à retourner. Enfin, un petit papier indiquait que la prochaine étape se déroulait à Nancy la dernière semaine d'octobre et qu'Amélie avait le droit d'inviter un accompagnant en plus du professeur qu'elle choisirait pour l'encadrer. Elle me proposa immédiatement d'être son accompagnant et, bien sûr, j'imaginais le scénario parfait si elle venait à demander à Léopold de l'encadrer.

Mais elle avait une autre idée en tête. Elle admirait beaucoup notre professeur de droit des assurances, qui était de surcroît une avocate renommée, et se décida à lui demander au prochain cours. Quoiqu'un peu déçue, je la soutins dans son choix, persuadée de toute façon que Léopold n'aurait jamais pu se rendre disponible un week-end puisqu'il semblait les passer en famille.

Notre professeur de droit des assurances refusa la demande d'Amélie car elle s'était engagée pour intervenir dans un colloque aux mêmes dates, mais promit de la soutenir pour le duel suivant si elle venait à gagner le premier. Alors que je n'osais le proposer, c'est finalement Amélie qui me demanda conseil :

_ Et si je demandais au professeur de droit fiscal ?

_ Humbert ? Pourquoi pas, il est avocat après tout.

J'essayais de paraître la plus détachée possible.

_ Oui mais il est si jeune.

_ Tu as un autre nom en tête ?

_ Non, aucun.

Elle attendit le cours suivant de Léopold, soit le jeudi, et n'ayant toujours pas trouvé un autre professeur à qui demander, elle alla au bureau à la fin du cours et me demanda de l'accompagner.

Nous attendîmes que Léopold soit seul pour lui demander. Il parut d'abord agréablement surpris de me voir, mais se concentra sur ce qu'avait à lui dire Amélie. Il demanda finalement :

_ Donc ce serait les 27 et 28 octobre à Nancy ?

_ Oui, absolument.

_ Qui d'autre est convié ?

_ A part nous trois, vous voulez dire ? Tous les autres candidats je pense, et leurs accompagnateurs, soit environ soixante personnes.

_ Comment ça, nous trois ?

_ Oui, j'ai droit à un accompagnant en plus du professeur qui m'encadre et j'ai choisi Louise qui m'a bien aidée à préparer les épreuves de sélection.

Amélie ne pouvait le déceler puisqu'elle ne connaissait pas Léopold et qu'elle avait de toute façon la tête dans ses papiers à la recherche d'une information, mais il me regarda alors avec un sourire de connivence. Il conclut finalement :

_ D'accord. Il va falloir s'entraîner. Quand avez-vous les sujets ?

_ Une semaine avant, donc dans une semaine.

_ Très bien. Dès que vous les amenez, prévenez-moi sur mon adresse mail de l'université et nous organiserons des séances d'entraînement. Vous serez là aussi j'imagine ?

Léopold s'était tourné vers moi.

_ Évidemment.

Mon ton était sarcastique et je savais pertinemment qu'il l'avait saisi. Nous nous apprêtions à prendre congé quand il m'apostropha :

_ Mademoiselle Lambre ? Restez deux minutes je vous prie : j'ai à vous donner un message que votre chargé de TD m'a demandé de transmettre à la promo.

Il eût de la chance qu'Amélie ait un RER à prendre rapidement ce jour-là, parce qu'elle ne se serait pas gênée pour rester sinon. Elle prit congé en nous souhaitant une bonne soirée et je me retrouvai seule avec Léopold dans ce grand amphithéâtre.

Je m'imaginai coucher avec lui ici, sur des tables ou une des chaises, ou même sur le bureau du professeur ou contre le tableau. Oui, je voulais qu'il me prenne sur le bureau. Cela me donna des envies folles. Je me rapprochais de lui et touchais ses boutons de chemise, en entreprenant d'en déboutonner un. Il me saisit les poignets.

_ J'ai faim. On va dîner ?

Tentations parisiennesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant