Chapitre 8

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En poussant la porte de mon immeuble, je pensais voir la désormais habituelle berline noir. Elle n'était pas là. A la place, Léopold se tenait debout près d'un deux-roues, un casque sur la tête et un autre à la main.

_ J'ai cru comprendre que tu aimais les tours en scooter.

Je restais bouche bée. Nous avait-il vus, Simon et moi, la veille, alors que nous revenions de la soirée chez Robin ? Pourquoi me faire un sous-entendu concernant le scooter sinon ? Léopold lut ma décontenance mais n'y répondit que par son sourire espiègle que j'aimais tant.

Il s'assit à l'avant de l'engin, en chemise blanche et en jean bleu marine. J'eus un peu plus de mal à m'installer : ma robe remontait beaucoup sur mes cuisses, de sorte qu'elle ne cachait finalement que ma culotte. Je me secouais un peu et me dis qu'il me fallait choisir entre l'aventure jambes dénudées et la soirée seule dans son lit avec un pyjama en pilou. De toute façon, pensai-je, les parisiens ont vu bien pire que les jambes nues d'une fille à l'arrière d'un scooter. J'enlaçai le torse de Léopold et profitai de l'excuse pour coller pour buste au sien. Il sentait bon l'orange amère.

J'avais aimé le scooter dans Paris avec Simon : j'aimais encore plus quand c'était Léopold qui conduisait. Il allait plus vite, il freinait plus fort, il virait bas. J'avais l'impression que les passants et les automobilistes se retournaient sur notre passage et je pensais que l'on devait renvoyer l'image d'un couple glamour. Cela me plut. Le trajet ne dura pas longtemps. Il s'arrêta sur la chaussée d'une rue du huitième arrondissement et, alors que l'enlevai mon casque en essayant de discipliner mes cheveux, je le vis tendre le sien et les clefs du scooter au chauffeur de la voiture qui nous avait conduits en début de semaine. Je lui tendis aussi le mien et Léopold s'empara de ma main.

La rue était belle et sentait le beau quartier : les façades étaient claires et propres, elles faisaient honneur à l'architecture haussmannienne dans laquelle elles avaient été construites. Des parterres de fleurs jonchaient régulièrement la rue et séparaient des emplacements de stationnement qui accueillaient des grosses voitures de luxe bien entretenues. J'aurais pu ne pas me sentir à mon aise, mais j'avais au contraire l'impression d'être dans un rêve. Tout était merveilleux.

Soudain, Léopold s'arrêta et me demanda, comme s'il doutait vraiment de ma réponse :

_ On va chez moi ?

J'aurais voulu lui offrir une belle répartie, une réponse qui le déstabiliserait et l'impressionnerait, mais j'étais encore enivrée de son parfum dont j'avais respiré tous les effluves durant le trajet et je ne fus capable que d'un hochement de tête. Il sortit un trousseau de clefs de sa poche et s'avança vers une porte cochère qu'il poussa après avoir entré un code. Léopold évita l'ascenseur et m'emmena dans les escaliers où un tapis couleur bordeaux tendu par des barres dorées aux marches dessinait le passage.

Nous nous arrêtâmes au deuxième étage, à la seule porte du palier. A peine franchie et refermée, alors que Léopold ne me regardait toujours pas, je me positionnai face à lui et le giflai. Il fut surpris.

_ C'est pour m'avoir ignorée toute la semaine.

Je n'avais pas pu résister, je voulais provoquer une réaction. Je voulais que les choses commencent. S'il n'aimait pas qu'on lui donne des ordres, il n'allait probablement pas aimer cette gifle ? C'était exactement ce que j'espérais. Je voulais qu'il me retourne encore contre un mur pour me faire payer ma gifle. Au lieu de ça, il me demanda si j'avais soif et sans attendre ma réponse, m'invita dans la cuisine.

L'appartement était immense, peut-être encore plus grand que la maison dont mes parents étaient propriétaires dans le Nord. Les plafonds, hauts, étaient tous entourés de moulures, les fenêtres étaient d'époque, le parquet était chevron. Un appartement parisien typique, luxueux, démesuré. Je décidai d'enlever mes chaussures par peur que mes talons aiguilles laissent des rayures. Laissant Léopold seul dans la cuisine, je fis un tour dans l'appartement. Il comportait trois chambres et un bureau, une salle de bain en marbre avec une grande baignoire en coin, une salle à manger et un salon immense avec plus de fauteuils que je n'en avais encore jamais vus réunis. Léopold vint me chercher alors que je contemplais la vue sur Paris et me conduit dans sa chambre.

Elle était sobrement décorée, avec un lit en bois blanc assez grand, une commode assortie et un tapis en laine à motifs géométriques. Les murs étaient blancs et nus, sauf en ce qui concernait le mur qui faisait face au lit et sur lequel était accroché un immense écran de télévision.

_ Qu'est-ce que tu veux regarder ?

_ Pardon ?

_ Comme film, je veux dire.

Je restai perplexe, le regardant parcourir les pochettes de DVD dans le premier tiroir de sa commode. Il n'était pas sérieux ! Il m'avait amenée chez lui pour regarder un film, vraiment ? Il se fichait de moi. La dernière fois, il me faisait jouir et là il voulait juste regarder un film. C'était grotesque.

_ Tu te fiches du moi ?

_ Quoi ? Tu préfères les séries ?

Décidée à prendre les choses en main, je m'approchais de lui, le tirais un peu par sa chemise pour me donner une attitude et déposai mes lèvres sur les siennes.

J'étais déçue de moi. J'aurais voulu rendre mon baiser sexy, mais il n'était pas assumé et était finalement très insipide. Il ne semblait pas étonné de ce que j'avais fait, de mon baiser ennuyeux, de mes lèvres timides rejoignant les siennes et s'en allant tout aussi rapidement. Il inclina la tête vers son épaule, comme par pitié pour mon échec, comme l'on fait face à un chiot qui apprend à marcher et tombe par terre la tête la première dans l'herbe.

Et puis il passa sa main dans mon dos, me plaqua contre son torse et glissa l'autre main dans mon cou. Il maintint ma tête et m'embrassa avec passion. Ses lèvres se collaient aux miennes, les épousaient, les entrouvraient, sa langue se perdait dans ma bouche, caressait la mienne, jouait avec elle. Il avait une haleine qui mêlait whisky et menthe et que je trouvais absolument délicieuse. Ses mains se déplaçaient sur mon corps et descendaient sur mes fesses, pendant que les miennes ouvraient sa chemise. Je voulais plus, je ne voulais plus que des baisers, je voulais son corps tout entier. Son baiser m'avait allumée et j'avais besoin qu'il entretienne le feu qui brûlait en moi. Il m'embrassait encore, plus hardiment, presque sauvagement. Ses dents mordaient ma lèvre, ses doigts s'enfonçaient dans mon cou. Nos langues jouaient ensemble et nos corps dansaient l'un contre l'autre. Je frottais ma cuisse entre ses jambes, jouant avec la bosse que je découvrais avec plaisir.

Je voulais plus et je commençais à m'attaquer à sa ceinture, dans le but de la desceller, pour aller plus loin, pour découvrir encore plus son corps ; mais Léopold rompit toute connexion. Il s'écarta, enleva ses mains de mon corps et m'en enferma le visage. Il planta ses yeux noirs dans les miens et prit un ton d'instituteur qui vient de faire une leçon à son élève :

_ Si tu veux m'embrasser, fais-le correctement au moins.

Il se rapprocha de la commode et en ouvrit le premier tiroir. Je pensais qu'il en sortirait des préservatifs ou je ne sais quel objet sexuel, mais il se tourna vers moi et me montra la pochette d'un DVD.

_ Celui-là ?

_ Mais bon sang, tu n'es pas sérieux !

Je m'approchais de lui et replaçais mes mains au niveau de sa ceinture. Mes projets pour cette nuit étaient clairs et je n'étais pas prête à être frustrée.

_ Je n'ai pas du tout envie de regarder un film.

J'avais chuchoté et, en descendant une main entre ses cuisses, je chuchotai encore :

_ Et je pense que toi non plus.

Finalement nous regardâmes un film. Il choisit un blockbuster américain que l'on avait déjà vu tous les deux mais qui n'était pas déplaisant. Il s'était mis en tee-shirt et pantalon de jogging et m'avait proposé un autre de ses tee-shirts pour me mettre à l'aise moi aussi. J'avais d'abord rétorqué que je dormais toujours nue et qu'il n'y avait pas de raison que j'y fasse exception mais, en me rendant compte que bien que m'ayant touchée en bas il ne m'avait jamais vue nue, j'avais été soudain très gênée et j'avais finalement accepté le tee-shirt. Mon petit manège l'avait bien fait rire.

Assagie, je regardai le film délicieusement lovée contre lui et nous finîmes par nous endormir vers deux heures du matin.

Tentations parisiennesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant