ALL UNDEAD | Caput Mortum [Terminé]

1 | La campagne

Rachel regardait la campagne défiler derrière la vitre de la voiture. Elle jeta un coup d'œil craintif à Tokubo qui conduisait, l'air concentré. Il ne restait plus grand chose de l'intimidant yakuza d'autrefois. Il semblait au bord de l'implosion émotionnelle. Le regard larmoyant, il se mâchonnait la lèvre inférieure. Comme Nazumi quand un problème lui paraissait insoluble... Un trait de caractère qu'elle partageait avec son frère !

—Où est Noritaka-sama ? Tu l'as tué ? demanda-t-elle tout d'un coup en espérant que Tokubo ne l'affirme pas.

Elle ne voulait pas la mort de Noritaka ni de personne. Hormis celle de Lloyd. Tokubo lui adressa un regard indéchirable. Elle se tassa dans son fauteuil passager et réprima un sanglot. Pas Noritaka.

—Pourquoi veux-tu le savoir ? Tu as dit qu'il t'a enlevé lors d'une rafle dans une pharmacie de Tanakamachi. Son sort t'importe peu.

Il négocia un tournant un peu raide.

—Je l'ai assommé avec une batte de baseball, lâcha-t-il tout d'un coup.

—Tu l'as laissé pour mort au milieu d'une horde de ryūketsu ? Imagine qu'il ait eu un traumatisme crânien ou pire un hématome sous-durale.

—T'inquiète. Les gars qui prennent le titre honorifique de -sama ont la tête dure. J'en ai assommé plus d'un de son acabit.

—Ce n'est pas drôle.

—Arrête de m'emmerder. Tu ne connais pas ce type.

—Ce n'était pas une raison pour l'assommer.

Tokubo freina brusquement, Rachel résista à la force de freinage en prenant appui sur le tableau de bord.

—En fait, tu ne sais pas ce que tu veux. Soit tu restes avec lui et, dans ce cas-là, je te laisse sur le bord de la route. Soit nous continuons à rouler. Mais prends une décision tout de suite.

Il ricana d'un ton moqueur.

—S'il a succombé à ton charme à la française, il va vite déchanter quand il découvrira ton caractère à la con.

Rachel éprouva un mouvement d'humeur inhabituel et leva la main pour le gifler. Mais Tokubo attrapa sa main en plein vol puis la repoussa contre la portière.

—Tu as toujours la langue aussi bien pendue.

—Tu te comportes toujours comme le sale con que tu as toujours été.

La mine boudeuse, Tokubo passa la première et accéléra subitement, la voiture partit en avant. La route défila à toute allure, slalomant entre les débris qu'avaient laissé le passage du dernier typhon.

—Ralentis, bordel.

—Qu'y a-t-il entre ce type et toi ? bougonna-t-il.

—Que dalle. Arrête cette voiture. Tu vas sortir de la route, abrutie de japonais.