C'est une manifestation.
À en croire les drapeaux multicolores et les costumes extravagants des manifestants, il s'agit d'une Pride. Il y a encore plus de monde que je croyais. Des milliers de gens vêtus de toutes les couleurs existantes défilent en brandissant des drapeaux, des panneaux aux messages drôles comme « dûr.e.s à queer ». Tous ces gens parlent, chantent des airs engagés:
- Y en a assez ! Assez ! Assez d'cette société, qui ne respecte pas les trans, les queers et les pédés!
Toutes les générations se confondent : il y a bien sûr une majorité de gens dans la vingtaine mais à mon grand étonnement, je retrouve des retraités et même des enfants aux visages couverts de peintures colorées.
Il y a même une énorme enceinte placée dans un petit chariot qui diffuse dans toute la ville des chansons soutenant la cause LGBT:
I kissed a girl and I like it, the taste of her cherry chapstick, I kissed a girl, just to try it...
Gabriel et moi restons figés plusieurs minutes devant cette danse où se meuvent toutes les couleurs de l'arc-en-ciel dans une joie festive. Nous sourions béatement devant cette fête où tout semble permis. J'adore les Prides. Je ne me revendique pas spécialement LGBTQ+ mais je ne pense pas non plus être cent pour cent hétéro cisgenre. A vrai dire, je m'en moque. Je suis moi, et ne souhaite rentrer dans aucune case. Mais participer à une manifestation de ce genre est magique. C'est une vraie fête où j'ai l'impression de braver les interdits juste en barrant les routes et de faire des doigts d'honneur aux homophobes. Ce n'est clairement pas grand-chose mais pour quelqu'un comme moi qui n'ose pas souvent sortir des sentiers battus, c'est une véritable libération. Bref, je suis hypnotisée par ce spectacle de couleurs et d'allégresse.
Soudain, au milieu de cette marée de drapeaux irisés, un cri se détache des applaudissements et des chants :
- Ohé ! Swan ! Gabriel ! Ého !
Après quelques instants à chercher d'où provient cet appel dans la foule, nous en distinguons enfin l'origine : c'est Coline et ses amies qui exécutent de grands mouvements des bras pour attirer notre attention. Timidement, nous levons la main pour la saluer discrètement. D'un geste du bras, elle nous hurle de sa grande voix :
- Allez, venez ! Rejoignez-nous !
Gabriel et moi nous regardons, hésitons mais, voyant que Coline insiste, nous commençons à nous mêler à la foule. Nous bousculons les autres manifestants mais ils restent extrêmement gentils. Je ne compte pas le nombre de tapes amicales que je reçois sur les épaules. Peu à peu, le sourire que forment mes lèvres s'étend. Ici, la joie est si intense qu'elle en devient contagieuse. Tout le monde semble heureux. Mes rires finissent par s'ajouter à tous ceux des autres participants. Des paillettes et des confettis arc-en-ciel tombent sur mes joues pour illuminer toujours plus mon visage. J'en ai totalement oublié la présence de Gabriel.
J'arrive finalement à côté de Coline, tout sourire. Au moment où elle me voit arriver, elle écarquille les yeux et ouvre la bouche en grand. Elle court et finit par se jeter dans mes bras. Je suis surprise par sa réaction mais étant très tactile, je savoure notre câlin comme si c'était une amie. Puis, elle hurle à cause du bruit:
- C'est vraiment cool que tu sois venue!
- Oui! C'est vrai que cette Pride est super, je réponds. Gabriel arrive, il ne doit pas être loin derrière.
J'ai l'impression qu'elle n'a pas entendu ma réponse. Elle me prend par la main et m'emmène dans son groupe d'amies. Je me retourne et constate que j'ai perdu Gabriel de vue. Ce n'est pas grave, je l'appellerai tout à l'heure pour le retrouver. J'arrive donc au milieu d'un groupe de filles aux visages couverts de paillettes. Sur leurs vêtements bariolés sont collés des autocollants avec des messages tel que "la transphobie est nuisible pour la société". Leur maquillage est extravagant. Certaines ont les lèvres roses, jaunes, vertes, orange. Elles se sont amusées à représenter sur leurs yeux différents drapeaux LGBTQ+ avec du far à paupières.
VOUS LISEZ
La vie rêvée
ParanormalToutes les nuits depuis quelques mois, Swan fait le même rêve, encore et encore. Et tous les matins, elle se réveille avec la même déception et les mêmes questions. Mais cela, elle n'en a pas grand-chose à faire. Du moins, jusqu'au jour où... je n'...