JOUR 5
Salvator se réveilla en sursaut. Son cœur galopait, poussé par un danger imminent. Il ne comprit pas tout de suite. Un second cri retentit. Bref. Guttural. Court mais intense ; si régulier que Salvator finît par se lever et passer la tête dans le couloir.
— C'est quoi ce boxon ?
Florent s'aventura jusqu'au seuil de sa chambre, ses doigts fins accrochés au chambranle.
— Qui gueule comme une truie là ?
— Ta mère ! répondit Salvator.
Florent se tourna vers lui. Dans l'obscurité, son visage demeurait presque lisse malgré les sombres émotions qui baignaient chacun de ses plis.
— Ta queue est si vieille pour tremper dans des confitures pourries ?
Le rire de Salvator combla le couloir. Il fut recouvert par un nouveau hurlement. Leurs regards convergèrent alors vers une porte close.
— Ferme ta gueule ! cria Florent.
Le cri amplifia. Mickaël parut, les yeux gonflés, le t-shirt froissé.
— Pourquoi vous gueulez comme ça ?
— C'est l'autre là. Il crie comme un cochon qu'on égorge, râla Salvator.
— T'as déjà entendu des cochons égorgés, toi ?
— J'en ai entendu plusieurs crier, mais ils étaient pas en train de mourir.
Salvator regretta aussitôt cette répartie douteuse voyant que Mickaël ne riait pas. Il le dévisageait néanmoins, clignant des yeux, si bien que Salvator remercia Corentin de pousser un énième hurlement qui les libéra de ce silence.
— Bon maintenant FERME LA ! balança-t-il.
Une réplique n'ayant que pour but de détourner l'attention de lui-même. Le regard de Mickaël vrilla.
— Arrêtez de lui gueuler dessus. Vous êtes nazes. C'est pas sa faute.
— Mais il nous empêche de dormir !
Une fois de plus, Salvator regretta d'avoir ouvert la bouche quand Mickaël le jaugea, l'air maussade.
— Parce que lui il dort bien là ?
Simplement muni de son t-shirt et d'un caleçon, il approcha de la chambre voisine de la sienne.
— Eh ! intervint Salvator. Tu vas pas... C'est interdit de rentrer chez les autres.
— J'en ai rien à fiche.
Sur ces mots, il s'exécuta.
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JOUR 7
Ludovic recueillit le billet de cinquante francs. Il avait le droit de sortie les week-ends et en profitait donc pour faire rentrer quelques articles en douce. Deux flasques se glissèrent derrière la ceinture de Salvator, ainsi qu'un paquet de cigarettes.
Après une semaine sans consommer, il lui tardait de s'enfermer dans sa chambre. Il avait volé le billet à un surveillant issu du milieu pénitentiaire, et le briquet à Denis.
La journée se passa vite. Il mit peu d'entrain dans sa séance de sport de l'après-midi – aucun putain d'intérêt à tourner en rond dans cette cour intérieure – ; mangea un peu – histoire de ne pas trop prendre de poids – puis se cala dans sa chambre.
Tant que le règlement était à peu près respecté, les éducateurs ne se mêlaient pas trop à eux à l'étage, trop pressés par leurs paperasses. Il avait donc le champ libre.
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La minute effacée - (MxM)
RomanceUn soir de 1994, Mickaël, jeune délinquant de la route, vole une énième voiture. Cette fois sera la bonne pour la brigade qui le prend en chasse. Très vite il est jugé, et emmené dans un centre pour délinquants. C'est là qu'ils se rencontrent. Deux...