(Veuillez vérifier que vous avez bien lu le chapître précédent car Wattpad bugue et n'a pas envoyé de notif. Ce serait dommage de le rater 👀)— Lui avez-vous expliqué ?
Carole cessa de mâchouiller son chewing-gum. Face à elle, la juge Salomé feuilletait le contenu d'une épaisse enveloppe marron. Pascal et Nadia occupaient chacun une chaise, le nez rivé vers elles comme s'ils ne faisaient office que de figurants.
— Non, madame la juge. Enfin, pas vraiment...
Salomé releva la tête. Ses pupilles vibraient d'une défiance à peine dissimulée derrière ses lunettes carrées.
— Qu'est-ce que vous voulez dire par « pas vraiment » ? Vous lui avez expliqué ou pas ?
— Je lui ai dit que je n'avais pas le temps et pas toujours le niveau pour tout corriger, alors j'ai expliqué que ce serait un professeur qui lirait.
— C'est tout ?
Carole hocha la tête. Elle se remit à mâcher, plus par anxiété que par envie. Le chewing-gum avait perdu tout goût.
— Je ne savais pas trop quoi dire. J'ai peur qu'il se débine si on lui dit tout. Et puis il y avait son copain à côté de lui...
— Salvator...
La juge continuait de survoler les écrits rendus par Mickaël. Si ce dernier avait au moins le niveau collège – il n'avait quitté l'école qu'à quatorze ans, rien d'irrattrapable – en revanche Salvator, à dix-sept ans, avoisinait le faible niveau scolaire d'un sixième. Pas plus.
— Vous avez bien fait pour Salvator. Mais Mickaël...
— Vous croyez qu'il faut lui dire ? Moi j'ai peur qu'il pense que ça soit trop et qu'il choisisse d'abandonner.
Salomé haussa un sourcil. Elle ne releva pas cette mention de peur qui lui faisait pourtant bien plaisir. L'éducatrice prenait enfin à cœur son métier, du moins, les adolescents que l'état lui confiait.
— Je ne sais pas du tout. Vous le connaissez mieux que moi, vous le voyez presque quotidiennement...
— Et vous, vous en pensez quoi ? demanda Carole, tournée vers les parents qui ne pipaient mot.
— C'est à vous que je demande un avis, la coupa Salomé.
Carole manqua d'avaler son chewing-gum. Ni Pascal ni Nadia ne semblèrent offusqués. Ce désintérêt crasse pour ce qui était en train de se jouer la laissait sans voix.
— Mais je... Je peux pas décider ça, moi.
— Vous pouvez. Je vous en donne le pouvoir. Et vous êtes la référente de Mickaël. On vous écoute.
La pointe de son stylo appuyée sur le calendrier qui lui servait de protège-bureau, Salomé la fixait.
— Sauf votre respect, votre honneur, je vois pas bien ce que vous espérez, intervint le père. Il s'est taillé du collège en 5ème ? Je vois pas pourquoi il y retournerait. Nous on a jamais réussi à le motiver.
— C'est madame la juge, pas votre honneur. Nous ne sommes pas dans une série américaine. Et sauf votre respect, monsieur, éduquer un enfant n'a rien à voir avec sa motivation. Si vous attendez de lui qu'il montre de l'entrain pour tous les apprentissages de la vie, il est normal qu'il échoue. Plus que le motiver, votre rôle de parent est de croire en lui. Voilà ce qui peut tout changer. S'il s'aperçoit que des adultes croient en lui et en ses capacités, alors la motivation il la trouvera seul.
— Mais l'école, elle est obligatoire que jusqu'à seize ans, nan ? Lui il voudra gagner sa vie, justifia la mère. Il est toujours en train de vadrouiller. Jamais il restera le cul sur une chaise pour remplir vos papiers. Il l'a jamais fait à la maison, sans quoi on le saurait.
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La minute effacée - (MxM)
RomanceUn soir de 1994, Mickaël, jeune délinquant de la route, vole une énième voiture. Cette fois sera la bonne pour la brigade qui le prend en chasse. Très vite il est jugé, et emmené dans un centre pour délinquants. C'est là qu'ils se rencontrent. Deux...