Chapitre 16 (Lucas) - Je ne me ferais pas avoir

2.2K 101 13
                                    

Lorsque j'entre dans son bureau, elle chantonne devant son armoire. Elle ne m'a pas vu.

 Aujourd'hui elle a attaché ses cheveux avec une queue de cheval, cette coiffure lui dégage le cou et je devine une tache de naissance sur la nuque. Je ne peux empêcher mon regard de descendre le long de son dos et ses hanches galbées sous la blouse blanche. Elle porte un jean slim retroussée aux chevilles et là aussi je note le détail d'un tatouage avant de sourire en voyant qu'elle a chaussé des baskets. Elle m'a écouté donc. Une tenue plus soft et moins tape à l'œil, mais tous ces changements ne la rendent pas moi sexy.

J'inspire profondément, cette fille me fait de l'effet, je suis vraiment foutu. Sentant mon membre s'érigeait dans mon pantalon, j'ordonne à mon cerveau de se mettre en mode sécurité, je me racle la gorge pour lui faire part de ma présence.

— Vous êtes là ! Je ne vous avais pas entendu rentrer.

J'émets un petit bonjour et elle m'invite à m'assoir. Elle trifouille dans son tiroir et en ressort mon dossier, puis elle prépare de quoi me faire une prise de sang. Nous restons silencieux un long moment.

Elle est appliquée, mais rapide dans ses gestes. Ma peau frémit lorsqu'elle passe ses doigts sur le creux de mon bras pour en faire ressortir une veine. Elle s'en rend compte et s'excuse. Elle me pique, détache le garrot et appose un pansement. Elle colle une étiquette sur les cinq flacons de sang qu'elle m'a prélevés et note quelque chose sur la feuille posée derrière elle. J'ai soudainement envie de la toucher, je ne sais pas pourquoi, peut-être parce qu'elle a toujours une bonne occasion de me toucher et que moi je n'ai pas d'excuse. 

Si je tentais quelque chose, elle me donnerait probablement une gifle ou pire, elle donnerait l'alerte et s'en serait terminé de ma sortie de prison anticipée. Je ne retiens pas un soupir qui l'a fait se retourner vers moi.

— Vous allez bien ? me demande telle avec ses grands yeux bleus.

— Pas terrible aujourd'hui.

Je sens que ma réponse franche la surprend un peu.

— Je vois ça. Pas de remarque, de provocation ou de colère, plaisante-t-elle

— Vous trouvez ça drôle ?

— Non bien sûr que non, j'essaye juste de vous détendre un peu. Vous voulez m'en parler ?

J'hésite. Mon cœur me dit que cela me ferait du bien de me confier à quelqu'un et elle me met en confiance quoique j'en pense. Mais ma fierté m'interdit de me lamenter.

— Lucas. Je peux vous appeler Lucas ?

— Si je peux vous appeler Louise

Là je l'ai vraiment déconcerté.

— Vous avez raison, ce serait plus juste. Allons-y pour Louise alors.

Sa voix est douce et la pièce est calme, cette situation m'apaise. Elle vient s'assoir à côté de moi sur la table d'auscultation, je suis obligé de me décaler un peu pour ne pas que nos bras se touchent. Décision que je regrette aussitôt, car j'aurais eu l'occasion de pouvoir effleurer sa peau.

— Racontez-moi.

— Les discussions, ce n'est pas trop mon fort.

— Essayez. Dites-moi comment vous vous sentez à ce moment présent.

Drôle et difficile question. Je suis abattu et en colère et en même temps apaisé d'être près d'elle. Je me sens totalement désarçonné. Je décide de jouer la prudence dans mes propos.

— Triste, je crois.

— Quelque chose vous a rendu triste ou quelqu'un ? Vous avez reçu de la visite aujourd'hui ? De votre femme ?

— Ma femme ?

D'où sort elle l'idée que je puisse être mariée ? Ça m'étonnerait que ce soit les gardiens qui lui aient raconté ça, ça n'a pas de sens. Si elle est observatrice, elle a vu que je ne portais pas d'alliance. Et puis si j'étais marié, je ne me serais pas approché si près d'elle la dernière fois. Je l'observe, elle balance ses jambes et regarde ses pieds. Même si je ne suis plus en activités depuis des années, il me reste encore quelques compétences acquises en tant que policier et l'analyse de son attitude laisse à penser qu'elle n'est pas à l'aise.

— Je ne suis pas marié.

— Peu importe, votre petite amie si vous voulez, c'est à cause d'elle que vous êtes triste ? Vous savez je pense que je peux comprendre comment il doit être difficile de vivre une relation dans ses conditions, mais si elle vient vous voir tous les samedis c'est qu'elle tient à vous.

— Louise, je ne suis pas en couple.

Je penche la tête vers elle et elle se tourne vers moi. Nos visages sont si proches que je sens son souffle sur mon menton. Elle esquisse un discret sourire.

— Pardon, j'ai du mal comprendre alors.

— Si vous voulez savoir des choses sur moi demandez le moi directement ça vous évitera ce type d'erreur.

— J'ai essayé de vous poser des questions, mais vous m'avez envoyé balader.

— Je n'ai pas l'habitude de parler de moi.

— Alors pourquoi êtes-vous triste ? Vous avez appris une mauvaise nouvelle ?

— Oui et non.

Je sens dans son attitude qu'elle perd déjà patience et j'avoue que je ne suis pas très sympa avec elle. Je vois bien qu'elle est sincère et tente de m'aider, mais c'est tellement difficile pour moi de faire confiance à une femme.

— Mon frère va se marier et je ne pourrais pas être présent.

Après un silence qui me semble durer une éternité, elle répond calmement.

— Vous pouvez peut-être demander ...

— Pas pour ce genre d'évènement, c'est exceptionnellement autorisé pour les décès.

— Je suis désolée pour vous.

Je me lève d'un bond, il est temps pour moi de partir.

— Merci pour la consultation et ... pour le reste.

— Pas de soucis, je suis là aussi pour ça. Reposez-vous bien. Bonne journée.

***************************

J'ai revécu ce moment des dizaines de fois depuis plusieurs jours, je ne sais pas ce qu'elle essaye de faire, mais elle est dangereuse. 

Comme toutes les femmes, elle est manipulatrice, elle m'a fait parler, elle a utilisé son arme contre moi, comme Sofia à l'époque, pour me faire tomber dans ses filets. 

Elle a vraiment cru que je me ferais berner, ça fait des mois que j'ai l'impression que quelqu'un fait tout pour que je ne sorte pas de prison, maintenant j'ai compris, c'est elle l'appât. On essaye de me faire craquer, de me faire commettre la faute pour avoir une bonne raison de me maintenir ici. Bande de connards, je ne me ferais pas voir.

Louise et Lucas (Libère-moi) Tome 1 [TERMINÉE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant