Chapitre 7 Elvire

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Ses bras passent avec une folle lenteur autour de ma taille, me rapprochant toujours plus près de lui. Je lui souris les yeux levés, j'observe le désir que mes mains sous sa chemise lui procure. Il se laisse faire, libère quelques grommellements graves tout en embrassant chaque parcelle de ma poitrine. Je sens ses lèvres remonter doucement sur mon cou, appuyant légèrement sur ma jugulaire, mes ongles pénètrent sa chute de reins tant notre désir se fait ressentir. Sa bouche se colle tendrement à la mienne, d'abord timidement puis soudainement, comme envahis d'une vague de folie, mon mari empoigne mes hanches et les colle contre les siennes, qui me confirment à nouveau combien je lui plais. Nos lèvres s'ouvrent, laissant apparaître la valse effrénée de nos langues affamées l'une de l'autre. Mes mains s'agrippent à sa chevelure acajou tandis que les siennes m'enroulent autour de sa taille en me chuchotant des mots doux. Je sens mon cœur battre à rompre toutes mes veines, je rougis.

« Je vous fais encore cet effet là Fräu Klein ?

- Je vous aime Herr Klein. »

Tout d'un coup, des détonations éclatent dans la suite nuptiale et le corps de mon époux ne devient qu'un esprit entre mes bras. Il me regarde, et recule, recule, recule... J'ai beau essayé d'avancer, une main tendue vers lui, sa vue se trouble et ne devient qu'une masse floue. Je cours, sentant qu'il va bientôt disparaître, je tente de l'appeler.

« Elvire ? Elvire mon enfant ! »

Je me réveille brutalement dans mon lit de fortune, totalement dé-variée. Je regarde autour de moi telle une aliénée de retour à la réalité. Je suis dans ma chambre, les volets sont clos, je suis chez-moi, à Berlin. Je passe une main sur ma joue dégoulinante de sueur froide, une autre sur mon front brûlant et observe le visage effrayé de ma mère.

« Cela fait deux mois facilement ma fille que tu hurles le prénom de ton mari la nuit.

- Il me manque maman...

- Es-tu sûre de cela ?

- Comment peux-tu oser me poser une telle question ?

- Des rumeurs disent que tu batifoles telle une traînée avec un soldat français. »

Mes yeux s'écarquillent face à des propos si crus de la bouche de ma mère. Elle qui se remet enfin de tout ce qu'elle a perdu pendant la guerre, Petra Freinhauer qui se retrouve enfin avec elle-même, face à sa fille déboussolée ne trouve qu'à lui dire qu'elle agit comme une traînée ? J'ai un mouvement de recul lorsque sa main vernie s'approche de mon visage, mais elle me gifle.

« Elvire, ne t'avise plus de reculer face à ma main alors que tu t'es laissée toucher par un français, est-ce clair ? Remets-toi donc un peu en question face à ton psyché, et regarde aussi un peu plus souvent la magnifique bague sur ton annulaire sinon je donnerai raison aux rumeurs et tu prendras la porte.

- Oui Maman, réponds-je la main sur le puissant impact de la sienne. »

Je ne peux rien dire face à l'éternelle autorité maternelle, que j'aie 5 ans ou comme aujourd'hui 29 ans, ma mère restera à jamais mon modèle et mon pilier qu'on est interdit de contester. Je l'observe partir, de sa démarche légèrement chancelante après tant de mois de fébrilité mais je reste heureuse qu'elle retrouve la motivation de se battre face à elle-même. Mais pourquoi autant de fatalité dans sa voix ? Je n'ai jamais rien fait de mal avec Antoine.

Tu n'as rien fait, mais tu le penses tellement fort que c'est pire, hurle mon subconscient.

Je demeure assise sur mon lit pendant encore de longues minutes, sans savoir quoi faire, me répétant en tête les mêmes discours de ma mère, de Klara ou des autres. Ceux qui croient que Rainer est mort mais que je devrais lui rester loyale. Ceux qui croient qu'il est mort mais je devrais refaire ma vie que je suis jeune... Ceux qui croient aussi qu'il est vivant et les autres qui croient comme ma mère qu'il est vivant, qu'il rentrera et que je devrai être la petite femme parfaite qui l'a attendue sagement pendant des années. Je ne sais plus quoi faire, je ne sais plus quoi penser, ni sur qui, ni pourquoi. Personne ne me donnera la certitude que mon Rainer est véritablement... Je n'arrive toujours pas à associer la mort à mon époux.

Revers de Médaille Où les histoires vivent. Découvrez maintenant