Chapitre 33 Wolfgang

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La fin du mois de novembre s'annonce glaciale. Encore plus depuis que Klara m'a révélé que mon ami est à l'hôpital, y étant arrivé il y a environ deux semaines. Je me demande bien comment l'indestructible Antoine a pu se retrouver dans une telle situation. Ma dulcinée se comporte de façon très étrange, et mon instinct de grand paranoïaque me dit qu'elle me cache quelque chose.

« Tu ne peux pas aller à l'hôpital ! Hurle Klara en s'interposant entre la porte de la maison et moi.

– Et en quel honneur ?!! C'est mon ami qui est là-bas !!! Tu peux pas m'en empêcher !

– Calme-toi, je ne suis pas ton chien Wolf ! Tu sais tout autant que moi que les français et les allemands sont interdits de tisser une quelconque forme de lien. Tu n'iras pas à l'hôpital, ça te mettrait en danger, si tu le fais pas pour toi, fais le pour Antoine qui n'aurait jamais voulu que tu risques quoique ce soit pour lui. »

Je soupire, fatigué, inquiet, mais conscient que Klara a raison. Les occupants et les occupés doivent restés séparés, à la limite de la ségrégation, les sentiments sont interdits et punis. Je ne peux pas mettre mon ami en danger, pour la simple et bonne raison que les Soviétiques ont le monopole sur Berlin. Je vais devoir attendre, encore, me soumettre malgré cette haine débordante que je cherche à faire exploser, une haine accentuée à cause du retour de Petrovitch à la capitale. Je lui tourne le dos, serpentant jusqu'à la cuisine de ma sœur, à la recherche de n'importe quel alcool me permettant d'oublier ce qu'il s'est produit au pauvre Commandant Verneuil... Car je ne suis pas dupe, je sais que ce n'est pas une simple bagarre.

On n'abat pas un homme de la trempe d'Antoine en une bagarre.

Je me sers de la bière dans une chope, sentant les douces mains de ma bien-aimée glisser vers mon abdomen, elle me caresse, et mes muscles se détendent automatiquement.

« Wolf... Tu ne peux pas tout contrôler, et ce n'est pas parce que tu ne contrôles pas tout que tu es faible. »

« Tu veux jouer à ça le Boche ? Allez couchez ! »

J'essaie d'ignorer ces pensées qui ne cessent d'obstruer mon cerveau lorsque je lui fais face, surprenant ses magnifiques yeux verts d'eau brillant plus fort qu'un coucher de soleil sur la plage en été. Mes mains se posent dans le creux de ses reins, je la rapproche avec douceur, jusqu'à ce que nos poitrines se collent et que je sente sa respiration déjà fébrile sous mon toucher. Je remonte le contact dans sa nuque et plonge sur ses lèvres douces, suaves, contrastant avec le goût amer de la bière sur les miennes. Le baiser commence par un rythme encore timide, comme si nous avions peur de ne pas survivre à l'explosion de nos deux corps. Nos bouches semblent avoir été façonnées l'une pour l'autre, je le comprends à l'accélération du baiser, nous cherchons à être au plus proche l'un de l'autre. Nos lèvres s'entrouvrent, nos langues se mélangent avec une frénésie incontrôlable, dans une valse endiablée, animée d'un rythme intense difficile à suivre.

Nous nous rapprochons, mes mains s'agrippent fermement à ses hanches, ce qui lui arrache un soupir. Les siennes passent dans cette chevelure châtain claire autrefois rasée. Dans un élan de désir, mes mains passent sous ses cuisses sveltes et les enroulent autour de ma taille. Elle sourit contre mes lèvres balafrées, toujours avec cet éclat de malice dans les prunelles. J'esquisse un rictus en l'amenant jusqu'à ma chambre, profitant l'absence de toute ma famille. Nos cœurs battent au même rythme, quand nos corps s'écrasent sur le vieux lit, je ne peux m'empêcher de la regarder. Qui pourrait bien croire que c'est la mère d'un enfant de deux ans ?

« Arrête de me regarder, sourit-elle en caressant mon dos de ses ongles, je vais rougir.

– Oh ma chère, tu l'es déjà. Je dirais même que tu es à deux doigts de l'implosion.

Revers de Médaille Où les histoires vivent. Découvrez maintenant