CHAPITRE 58

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Si on pouvait voir la pièce de l'extérieur, tout ce qu'on verrait, ce sont deux hommes, les pupilles brillantes de lueurs peu commune se regarder droit dans les yeux, à quelques centimètres l'un de l'autre. La main dont il s'est servi pour essuyer mes larmes est toujours sur ma joue, légèrement crispée. Le silence présent autour de nous laisse entendre distinctement le rythme de nos coeurs et je remercie tous les dieux existants que les autres dorment en ce moment.

À la suite de mon affirmation, le palpitant de Derek a clairement raté un battement.


Sauf qu'il n'a plus rien dit.


Le loup-né se contente de m'observer, immobile. Le temps semble presque s'être arrêté dans la chambre. Dans un réflexe non contrôlé, je me détache doucement de son contact et commence à passer ma main dans mes cheveux, gêné d'avoir décrété sans aucune hésitation que je ne laisserai pas mes amis être des omégas, sans même leur avoir demandé leur avis.

En règle générale, je serai sûrement en train de déblatérer n'importe quoi pour chasser ce que je suppose être un malaise mais face à lui, je ne sais juste pas quoi dire de plus. Néanmoins il faut croire que les habitudes ont la vie dure puisque ma langue se délit sans mon accord, ne me laissant pas d'autre choix que de parler, comme toujours.


— Tu peux dire quelque chose s'il te plait ? Tu sais je voulais pas insinuer que je vous laisserai pas le choix. Vous pouvez nous rejoindre si vous en avez envie, après si c'est trop dur pour vous ou que vous avez d'autres projets, je comprends. J'ai sorti ça comme ça, te sens pas obligé de...

— Stiles, ricane-t-il soudainement.


Heureusement qu'il m'a coupé la parole parce que j'ai l'impression de redevenir un ado hyper agaçant qui ne s'arrête jamais de parler...


— Tu m'as surpris.


Fermant enfin ma bouche, je me contente d'écouter ce que Derek va me dire.


— Je ne m'attendais pas à ce que tu veilles de nous après tout ce qu'il s'est passé...


Cette fois, c'est mon tour de froncer les sourcils.


— Je veux dire, je sais que ce sont tes amis et que tu tiens à eux. Puis il y a aussi ce qu'on a découvert à propos de nous...


Le rouge me monte aux joues rien que d'y penser.


— Mais ce n'est pas une décision à prendre à la va-vite. Tu dois en parler à ta meute et rester conscient que ça n'arrangera pas tes rapports avec Scott. Si on vous rejoint, ça créera encore plus de problème.


Son visage se crispe à chacun de ses mots, comme si me les dire était quelque chose de difficile et de totalement opposé à ce qu'il voudrait vraiment répondre.

Encore une fois, nous laissons passer quelques minutes avant de continuer.


— Si tu tiens à ce que j'en parle à ma meute alors je le ferai. Mais je sais que je n'ai pas besoin d'y réfléchir et eux non plus, je le sens au fond de moi. Vous êtes plus que mes amis, vous êtes ma famille. Je ressens ce que j'ai ressenti pour chacun des membres de ma meute, cette évidence que votre place est avec nous. Je l'avais déjà ressenti quand vous vous étiez pointé ici le jour où les miens sont arrivés. Seulement votre lien avec la meute de Scott me forçait à laisser cette sensation de côté. Je n'ai plus besoin de le faire maintenant.


Mon sourire ne quitte pas mon visage tellement prononcer ces paroles à voix haute me rend heureux. Mon coeur bat légèrement plus vite tandis que mon loup jappe de contentement d'imaginer ma meute enfin au complet.


Je m'attends à ce qu'il dise quelque chose mais étrangement, il semble ne plus trouver ses mots et même s'il n'est pas vraiment rare de voir un Derek Hale silencieux, l'émotion que je peux voir sur son visage est totalement inédite. Si mon coeur ne battait pas déjà un record de vitesse depuis tout le début de cette conversation, il accélérerait encore, j'en mettrais ma main au feu.

Imperceptiblement – peut-être sans le moindre rapport, je sens mes sens engourdis me revenir un à un. Comme si la simple l'euphorie que je ressens augmentait mes facultés au point de me rendre plus fort, plus vivant.


Ses orbes chatoyantes ne quittent pas les miennes une seule seconde si bien que je n'ose même plus bouger. Le sourire sur mon visage laisse néanmoins place à une expression que je ne saurais pas décrire au moment où je le contemple loucher sur mes lèvres, réinstallant une tension à la fois plus forte et plus agréable dans la pièce.

Sans pouvoir m'en empêcher, je déglutis puis laisse à mon tour ma vue se perdre.


Est-ce qu'il y a toujours eu une telle électricité entre nous ? Est-ce qu'on était aveugle pour ne pas s'en être rendu compte avant aujourd'hui ?


Le souvenir que notre premier baiser, il n'y a pas si longtemps, me caresse l'esprit, faisant dérailler mon palpitant. Le loup-né replonge alors ses yeux – cette fois vert et or, dans les miens. Comme s'il ne voulait pas m'effrayer et sans perdre ce contact visuel, Derek quitte la chaise pour s'asseoir au plus près de moi, sur le lit. Ma respiration se fait plus haletante tandis que je sens au fond de moi la partie de mon être angoissé s'abandonner à tout ce qui, en moi, hurle que je n'ai pas à fuir une nouvelle fois.


Peut-être bien que je peux me laisser un peu aller, pour une fois.


Le temps semble encore s'être figé mais cette fois, c'est différent. Un peu comme si on avait tous les deux étaient transportés à un autre endroit, à un autre moment, dans une autre vie. Tandis que j'essaie de comprendre s'il s'est échappé une seconde ou une heure, je sens pour la seconde fois la sensation merveilleuse de sa bouche qui se pose sur la mienne, futilement hésitante. Ni tenant plus, je ferme les yeux et m'abandonne à ce baiser, rassurant par la même occasion mon compagnon.

Instinctivement, sa main a trouvé sa place au niveau de ma hanche alors que les miennes partent jouer dans cette crinière plus douce qu'elle n'en a l'air au premier coup d'oeil. Je sens plus que je ne vois nos corps s'approcher l'un de l'autre, toujours à la recherche de plus de contact. Nos positions assises n'étant pas vraiment adapté à ce besoin, je tire doucement les cheveux ébènes de Derek pour lui faire comprendre ce que je veux. Nos lippes ne se détachant que pour nous permettre de respirer, la tâche s'avère assez complexe mais comme moi, il ne parait pas avoir envie de nous séparer plus que nécessaire. Alors c'est sans nous écarter que l'ancien alpha enjambe mon corps de façon à se mettre à califourchon au-dessus de moi. L'hésitation première a définitivement laissé place à la passion, à l'acharnement. Nous lâchons prise tous les deux comme ça ne nous ait jamais arrivé auparavant. Nos langues se battent, communiquant tous les sentiments qu'on a un jour pu éprouver à l'égard de notre relation chaotique et inexplicable. Plus que des papillons, c'est une vraie explosion que je sens remuer mon estomac et mon coeur.


C'est après un temps qui m'a à la fois paru interminable et trop court que nous sommes forcés de nous relâcher. Souhaitant profiter de l'instant, je garde mes yeux clos encore un moment, me contentant d'écouter nos rythmes cardiaques saccadés et ô combien élevé. Mes lèvres se fendent d'un sourire qui j'en suis certain fait reflet à ce que je verrai sur le visage de l'homme face à loi si j'acceptais d'ouvrir mes paupières.


Comment ai-je pu ne pas m'en rendre compte plus tôt ?

L'Alpha Inné [ Sterek ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant