II. 8. Tobio

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Je suis paumé.

Je me doutais que revoir Oikawa-san serait éprouvant. Mais c'était dix, non, cent ? ou plus encore ? fois pire que ce que j'imaginais. Quand je l'ai vu, dans le hall, j'ai eu l'impression que mon cœur s'était arrêté.

Et puis cette discussion qu'on a eue...

-Allez, crache le morceau, soupire Miya. Qu'est-ce qu'il t'a dit ?

On a esquivé le sujet toute la journée (même Ushijima-san a réussi, même si je pense qu'il avait très envie de parler d'Oikawa), mais Miya-san, je commence à le connaître, il préfère lancer les choses quand on ne se retrouve qu'à deux dans la chambre. Moi, je suis allongé sur le ventre, et je regardais des trucs sur Instagram tranquillement ; et lui s'est calé contre le mur, dans son lit, pour me fixer.

-Qui ça ? Oikawa-san ?

Il me renvoie un regard ennuyé, les yeux blasés, les sourcils haussés. J'aime bien le fait que Miya soit expressif. Oikawa, c'est toujours difficile de savoir ce qu'il pense, et j'en ai encore eu la preuve hier...

-On n'a pas beaucoup parlé. Il a dit que j'avais changé, j'ai dit que lui aussi, il avait changé.

Je fais défiler mon écran, je tombe sur une photo de Hinata, tout bronzé, sur un terrain de beach avec un de ses coéquipiers. Pff. J'aurais bien aimé le voir, en vrai, si seulement cet idiot n'avait pas décrété que ce ne serait pas le cas avant qu'il soit aussi fort que moi -et il part de loin, donc autant dire qu'on se reverra peut-être jamais. Comme il connaît aussi Oikawa-san, il aurait peut-être pu avoir un avis sur ma situation.

-Il a dit qu'il allait bientôt être officiellement Argentin.

-Et ça t'a fait du mal, hein ?

Je baisse les yeux.

-Ouais. Un peu.

-Tobio-kun...

Miya se penche un peu en avant, et j'ai du mal à situer son sourire, entre condescendance, bienveillance et pitié :

-Tu pensais vraiment qu'il reviendrait au Japon ? Qu'après trois ans là-bas, il se dirait, les vacances étaient sympas mais les sushis me manquent ? Alors qu'il a toujours aucun espoir de jouer ici ?

-J'en sais rien, Miya-san. Peut-être qu'il y a autre chose que les sushis qui auraient pu lui manquer.

-Genre toi ?

Je continue à scroller sans répondre. Je regarde une vidéo de volley, un gars dans un gymnase qui essaie de toucher une bouteille au service. Moi, je suis quasi-sûr d'y arriver du premier coup. Miya ne me laisse pas tranquille pour autant :

-Il a dit ça ? Il a dit que tu lui avais manqué ?

-Il a dit qu'il était heureux de me revoir.

-Et toi ? Tu étais heureux de le revoir ?

Je sais pas, j'en sais rien, fous-moi la paix. C'est assez difficile de démêler mes sentiments comme ça. Oui, j'étais heureux de revoir Oikawa, enfin, je suis content de voir qu'il va bien, qu'il me reconnaît, qu'il se souvient de ce qu'on a vécu ensemble. Mais en même temps, ça me fait mal au cœur de voir que tout ça, c'est terminé. De devoir être à côté de lui, de devoir le regarder en sachant que je n'ai plus le droit de le toucher, qu'il n'est plus à moi.

Je scrolle encore, et je tombe sur la photo d'une jeune femme en train de faire un discours dans je ne sais quel événement. Elle a de longs cheveux blonds tressés, un maquillage élaboré, et une robe qui découvre ses épaules. Si j'aimais les filles, je dirais qu'elle est séduisante, mais c'est pas le cas et je ne comprends pas bien ce qu'elle fait au milieu de mes vidéos de volley. Flavia Soares ? Suggéré pour vous ? C'est pas une joueuse, enfin je crois pas, alors c'est qui cette meuf ?

IkaroiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant