IV. 4. Flavia

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Ça fait trois jours qu'on est rentrés à Rio de Janeiro. On a retrouvé notre maison, notre langue, nos repères ; au fond, ça fait du bien de revenir ici. J'adore le Japon, mais je n'ai pas encore vraiment eu le temps de m'habituer à la vie là-bas.

Deuxième salon oblige, Rubens s'est fait un plaisir de décorer un deuxième sapin de Noël avec nous. Bien sûr, j'ai pris soin de faire la paparazzi pour Insta : couple glamour avec une guirlande autour du cou -photo. Père aimant qui porte son bambin pour qu'il dépose l'étoile en haut du sapin -photo. Foyer riche avec une montagne de cadeaux aux emballages multicolores au pied d'un arbre entièrement décoré et illuminé -photo. Famille idéale avec des pulls de Noël assortis et des sourires joyeux -photo. La médiatisation, c'est essentiel : plus en on montre et moins il y a à montrer.

Le but de cette manœuvre est toujours le même : continuer à sortir. Moins qu'avant depuis que j'ai des responsabilités maternelles, c'est vrai, mais le marché que j'ai passé avec Nico il y a cinq ans tient toujours. En Italie, j'avais trouvé mon rythme avec deux ou trois hommes que je voyais de temps en temps, histoire de décompresser et d'avoir ce frisson de clandestinité. Au Japon, j'ai trouvé quelqu'un aussi. Et puisque nous voilà à Rio pour trois semaines, c'est l'occasion de renouer avec quelques anciens plans cul discrets.

Chaque rencontre est une prise de risque, alors je tâche de bien les choisir. Parfois, Nico lui-même me donne son avis. Je m'assieds entre ses jambes, il pose sa tête au-dessus de la mienne et regarde les différents profils avec moi sur mon téléphone. On parle librement de tout ce qu'on fait l'un sans l'autre, sans jalousie et sans gêne, et on en rigole avec la complicité de meilleurs amis. Je vais être franche : je n'ai jamais été aussi épanouie qu'en sachant que je peux rentrer chez moi, dans mon foyer, retrouver mon mari et lui raconter s'il s'est passé des choses cocasses avec un amant. Et l'inverse est vrai aussi -parfois Nico débarque en m'annonçant de but en blanc Fla chérie, j'ai un nouveau record que t'es pas prête de battre... et déclare qu'il a couché avec je ne sais quel volleyeur de deux-mètres trente.

Cette facette de lui est parfois invisible, insoupçonnable, comme à ce moment où il se consacre à son rôle de père, assis au milieu du salon en train de lancer une balle à Rubens qui la lui renvoie maladroitement en riant aux éclats. Mon cœur se dilate de bonheur en me disant que ce sont les deux hommes de ma vie.

-Nico, c'est quoi, ça ? plaisanté-je. Je rêve ou tu es en train de le former pour en faire un volleyeur ?

-Absolument, mon amour. J'ai appelé ça le « projet Giba ».

-T'aurais pu appeler ça le « projet Romero », il me semble.

-Oui, mais ça faisait trop narcissique.

Il m'adresse un sourire joueur et me lance le ballon.

-Maman, balle ! s'écrie Rubens en tendant les bras.

-Tu vois, il veut que tu joues aussi.

Je pose mes mains sur mes hanches sans pouvoir retenir un sourire attendri :

-Pas maintenant, c'est l'heure du bain. Tu t'y colles ? Et je suis sûre, ajouté-je en voyant la tête que tire Rubens au mot « bain », que ce sera un sport tout aussi éprouvant.

-Pas bain, volley, supplie Rubinho.

Nico l'emporte malgré ses cris, et je m'occupe du repas pendant qu'il gère le bain. On a notre petite routine bien huilée, et malgré toutes les contraintes de notre mode de vie, on essaie le moins possible de recourir à de l'aide extérieure. Notre foyer, c'est nous trois, rien que nous trois, et on tient à le protéger. Ça a toujours été clair entre nous.

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⏰ Dernière mise à jour : Oct 28 ⏰

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