Bilan de San Juan pour la saison 2018 : vingt-quatre victoires, sept défaites. On gagne les phases finales, mais on est classés deuxièmes au tableau avec deux points de moins que Bolivar. On n'a pas réussi à se qualifier pour le tournoi sud-américain d'où on aurait pu accéder à la coupe du monde des clubs, donc la saison s'est terminée début avril. Aucun club japonais ne s'est qualifié, mais deux clubs italiens, dont la Civitanova Lube de Romero sont en lice. Résultats en novembre.
D'ici-là, ça va encore être un été bien chargé niveau volley. La première édition de la VNL, qui remplace la Ligue mondiale, s'ouvre fin mai et se termine en juillet. Fin août : rendez-vous en coupe Panaméricaine. Et après ça, en septembre, il y aura le championnat du monde. Pour l'instant, on se prépare pour la VNL et ses cinq semaines de poules, une par pays, de quoi être rincé pour les phases finales en France.
Volley, volley, volley. J'ai essayé de me tenir à cette ligne de conduite depuis juillet dernier. J'ai essayé, de toutes mes forces, d'ignorer l'horrible vérité qui me ronge, celle de savoir que j'ai obtenu ma place en Argentine non seulement par mon talent, mais aussi en donnant du plaisir à José, que je me suis prostitué pour ce poste de passeur. Je me suis créé une opportunité en échange de mes faveurs. Du talent, j'en ai, comme dit Blanco lui-même, mais personne ne l'a remarqué au Japon, et personne ne l'aurait remarqué ailleurs s'il n'avait pas été là pour me placer au-devant de la scène. J'aimerais dire que la fin justifie les moyens, mais ce que j'ai fait, ce que je possède, ce que je suis, tout ça me dégoûte maintenant.
José a tenu à mettre les choses au clair avant la rentrée de saison. J'ai accepté, parce que j'avais besoin d'une explication, j'avais besoin de quelque chose à quoi me raccrocher, à quoi agripper le peu d'estime de lui qu'il me restait, à sauver un petit morceau de mon cœur brisé après avoir vu que l'homme que j'admire le plus au monde n'est qu'un vieux pervers qui use de son influence pour détourner des adolescents. De quoi tenir une nouvelle saison à San Juan. Et il avait été ferme, ses doigts ne tremblaient pas autour de son verre de vin, tandis qu'il me regardait droit dans les yeux en promettant :
-Tooru, je n'ai jamais touché un mineur. Je l'ai rencontré quand il était au collège, c'est vrai, et je l'ai pris sous mon aile en voyant dans quel milieu il était à l'époque. Mais il n'y a rien eu avant sa majorité. Tu le sais, au fond de toi. Est-ce que ce n'est pas ce que je t'ai demandé, à toi aussi, avant qu'on le fasse, à Tokyo... ? J'aime les jeunes hommes, c'est vrai. Mais je ne suis pas un... Oh, Tooru, enfin.
C'était sûrement la solution de facilité, mais j'ai accepté cette version. D'accord. José Blanco n'est pas un pédophile, José Blanco est un homme respectable qui contribue à des organisations humanitaires au point d'aider personnellement des garçons pauvres à intégrer des centres de formation. Ça n'empêche rien au fait qu'il trompe sa femme, mais là encore, quand j'ai soulevé la question, il a répondu naturellement :
-Je l'aime, j'aime mes gosses, j'aime ma famille. On passe du temps ensemble pour garder un équilibre. A côté de ça, je mène ma sexualité comme je l'entends. De nombreux couples d'âge mûr font ça, tu sais. Elle en est consciente comme je suis conscient de ce qu'elle peut faire de son côté. C'est d'un commun accord, et on ne fait rien d'illégal.
Ma sexualité. Donc c'est bien tout ce que je suis pour lui, un plan cul. J'ai accusé le coup. Je me suis dit, plus jamais je ne le laisse arriver dans mon lit, c'est hors de question, je ne suis pas sa chose. Et pour m'empêcher de céder, pour vider mes hormones et rester concentré sur le sport, j'ai décidé de faire d'autres rencontres.
-Vas-y, essaie, c'est génial ! s'est enthousiasmé Leo quand j'ai parlé de m'inscrire sur une appli. Tu vas avoir plein de likes !
Et en effet, j'ai eu plein de likes. Je poussais même l'audace à regarder les profils avec l'équipe, devant José, sous leurs commentaires, pour bien lui montrer que désormais, ma sexualité m'appartenait, à moi aussi. Et puis j'ai rencontré une fille, on a passé la nuit ensemble. Le lendemain, nouveau date, un mec cette fois, rebelote. J'ai fait ça quelques semaines. Puis, quand la septième personne avec qui j'ai partagé ma nuit sans envisager de la revoir a quitté mon appart, je me suis effondré.
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Ikaroi
FanfictionEst-ce que ça en valait la peine ? Je ne le saurai sans doute jamais. A présent, je regarde en arrière vers ma liberté perdue, et je voilà ce dont je me souviens : des sourires brillants, des corps d'athlètes, des médailles d'or et des regards de br...