Quinze minutes de marche plus tard, me voila arrivée dans un autre quartier de la ville, réputé pour ses petits commerces locaux, restaurants et bars plus attractifs les uns que les autres.
Si ce n'est le haut des immeubles que l'on perçoit çà et là lorsqu'on lève la tête, l'impression de campagne demeure.
Le brouhaha constant de la ville est absent, alors que nous y sommes en plein cœur.
Baptiste ne m'avait pas menti, le quartier rénové est une véritable réussite.
Arrivée dans l'allée principale -Allée du Peuple - je cherche le lieu de rendez-vous tout en flânant et m'extasiant de ce petit coin de paradis qui invite à la détente.
Ça fait un moment que je n'y avais plus mis les pieds, le temps me manque.
Les rues pavées rendues piétonnes sont jalonnées de bâtiments aux façades en pierre bleue ou d'époque, partiellement restaurées afin de conserver leur authenticité.
Des guirlandes lumineuses zigzaguent entre les toits et distillent un petit air festif à la nuit tombée.
Quelques personnes attablées en terrasse profitent des caresses du soleil en savourant un verre et des tapas tout en s'amusant à regarder de jeunes enfants.
Ceux-ci rient aux éclats en traversant d'un bout à l'autre les jets d'eau d'une fontaine.
L'odeur alléchante des restaurants envahit mes narines, mon estomac confirme qu'il est temps de passer à table par des gargouillis très audibles.
En quelques foulées, je crois enfin atteindre l'endroit.
Deux baies vitrées sont couvertes de l'intérieur par du papier journal jauni et la façade décrépie n'a rien d'engageant, ça commence bien.
Aucun écriteau.
Seul la porte d'entrée est légèrement ouverte, je la pousse et appelle Baptiste.
L'endroit sombre et froid contraste avec la luminosité et la chaleur de l'extérieur et les effluves délicieuses de gaufre d'une échoppe située juste en face sont chassées par une odeur de renfermé.
À ma droite, sur un long comptoir, gît un trousseau de clefs ainsi qu'un téléphone portable qui ne cesse de clignoter et un dossier bleu clair à l'effigie de l'agence immobilière où travaille Baptiste.
À l'opposé, le long du mur, sont empilées plusieurs chaises en bois, des banquettes dont le cuir est usé et ne parlons pas du sol crasseux sur lequel les semelles de mes sandales collent.
Qu'est-ce que je fous là?
-Ma chérie, tu es enfin là?
Une voix suraiguë me fait sursauter et la chevelure bouclée vénitienne de Baptiste apparaît de nulle part.
Arrivé à ma hauteur, il me claque deux bises sur les joues, tout guilleret et consulte d'un œil un autre portable qu'il range aussitôt dans la poche arrière de son pantalon en lin beige.
- Ne te voyant pas arriver, je t'ai appelée plusieurs fois.
Je tilte.
-Oh, Excuse-moi, je crois que mon téléphone est en mode silencieux.
Je le sors de mon sac à main, le lui confirme tout en réactivant les paramètres avant de le remettre à sa place.
-Ce n'est pas grave chaton. Tu es toujours aussi belle. Et cette longue chevelure de rêve, tu dois en faire des jalouses dis donc.
Après ce compliment qui me redonne un peu de peps, il pivote et m'enjoint à le suivre sur un ton professionnel.
-Ne perdons pas le temps, je suis attendu. Nous sommes sur un bien d'une surface totale de deux cent cinquante mètres carrés comprenant un appartement à l'étage dont l'accès est à l'extérieur. La cuisine se trouve derrière ce double battant, et en face, les WC. Ici, une porte qui donne accès à un petit jardin à l'arrière.
-Baptiste, je l'interromps, tu sais bien que je tiens une boutique et pas un restaurant ?
Insensible à ma remarque, il hausse les épaules tandis que j'aperçois quelque chose se faufiler au sol et atteindre une pile de sombreros entassés dans un coin.
Bordel !
- Des rats, je m'écrie, affolée, en me saisissant de son coude. Il y a des rats ici.
Je tourne les talons, prête à décamper lorsque mon ami attrape mon bras.
- Attends Ava, je t'assure que le prix de vente est incroyable, c'est une affaire en or.
- Ah oui, même une maison hantée fait moins peur ! Comment tu m'expliques qu'il fasse aussi sombre ? Sans compter l'odeur répugnante et toute cette crase accumulée depuis, depuis, depuis ...
Je lui montre ma sandale en la décollant du carrelage.
Maniéré au possible, il affiche une mine dégoûtée en retroussant son nez mais n'en perd pas le nord pour autant.
-C'est pas un palace, mais un bon nettoyage et on n'en parle plus. En ce qui concerne l'électricité, j'étais en train de chercher le compteur quand tu es arrivée. Attends, il est normalement quelque part ici près de la cuisine. Si tu me laisses le temps de le trouver, on peut continuer la visite.
-C'est bon, ne te donne pas cette peine, j'en ai assez vu. Et puis tu sais que je n'ai aucune expérience dans le domaine de la restauration. Comment as-tu pu penser que je serais intéressée par ce bien ?
Totalement prise au dépourvu, je me demande si, en tant qu'agent immobilier, il connaît son job parce que là, il se plante royalement.
Baptiste me considère un instant, souffle sur l'une de ses boucles rousses qui lui barre le visage et avance, sûr de lui.
- Ce lieu a du potentiel et puis on s'en fiche, c'est du business. Tu trouves les bons partenaires et l'affaire est dans le sac.
Devant mon silence, il répète en appuyant sur chaque syllabe de sa voix haut perchée.
-Que-du-bui-snes.
Soudain, nous entendons une voix masculine depuis le seuil de l'entrée.
-Tu as tout faux, Baptiste.
Baptiste penche la tête sur le côté et fixe l'entrée, un sourire carnassier s'invite sur ses fines lèvres.
Il me contourne, me plante comme si je n'existais plus et va à la rencontre du mystérieux inconnu qui semble plus intéressant que moi.
Je lui emboîte le pas tandis que mon regard navigue dans chaque recoin visible, allant des murs au papier peint défraîchi vers les décorations typiques mexicaines qui ne tiennent quasiment plus en place.
Les menus laissés à l'abandon semblent recouverts de gras, ce qui m'arrache un haut le cœur.
Un nouveau petit couinement hâte mon pas en direction de la sortie.
Clairement, je n'ai plus rien à faire ici.
Avec toute la bonne volonté du monde, Philippe Etchebest en personne ne pourrait pas retaper cet endroit immonde.
- Mais qui voilà ! s'extasie mon ami les mains sur les hanches. T'es pas gêné quand même. Tu sais très bien que ma cliente a l'exclusivité et que si elle n'est pas intéressée, on verra si on peut faire affaire, toi et moi.
De toute évidence, Baptiste connaît ce gars, pour emprunter ce ton aussi familier.
Je m'avance.
Et là, je crois rêver.
J'en ai même le souffle coupé.
La luminosité extérieure forme un halo autour de lui, je cligne des cils un nombre incalculable de fois et les pièces du puzzle se mettent en place.
On dit que le hasard fait bien les choses.
Seulement, je vous avoue qu' à cet instant, je ne suis pas de cet avis.
Si je vous dis qu'Apollon se tient à quelques mètres de moi, vous me croyez ?
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Alors que pensez-vous de ces dix premiers chapitres?
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Le Dessous des Secrets
RomanceDepuis le départ de son ex à l'autre bout du monde, Ava a perdu foi en l'amour. Pour avancer, elle a décidé de maintenir les hommes à distance et de se consacrer entièrement à son travail dans sa boutique de lingerie. Après tout, aucun homme ne pour...