Chapitre 47

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— C'est fou, toute cette histoire ! Sérieux, je l'ai toujours dit, c'est une psychopathe, cette fille, s'exclame Isaure en changeant de position dans le fauteuil.

Elle attrape la bouteille de rouge posée sur la table basse tandis que j'opine.

Après le départ de Pierre-André, on aurait pu entendre une mouche voler tellement tout le monde était abasourdi.

J'en ai profité pour m'éclipser.

Une fois chez moi, je me suis précipitée pour rassembler des fringues dans une valise et me partir à la boutique, au deuxième étage.

Quelques heures après avoir repris mes esprits, j'ai envoyé un SMS à Adèle et à Thomas. À ma sœur pour lui signaler que j'avais besoin de prendre du recul et que mon appartement était libre et à Thomas pour lui proposer de se voir pour discuter.

Toute la soirée, j'ai vérifié la batterie de mon téléphone et que la sonnerie n'était pas coupée. Tout fonctionnait, c'est juste qu'aucun des deux ne m'avait répondu.

Durant trois nuits, je n'ai pratiquement pas dormi. Je me suis remémoré tous les événements survenus chez mes parents.

Se sentir rejetée par deux personnes qu'on aime est douloureux.

Alors, après plusieurs envois de SMS, j'ai préféré abandonner.

Le temps atténue les blessures et l'espoir fait vivre.

— Tu ne vas tout de même pas continuer à te terrer dans ta boutique, réplique ma meilleure amie en se saisissant d'une part d'une pizza dans une main et en remplissant copieusement nos verres à vin. Mange, elle m'ordonne, sinon tu vas finir par perdre un os.

Je n'ai pas faim, mais j'obéis, sinon elle risque de ne pas me lâcher et, pourtant, je suis loin de ressembler à Kate Moss.

— Je suis bien ici, je ne peux m'empêcher de bougonner.

— Oui, tu es bien, car tu préfères fuir qu'affronter la réalité, elle répond un filet de fromage qui pendouille au coin de ses lèvres. Thomas et Adèle doivent connaître la vérité.

Je lui tends une serviette

— Ni l'un ni l'autre ne m'a pas répondu, je ne vais pas les harceler, non plus, je riposte en portant le morceau à ma bouche.

— Mouais. Et maintenant ? Tu vas faire quoi ?

J'envoie la moitié de ma part dans le carton et essuie mes mains sur une serviette.

— En ce qui concerne mes parents, à l'heure qu'il est, ils ont entamé les démarches pour me déshériter et je m'en balance. J'ai vu Alix hier. Nous avons eu une longue conversation. Comme prévu, elle colle un procès à François et Clarisse. Jamais, elle n'aurait pensé qu'il la trahirait de cette façon. Elle est déçue et en colère. Tous les deux encourent une lourde amende. La prochaine soirée au Club est maintenue, ensuite elle ferme l'établissement et part vivre à l'étranger.

— Tes parents sont des idiots et ça, on le savait déjà. En revanche, je n'en reviens toujours pas, ton frère. Lui, qui est si taiseux.

— Pierre-André ne parle pas pour ne rien dire, mais, là, je te promets que son assurance dominait toute la pièce. Il a déstabilisé Clarisse en un rien de temps, je raconte en me levant pour débarrasser la boîte à pizza. Isaure me suit.

— Il n'est pas avocat pour rien, elle ajoute en déposant nos verres dans levier pendant que je jette le carton dans la poubelle.

— Vraiment ! Jamais je n'aurais imaginé qu'il puisse avoir un lien avec le Club. Quand il l'a dit, c'est comme si je prenais un claque en plein visage. Pendant tout ce temps, il savait. Et Alix a préféré ne rien me dire pour des raisons de confidentialité et ne pas me mettre mal à l'aise.

— Sérieusement ! Ton frère est l'un des avocats d'un club échangiste secret. C'est dingue !

Nous éclatons de rire.

Isaure déplace la petite table basse et ouvre le canapé-lit.

— Tu fais quoi ? Je l'interroge.

— Il est tard, on ferait mieux de dormir.

— Isaure, je soupire, tu n'es pas obligée.

Elle lève les yeux au ciel et hausse les épaules.

— Donne-moi, le drap, elle demande de l'autre côté du lit.

Je m'exécute.

— Je t'assure, je peux passer la nuit toute seule.

— C'est non négociable, elle contre en glissant le coin du drap sous le matelas, je l'imite. Depuis trois jours, tu te morfonds le soir. Heureusement que tu bosses sinon, je te retrouverais en jogging dégueulasse, à manger du chocolat avec le cheveu gras. Au lieu de ça, t'as perdu du poids et tes cernes sont creusés. C'est tendance sur TikTok, mais il faut avouer que c'est moche. Donne-moi les deux oreillers derrière toi.

— Vilaine, va !

Je les lui balance en plein visage et elle explose de rire.

— Voilà comment tu remercies ta meilleure amie ! Ingrate !

Elle ricane en les jetant dans notre lit de fortune.

— Tu n'avais pas un rendez-vous avec Clément ? Je la questionne en prenant la couette que nous étendons ensemble.

— Si, mais la santé mentale de ma meilleure amie passe avant le sexe. Je ne lui ai rien dit.

— Ravie de savoir que je fais partie de tes priorités.

— Mon vagin ne te remercie pas.

Nous pouffons de rire.

— Hum, je me disais... et Jacob, là-dedans ? Elle me demande.

Je soupire.

— Il va falloir que je lui donne une explication.

— Sérieusement ! Deux personnes, deux univers complètement différents, une seule identité qui s'éprend d'une même personne c'est juste waouw ! Tu es l'héroïne d'une romance de fou.

— Tu exagères. Après, ça n'a rien d'anormal dans le fait d'avoir deux vies distinctes surtout quand tu fréquentes ce milieu.

— Ouais, t'as raison, mais quand tu l'apprends et que ça concerne quelqu'un que tu connais c'est particulier. Je ne le verrai plus de la même façon. Je suis certaine que tout va s'arranger avec ces trois-là.

Je hausse les épaules, peu convaincue même si, au fond de moi, j'ai envie de croire que ma sœur et Thomas sauront faire preuve de discernement.

Le Dessous des SecretsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant