Le lendemain midi, la douleur avait reflué. Ce n'était pas Byzance, je boitais quand même, mais ma démarche n'avait plus rien à voir avec celle de la veille, pleine de tremblements et de plaintes.
En nous rendant à la cantine de la fac, je discutais avec mes amis.
— Pourquoi tu ne m'as pas appelé hier ? me gronda presque Erwann.
Ses iris orageux fixèrent les miens, plus fuyants.
— Parce que c'était inutile. Nathan n'est qu'un imbécile, mais à cause de son statut, il est intouchable. Pas la peine que ma malchance t'éclabousse. Je ne risque rien, c'est un garçon frustré qui pense être le roi du monde. Il n'est pas dangereux.
— Mais tu es blessé, dit-il d'un ton sec.
Sa mine se ferma d'insatisfaction. C'était l'une des qualités que je préférais chez lui, il était loyal, prêt à affronter les pires alpha pour que mon honneur reste sauf.
— Je suis tombé contre un casier en fer, minimisai-je. Évidemment que je n'allais pas m'en sortir sans rien. Pour autant, je n'ai qu'un bleu assez moche. Ce n'est pas la peine d'en faire toute une histoire, il se lassera.
Je cherchai une validation quelconque dans les yeux de Line, mais je ne trouvais qu'un air étrange, mêlant chagrin et colère.
— Quoi ? l'attaquai-je, irrité de ne pas avoir de soutien de ce côté-là non plus.
Elle redressa le menton et se planta devant moi, du haut de son mètre dix. Elle tenta de se montrer imposante, mais j'avais juste l'impression qu'une peluche m'engueulait.
— Comment ça « quoi » ? Ça fait des mois que ça dure ! Y a un moment il va falloir que ça s'arrête et le meilleur moyen d'y parvenir, c'est d'en parler !
Je fronçai les sourcils, en total désaccord avec elle.
— Je refuse. Je dois me faire bien voir. Me plaindre qu'un des danseurs principaux me harcèle, non, mais t'imagine ? Ces mecs sont ce qu'il y a de plus important pour la boîte. C'est moi qui perdrai mon job, pas eux ! Du coup, effectivement, je ne comprends pas l'utilité d'en parler et je préfère adopter une défense basée sur l'ignorance. Vraiment, quelle idée de merde ! De toute façon, si vous me forcez à quoi que ce soit, vous ne vaudrez pas mieux qu'eux !
Mon ton s'était amplifié et j'avais fini par lui crier dessus. Je ne m'en rendis compte qu'en terminant ma petite tirade, mes muscles bandés de colère. Mon amie recula d'un pas, blessée.
Elle déglutit avec difficulté, des larmes emplissaient ses yeux clairs et je crus qu'elle allait craquer ici. Mais elle ferma les paupières un instant. Ses traits se détendirent et son regard violet, neutre, trouva le mien encore secoué de fureur.
Elle ne comprenait pas. J'avais déjà eu du mal à décrocher ce job, ce n'était pas pour le perdre à cause de Nathan !
— Tu es un idiot, conclut-elle. Laisse-toi malmener si ça te chante. J'en ai vraiment marre de...
— Je pense qu'on a besoin de prendre l'air, la coupa Erwann en la retenant par le bras. Ariel va à la cantine, je t'y rejoins.
Il glissa une main dans le dos de Line sans attendre que je réponde et ils s'éloignèrent. Je repris le chemin de la cantine d'un pas plus agité. À chaque fois qu'on en parlait, ça finissait de la même façon et Line avait de moins en moins de patience. D'un côté, je pouvais la comprendre, si c'était elle qui vivait ces brimades, je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour l'aider, mais là, c'était différent.
Je passais les portes de la salle de réfectoire, puis je me plaçai dans la queue. J'en ressortis moins de dix minutes plus tard, un plateau assez lourd dans les mains. Je choisis une table près des fenêtres et je mangeai en attendant les autres tout en m'occupant sur mon téléphone. J'eus le temps de finir mon repas avant qu'ils ne débarquent. Line vint s'asseoir à côté de moi, les sourcils foncés d'un reste de colère.
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Bound [MxM - α/Ω] [Terminé]
RomanceLa vie d'Ariel est paisible. Ses parents le pressent à se dégoter l'alpha du siècle, mais tant qu'il regarde régulièrement les dossiers qui lui sont présentés, il est plutôt peinard. Employé dans un club oméga, le récessif n'a qu'un rêve ; devenir d...