Lemon & Waffles

Chapitre 8 (2)

* * *

Les paumes sur mes épaules, Aimee se synchronise à mes pas tandis que nous gravissons une pente seulement éclairée par le flash de mon téléphone. Le bus nous a déposé en bas. La rue est incroyablement calme. Pas une seule voiture ne borde la route. Certes, Eliza possède peu de voisins, mais il devrait y avoir de la musique ! Je crains le pire.

— Je ne comprends pas, déclaré-je alors que nous approchons la maison d'Eliza, il est presque vingt-et-une heures !

— Moi qui avais envie de danser !

La voiture des Jefferson ne se trouve pas sur l'allée de garage. C'est bon signe. À l'intérieur, nous sommes accueillies par des bruits de vaisselle.

— Eliza ! crie Aimee.

Nous la retrouvons derrière les fourneaux.

— Qu'est-ce que tu fais ? lancé-je, déconcertée par les montagnes d'amuse-gueules disposés sur les comptoirs.

— À manger pour les invités. Waouh, vous êtes superbes !

En guise de remerciement, Aimee prend la pose.

— Tu sais que ce n'est pas vraiment la Fashion Week, tu aurais juste pu commander des pizzas. Et puis la plupart des gens s'invitent eux-mêmes lors des fêtes, ne t'étonne pas à voir des visages inconnus.

— Mais j'adore cuisiner et j'ai fait des minis pizzas végétariennes, nous apprend fièrement Eliza.

Elle a de la farine plein le tablier, sur les bras et sous le menton. Aimee consulte l'heure, puis la tire par les bras en faisant attention à ne pas se salir.

— Tu devrais te nettoyer et te changer. Casey, charge-toi de la musique, ça attirera du monde !

— Mais j'ai encore les minis quiches à enfourner !

— Il y en a assez, je te l'assure.

Elles disparaissent maladroitement à l'étage. Je dépose mon sac sur un sofa. Je trouve un ordinateur sur la table basse du salon et le connecte à une enceinte. Inutile de me casser la tête pour la musique, je lance une de mes playlists sur Spotify et en ajoute plusieurs aléatoires à la file d'attente, avant de monter le volume. Si quelqu'un lors de la soirée souhaite se mettre derrière les platines, je ne m'y opposerai pas. Les murs vibrent, ça devrait attirer du monde. Déjà qu'Eliza habite dans un trou perdu, maintenant ce sera plus simple de se repérer.

Un par un, tout en improvisant des petits mouvements de danse, je dispose les lourds plateaux un peu partout dans la pièce à vivre, puis quelques uns sur la terrasse. Eliza a dû se réveiller dès l'aube pour préparer tout ça ! Il n'y a pas d'alcool, or, je ne doute pas une seule seconde qu'un gamin majeur débarquera avec des bières et de la vodka. Enfin, c'est toujours ce qui se passe à Rodgertown. Ce mec, Tobey et ou je ne sais plus quoi, a essayé de m'embrasser une fois.

— Mesdames et Messieurs, laissez-moi vous présenter... Coco Chanel !

Eliza fait une entrée timide. Sa tenue appartient à sa mère, j'en ai la certitude. Cette robe noire aux longues manches bien marquée sur la taille, ces multiples perles autour de son cou, ainsi que ce luxueux canotier. Ses vêtements ont l'air plus simples que ceux d'Aimee et moi, ils sont sûrement plus coûteux.

— Ça te change.

— Merci !

— Qu'est-ce que tu faisais ? m'interroge ma sœur.

J'hésite à baisser la musique pour faciliter nos échanges. Par crainte que personne ne vienne, je m'abstiens.

— J'allais pousser les fauteuils pour faire une petite piste de danse.

Avec quatre mains de plus, je mets moins de temps à changer la disposition des meubles. Grâce à quelques manipulations sur le téléphone d'Eliza, les éclairages ont pris une couleur rouge. L'excitation parcourt mes membres. Je lutte pour ne pas sauter et danser sur la piste improvisée.

Il ne reste plus qu'à attendre.