Chapitre 8 (3)

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* * *

Une bonne heure est passée avant l'arrivée des premiers fêtards. La soirée a enfin pu débuter. Je suis ravie de voir qu'ils ont joué le jeu. Les tenues, les unes toutes aussi extravagantes que les autres, ne cessent de me surprendre. Un mec a même débarqué en peignoir ; une fille avec une robe faite de papier aluminium ; une autre avec un balai en guise d'accessoire. Une vague de cris s'élève dans la pièce à vivre à l'arrivée d'un mec avec des packs de bières. Le Tobey de Port Webster. Non seulement ils ont leur propre Tobey, mais aussi un DJ qui a jugé ma musique si merdique qu'il a apporté tout son matériel.

Équipée de son polaroid, Aimee prend des photos de la soirée et fait payer un dollar ceux qui souhaitent récupérer les clichés. Si seulement j'avais eu l'idée avant elle ! J'aurais enfin pu lui donner les cinquante dollars que je lui dois.

Adossée à un mur à siroter ma limonade, je guette la porte d'entrée au cas où la personne que je cherche depuis des heures – j'exagère – décide de montrer le bout de son nez. Ma poitrine vibre au rythme de la musique. C'est une sensation que j'ai toujours appréciée, qui m'incite à aller danser. Elle me rappelle aussi mon amour pour les fêtes. Ça fait des lustres que je ne me suis pas sentie aussi excitée, enflammée par cet ambiance, depuis que...

Ce n'est pas le moment de penser à Charles.

À peine ai-je esquissé un pas vers la piste de danse, le mec en peignoir m'interrompt.

— Salut !

Il me faut quelque temps pour reconnaître Leandro sans lunettes, une bière à la main.

— J'ignorais que tu étais le genre de gars à être drôle ! lancé-je, hilare.

Soudain, je reprends mon sérieux. Mon cœur cogne. Si Leandro est là, alors ça signifie que Roldán doit se cacher quelque part. Je survole la foule du regard.

Leandro s'approche de mon oreille.

— Tu n'as pas l'air drôle non plus !

— Peut-être que je ne le suis pas. Je ne pense pas que je le suis.

Il bouge la tête en rythme. Sans aucune discrétion, il mate le cul d'une fille qui se dirige vers la terrasse. Je claque des doigts devant son visage pour lui rappeler ma présence.

— Les filles préfèrent qu'on les regarde dans les yeux.

— Elle avait une jolie jupe !

Je lève les yeux au plafond. Par solidarité féminine, je me dois de cacher mon amusement.

— C'est quoi la blague la plus drôle que tu aies racontée ?

Il se place à mes côtés.

— Euh... Y a ce mec qui était dans mon lycée qui s'était fait larguer par sa nana. Je lui avais envoyé un message avec le téléphone de la fille pour lui donner un rendez-vous. Il s'est pointé sur le lieu que je lui avais indiqué et il a vu son ex et son nouveau mec. Le lendemain...

Je ne lui laisse pas le temps de terminer son histoire. Mon exaspération n'a cessé de grimper au fil de son récit. Ce pauvre garçon, je ne peux m'empêcher de me visualiser à sa place, avec Charles.

Non, je dois le chasser de mon esprit.

— Alors tu t'es moqué de lui. C'est cruel. Je vais danser.

— Attends, attends, attends !

Je fais volte-face, dévisageant mon interlocuteur du regard.

— C'était la blague ! J'ai vraiment une tête de connard ?

— Quoi ?

— Tu étais supposée dire « C'est une blague ? » et j'aurais répondu « Oui » !

Mon cerveau tarde à traiter les informations.

— Tu comprends, maintenant ?

Je pouffe de rire avec lui, soulagée.

— C'est incroyablement nul !

— J'imagine que je ne suis pas drôle non plus !

— Je vais danser quand même.

Il lève sa bière dans ma direction.

La musique s'imprègne de moi. À chaque fois que je pose les pieds sur une piste de danse, je suis comme en transe. Il n'y a plus que la musique et moi.

Walk for me, baby ! I'll be Diddy, you'll be Naomi, whoa-oh(1) ! Aimee et moi chantons après qu'elle m'ait rejointe.

Le gobelet en l'air, je pivote sur moi-même. La sueur s'accumule sous ma veste.

Il me suffit de hausser le regard pour l'apercevoir. À une vingtaine de mètres de moi. Debout près de la piscine. Le verre devant ses lèvres. En train de me détailler de la tête aux pieds.

Soudain, tout autour de moi semble tourner au ralenti.


(1) Cake By The Ocean de DNCE.

Lemon & WafflesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant