Chapitre 25 (2)

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— Tes parents, tu devrais vraiment les contacter, lui conseillé-je à nouveau.

Il acquiesce et essuie ses larmes. Son impatience augmente au fur et à mesure qu'il tombe sur leur messagerie. En dernier recours, il appelle son frère.

— Pourquoi vous ne répondez pas au téléphone ? s'énerve-t-il. Elle est avec moi, ducon ! Arrête avec toutes tes questions, il y a plus urgent ! Rentre à la maison prévenir maman et papa, quelqu'un a foutu le feu au Tiny Waffle !

Il lui raccroche au nez.

— Il va venir ?

— Pas avant une dizaine minutes, probablement.

Je me redresse et lisse ma robe avec maladresse.

— Je suis désolée, balbutié-je, je vais rentrer, je ne peux pas le voir.

— Ne t'excuse pas, je comprends. Allons-y, je te ramène.

— Non, tu as mieux à faire, je vais marcher.

— Pas question. Je m'en voudrai à vie s'il t'arrivait malheur.

À vie, répété-je dans ma tête. C'est énorme.

Je finis par accepter. Après un aller-retour entre Red Beach et ma maison, puis une petite séance de natation et un sprint jusqu'au Tiny Waffle, mes jambes ne tiendront plus.

Un lourd silence s'est installé dans l'habitacle. Après nos situations respectives, plus personne n'a envie de prononcer un mot. Les derniers événements de la soirée défilent dans mon esprit comme il doit le faire dans celui de Leandro. Il renifle de temps en temps, les paumes fortement agrippées au volant. Moi, je dois briser mon mutisme afin de lui indiquer l'itinéraire jusqu'à chez moi.

Nous nous sommes tellement approchés du brasier, que son odeur émane de nos peaux. Les vitres ouvertes ne nous sont d'aucune aide.

J'inspire un bon coup. J'ignore ce qui m'attend à la maison.

Perdue dans un labyrinthe de pensée, un arrêt brusque me propulse hors de ma tête. Je geins, la cage thoracique douloureuse à cause de ma ceinture bloquée. Un automobiliste nous a dépassés et a failli se cogner contre la voiture de Leandro en se rabattant sur la voie de gauche.

— Il est malade ce type !

La voiture zigzague. Le crissement de ses pneus m'assourdit. Dans une tentative de prendre un virage, elle s'écrase contre un arbre.

— Mon dieu, s'exclame Leandro, il se passe quoi ce soir ?

Que ce soit à droite ou à gauche, des maisons s'illuminent.

Leandro et moi sommes les premiers témoins de ce curieux accident, nous devrions porter secours à cette personne, ivre ou non.

À l'instant même où nous quittons l'habitacle, Aimee fonce à l'opposé de l'accident.

— Oh non ! m'écrie-je, tandis que je réalise vers qui elle se dirige.

Une traînée de sang mène jusqu'au corps inerte de notre chienne. D'Ade.

Ma sœur tombe à genoux, sans s'inquiéter de les égratigner. Ses mains tremblantes n'osent pas la toucher, comme si elle craignait de lui faire mal.

Il n'y a plus rien à faire. Ses os sont brisés. Sa poitrine ne se gonfle plus d'air, écrasée.

Ade est morte.

Mon cœur serre. Mes épaules s'affaissent. Les regrets me martèlent l'esprit.

Tout ce qu'elle voulait, c'était m'exprimer son amour. Moi, je l'ai rejetée.

Mon dieu, je voudrais tellement que son cœur batte ne serait-ce qu'une minute pour lui prouver à quel point je l'aime.

— Vous...

Je saisis la poignée de Leandro pour l'arrêter. Aimee risque de piquer une crise si l'un de nous deux parle. Il est préférable de lui laisser le temps

Du mouvement attire mon attention plus loin, au niveau du virage. Mon père a ouvert la portière de la voiture accidentée et communique avec le chauffard.

Mon corps se fige. Je reconnais cette veste en cuir. La réalisation me fait faire un pas en arrière.

— C'est Shaun, je préviens Leandro.

Ce mec a embrassé mon copain.

Cet assassin a roulé sur Ade.

Il a décidé de faire de ma vie un enfer.

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