Musique : Vieux frères, Fauve
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L'immeuble avait changé.
Ce fut la première réflexion que Marcus se fit une fois franchi le portail qu'il connaissait par cœur. Lorsqu'il en était parti, pour déménager dans la nouvelle maison que Goyle lui avait offerte en remerciement de ses services, les Rhyce avaient disparu depuis longtemps, la vieille ne sortait pas de son appartement et les Boswell se terraient dans le leur. Il n'y avait plus aucun enfant qui jouait dans le jardin ou dans les escaliers, leur terrain de jeu favori.
A présent, les fenêtres du premier étaient ouvertes, laissant échapper de vifs éclats de voix. Marcus reconnut avec une certaine émotion Trevor, son fils aîné, et Flora, sa benjamine. Au rez-de-chaussée, la fenêtre de la vieille était entrouverte et laissait échapper une épaisse fumée verte : malgré cette normalité retrouvée, Marcus ne put s'empêcher de froncer les sourcils et de prier pour qu'elle ne fît pas exploser l'immeuble.
A pas silencieux, il entra dans le hall et commença à gravir l'escalier patiné par le temps. Les marches de bois craquaient sous ses pieds, faisant virevolter une poussière qui brillait dans la lumière. Au palier du premier, Marcus se dirigea vers son appartement et frappa trois petits coups à la porte. Il n'eut qu'une minute à attendre avant que le battant ne s'ouvrît à la volée, laissant apparaître sa femme Enid qui brandissait sa baguette.
Elle aussi avait beaucoup changé. En un peu plus de deux mois, elle avait énormément maigri, ce qui avait fait ressortir son côté osseux. Au milieu de son visage aux pommettes saillantes, ses yeux bruns étaient délavés. Lorsqu'elle vit son mari sur le pas de sa porte, elle pâlit brusquement et en laissa tomber sa baguette sur le sol.
« Maman ? lança une voix enfantine derrière – c'était Roderick. Qu'est-ce qu'il se passe ? »
Enid ne répondit pas, incapable de détacher ses yeux immenses de Marcus.
« C'est moi, lança ce dernier à voix haute. C'est papa. »
Il y eut des raclements de chaise, des exclamations interloquées, puis des pas précipités. La porte s'ouvrit en grand derrière Enid, laissant apparaître quatre visages d'âges et de formes différents, mais aux traits communs.
« Papa ! » cria Flora en se précipitant vers son père pour se jeter dans ses bras.
Elle fut aussitôt suivie de Roderick et de Xavier, tandis que Trevor, que l'adolescence ne rendait pas enclin aux effusions, se contentait d'un signe de tête. Marcus serra les bras autour de ses enfants, les étreignant contre son cœur avec soulagement. Comme ils lui avaient manqué, pendant ces deux mois de cavale. Il s'était senti en paix avec sa conscience et ses valeurs pour la première fois depuis longtemps, mais il n'avait cessé de penser à ses enfants. Et à sa femme.
Marcus releva la tête pour la tourner vers Enid. Celle-ci n'avait pas bougé, et regardait la scène avec un air déchiré, n'osant visiblement pas faire un pas en avant. Alors, Marcus se dégagea un bras et la prit par les épaules pour l'attirer contre lui, contre leur famille. Et Enid, qui n'embrassait jamais personne, qui n'étreignait jamais personne, se retrouva à plaquer ses enfants et son mari contre son cœur.
Cela faisait longtemps, très longtemps, que Marcus et Enid ne s'étaient pas embrassés. Même avant la guerre, ils se disputaient souvent – enfin, Enid faisait des reproches à son mari qui ne répliquait pas. Puis l'angoisse de la guerre et des disparitions, la pression des Rafleurs, tout cela avait eu raison d'eux et Marcus n'avait même pas souvenir qu'il eût pris la main de sa femme depuis le mois d'octobre.
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La guerre aux yeux gelés
Fanfiction"Dans les guerres, ce ne sont peut-être pas les enfants que l'on vise, mais c'est eux que l'on tue." André Frossard Du haut de leurs dix ans, la principale préoccupation de Rebecca et Roderick est d'attraper des papillons et des chats sauvages, de s...