44. Le rat blanc

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Ainsi, Thomas était vivant ! Le fantôme qui avait hanté les nuits liégeoises, le cauchemar des hommes du Prince-Évêque, se tenait devant moi, dans ce conduit d'égout, confectionnant un bandage de fortune autour de sa plaie.

-Ne te tracasse pas pour moi ! J'ai connu bien pire que ça. Je tiendrai bon.

Thomas s'efforçait de faire comme si sa blessure était bénigne, pourtant son teint cireux, autant que le sang qui coulait à flots, semblaient le démentir.

-Il faut sauver Morgane. Nous n'avons que très peu de temps devant nous.

Son courage, bien que touchant, m'arracha une ironie amère.

-Ah oui ? Et comment allons-nous entrer dans la prison ? Peut-être allons-nous nous présenter aux portes et demander gentiment à ce qu'on nous ouvre ?

-Ne joue pas à l'imbécile, ce n'est pas le moment ! Je sais qu'il existe un tunnel qui débouche dans les sous-sols de Saint-Léonard. C'est là que j'ai besoin de toi. Tu es le seul à pouvoir nous guider efficacement jusque-là.

J'avais passé des mois entiers à explorer ce réseau souterrain, jusque dans ses moindres recoins. Pourtant, si Thomas disait vrai, il me restait encore bien des choses à découvrir. Rapidement, j'évaluai la direction de la sinistre forteresse.

-D'accord, allons-y, approuvai-je enfin, incertain face à ce plan délirant.

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Tandis que nous marchions en silence, au-dessus de nous, résonnaient le fracas et les cris de la féroce bataille qui se déroulait encore dans les rues de Liège.

-La ville entière s'est embrasée, dirait-on.

C'était la première fois depuis de longues minutes que Thomas daignait ouvrir la bouche.

-Les ouvriers des usines de Pangelpique se sont joints à la lutte. Saturnin risque d'avoir bien de la peine à mater la révolte, cette fois.

Il n'était pas difficile d'imaginer le massacre qui se déroulait en surface. Saturnin et ses chevaliers se montreraient sans pitié afin de défendre leur Prince-Évêque.

-Mais j'ai bien peur que toi et tes amis ayez été trahis...

Je penchai la tête, consterné.

-Vous étiez attendus ! Ils savaient que vous alliez tenter quelque chose, aujourd'hui. Ils vous ont mis la main dessus à l'instant même où vous avez surgi des égouts. Quelqu'un a dû les prévenir. Vous n'aviez aucune chance de réussir. Je suis désolé. Ils connaissaient déjà votre plan, jusque dans les moindres détails.

Ce que venait de me dire Thomas me bouleversa et me plongea dans un abîme de perplexité. Personne, parmi les compagnons de Patte-Folle, n'avait quitté les égouts avant que ne soit donné le signal de l'assaut, aujourd'hui même. Comment quelqu'un aurait-il pu trahir la cause ? Et surtout, qui ?

-Et toi ? Pourquoi ?

Thomas comprit directement le sens de ma question. Tout en marchant, il m'apprit ce qui l'avait conduit à prendre l'identité de l'homme au bec d'oiseau.

-Après la bataille de Spa, j'avais décidé de rester là-bas. Je voulais faire mon possible pour redresser cette ville. La reconstruire. La défendre contre ceux qui voudraient à nouveau la menacer. Mais rien ne s'est passé comme prévu. Ceux qui voulaient remplacer Henrotin me considérèrent rapidement comme un étranger, un dangereux arriviste qui projetait de les évincer. Je craignis bientôt pour ma vie. Je savais qu'il ne faudrait plus beaucoup de temps avant qu'on ne m'enferme ou qu'on m'assassine. Il était donc impératif que je parte au plus vite. Je me souvins alors de ces bandits qui nous avaient aidés à repousser les troupes de Saturnin lors de la bataille. La bande de Robert le Mouillard.

Macrâle: itinéraire d'une sorcière de BelgiqueOù les histoires vivent. Découvrez maintenant